Douce France, c’est d’abord l’histoire d’une rencontre, celle de Christian, jeune cadre ambitieux dans une entreprise de BTP, et de Raymond Langlade, 92 ans, ancien résistant et homme politique, toujours influent. C’est aussi la confrontation de deux périodes de notre histoire proche. D’un côté, les années noires de la Seconde guerre mondiale, de l’autre le début du XXIe siècle avec son lot de tensions sociales nées de la crise économique internationale. Si Christian n’a pas connu la guerre, il lui doit sa carrière. Christian vient en effet d’être propulsé à la tête du chantier d’un mémorial dédié à la Résistance dans la petite ville de Saint-Yves, d’où il est d’ailleurs originaire. Une belle promotion et un gros chantier. C’est à cette occasion qu’il rencontre Raymond Langlade qu’il érige aussitôt en héros de la Résistance. Un modèle, un homme courageux, droit. Enfin presque… Au fil des rencontres, Christian apprend à mieux connaître l’homme et découvre peu à peu ses zones d’ombre. Mais qui n’en a pas ? Lui-même, issu d’un milieu plus modeste, est constamment sur le fil, prêt à renier les siens, parents et amis, pour faire carrière, rejoindre les nantis…
Un dessin épais, charbonneux, proche de l’esquisse, une histoire dense, très dense, des personnages entre ombre et lumière… le scénariste Simon Rochepeau – qui signe ici son premier album de bande dessinée – et le dessinateur Lionel Chouin (Les Mémoires mortes, Colt Bingers l’insoumis…) nous offrent un récit âpre mais très intéressant sur l’ambivalence de l’être humain. Raymond hier, Christian aujourd’hui, quelque soit l’époque, quelque soit le contexte, l’homme est un être complexe qui peut le meilleur comme le pire… EGuillaud
Douce France, de Simon Rochepeau et Lionel Chouin. Editions Futuropolis. 19 euros