Rosalie était en bonne santé. Elle jouait, pleurait, riait, mangeait comme tous les enfants de son âge. Rosalie avait à peine deux ans et la vie devant elle. Pourtant, sans raison apparente, Rosalie décédait une nuit de novembre laissant ses parents profondément désemparés, Comment fait-on pour survivre à l’impensable ? Tom Hart nous le raconte dans un récit infiniment sombre et poignant de plus de 270 pages…
Ne vous fiez pas au bleu relativement lumineux de la couverture, cet album-là est sombre, très sombre. Tom Hart, auteur américain de bande dessinée tendance indie, a décidé de raconter ici un épisode de sa vie, le plus insensé, le plus traumatisant, la mort subite de sa fille Rosalie. Un album autobiographique qui prend pour lui la forme d’une catharsis et pour nous celle d’un témoignage unique, courageux, précieux.
Novembre 2011, nous avons perdu Rosalie il y a quelques jours. C’est comme si une bombe avait explosé
L’effet d’une bombe ! Quand on n’y a pas été confronté, quand on n’a tout simplement pas imaginé un tel événement, parce qu’on n’imagine jamais ce genre d’événements, il est impossible de savoir à quel point la mort d’un enfant est un traumatisme sans équivalent.
Tom Hart et sa femme, Leela, comme nombre de parents dans cette situation, vont sombrer, tomber dans un trou noir sans fond, pleurer, énormément pleurer, s’isoler, se retrancher, fuir les lieux qui ont vu Rosalie vivre, trouver refuge chez des amis, marcher dans la nature pour y trouver peut-être un signe, se remémorer des souvenirs qui auraient dû être joyeux, chercher des réponses à leurs questions parfois auprès de parents pareillement endeuillés, tenter de comprendre ce qui s’est passé. Mais il n’y a rien à comprendre… Rosalie était morte.
Quand on a de la chance, on dort et on oublie
Le choc initial passé, Tom Hart retranscrit ses pensées sous forme de croquis et de notes pendant plusieurs semaines comme pour intégrer les faits, cesser de les nier, trouver un sens, un nouveau sens à la vie. Et c’est à travers l’art, la culture et souvent par l’image que Tom Hart trouve finalement un moyen de s’en sortir, d’accepter les faits et d’offrir une deuxième vie à Rosalie.
De ces notes et croquis, il en tire ce roman graphique à la fois intime et universel, faisant de sa douloureuse expérience un témoignage essentiel pour tous et peut-être un réconfort pour ceux qui subissent la même tragédie. L’album est d’ailleurs dédicacé « aux parents qui ont perdu des enfants dans la guerre, la pauvreté, la maladie, la violence, le chaos, ou la privation ». Car oui, quelque soit la cause du décès d’une enfant, la souffrance est la même. Il est aussi dédicacé à Molly Rose, la petite soeur de Rosalie née quelques années après le drame. Molly Rose, la touche d’espoir. Parce que la vie doit continuer… Magnifique !
Eric Guillaud
Rosalie Lightning, de Tom Hart. Éditions L’Association. 25€