17 Nov

Carnet intime, de Zep. Editions Gallimard. 25 euros.

Une porte rongée par la moisissure, un arbre tordu par le vent, une église éventrée par le poids des années, des toits qui s’enchevêtrent et s’entrechoquent, une tortue qui traine sa carcasse vieille de plusieurs dizaines d’années, des temples envahis par la végétation… Voilà ce qu’on peut trouver dans ce carnet de voyage pas comme les autres, un carnet intime en fait qui réunit une centaine d’illustrations réalisées par Zep au cours de ses multiples voyages. Comme une thérapie ! « J’ai commencé ces carnets il y a une vingtaine d’années. J’étais angoissé à l’idée de voyager et j’avais trouvé ce truc pour me calmer. Je capturais un fragment du lieu dans lequel je me trouvais, une porte, une bouche d’égout, un réverbère… et cela le rendait familier, moins hostile. Petit à petit, l’angoisse de la destination inconnue a disparu et a fait place au plaisir explorateur de dessiner ». Et Zep le voyageur aime avant tout ce qui est marqué, blessé, torturé, outragé, par les éléments, par le temps. « Je suis fasciné par ce moment où la nature reprend possession des constructions humaines… », confie-t-il, « Quand le bois semble vivre à nouveau, quand l’érosion donne une allure de montagne aux murs. J’aime la rouille, le lierre, l’oxydation. J’aime quand la nature gagne ». A une jeune femme qui le voyant faire un croquis sur la place de Porquerolles lui demande de la dessiner, Zep lui répond de repasser dans 50 ans. Le temps nécessaire pour qu’apparaissent quelques rondeurs, quelques rides aussi sur le visage et peut-être des cheveux blancs. Zep est ainsi ! De Porquerolles au Népal en passant par la Tanzanie, le Japon, l’Italie ou encore Québec, ce nouvel opus nous offre une approche différente du voyage et révèle dans le même temps une autre facette de l’auteur de Titeuf. Un album dépaysant et poétique ! E.G.