01 Nov

Il était une fois en France t6 de Fabien Nury et Sylvain Vallée – Glénat

Le Grand Paris de la BD n°5

Il était une fois en France (t6)

Attention cette saga est la série d’albums à lire sans plus attendre. Devenue culte, elle a reçu le prix de la meilleure série à Angoulême en 2011. Un succès d’édition avec 150 000 exemplaires vendus pour le 1er tome et un total de 500 000 pour les cinq premiers. Le 6ème et dernier vient tout juste de sortir.

L’essentiel de l’intrigue se déroule pendant la seconde Guerre mondiale. Elle est tirée d’une histoire vraie, celle de Joseph Joanovici, figure des plus controversées.

« Un homme au destin extraordinaire, une fresque humaine phénoménale. Au cours de la lecture de chacun des 6 tomes, il vous sera difficile de dire si c’est un héros ou un salaud, un Résistant (150 personnes sauvées) ou un Collabo (des milliards engrangés). Pendant la seconde Guerre mondiale, il a été les deux à la fois et pas qu’à moitié, avec une formidable capacité de rebond et un instinct de survie hors du commun. »

Joseph Joanovici - photo identité judiciaire

Ainsi s’exprime avec passion le scénariste Fabien Nury quand il répond à une question sur son personnage.

« Je ne pouvais pas m’empêcher de l’aimer à la fin du tome 6. A la fin du 4 je l’ai profondément détesté. Il a tué tant de monde et pourtant il obtient son certificat de bon Résistant. Je souhaitais sa chute. Comme son pire ennemi c’était lui-même, elle a fini par arriver. »

Son compère, le dessinateur Sylvain Vallée, insiste quant à lui sur « son souhait d’entretenir la dimension humaine du personnage, quoi qu’il ait fait ». « Je démarrais sur une fiction et au fil du dessin la réalité du personnage devenait palpable», confie-t-il. « J’ai un dessin semi caricatural, qui tend vers l’expressionisme. C’est plus intéressant de suggérer une émotion dans le regard du personnage que de l’écrire. Il y a beaucoup de choses qui viennent du ventre quand je dessine. C’est ma sensibilité. Mon imaginaire vient du cinéma. Depuis gosse, je suis dans la BD. Le cinéma c’est mon rêve.»

Les deux auteurs confirment que le titre de la série est bien sûr un hommage au cinéma de Sergio Leone et en particulier au film Il était une fois en Amérique pour la structure en flashback du scénario du 1er tome. Pour chacun des tomes suivants, ils avaient d’autres références cinématographiques en tête : Monsieur Klein (t.2), L’Armée des Ombres (t.3), Paris brûle-t-il ? (t.4) et Règlement de comptes (t.5). Pas de référence dans le dernier, la série est elle-même devenue une référence.

planche 3 - Sylvain Vallée - Glénat

Fabien Nury glisse avec malice : « Au départ, personne ne croyait que cela pourrait marcher. Nous faisions l’inverse de ce qui est conseillé habituellement pour un succès : une histoire simple, un personnage attachant et des rebondissements linéaires. Là nous démarrons avec des flashbacks, un anti-héros moche de sa personne, poursuivi par un autre type pas tellement plus sympathique. Et c’est devenu le plus grand succès de nos deux carrières. Croire en son histoire, c’est la clé. Faire confiance au regard des personnages, travailler les silences, les réactions des personnages. Le décor ne raconte pas une émotion, il donne une ambiance que nous avons en tête. La seconde Guerre mondiale, c’est notre mémoire collective, notre imaginaire. Cette période exerce toujours une fascination. Nous proposons un nouveau point de vue sur un paysage familier. Joseph Joanovici est le plus formidable vecteur pour raconter l’Occupation. »

« Qu’est-ce que moi j’aurais fait à ce moment-là? C’est la question que nous pouvons tous nous poser. Lui a choisi les deux de miser sur les deux tableaux : la Résistance et la Collaboration. », complète Sylvain Vallée.

Tous deux concluent sur une certitude : leur aventure commune est loin d’être terminée. Un film en cinémascope est en pourparlers. Un passage sur grand écran dont ils entendent rester maître. Et côté B.D, ils n’oublient pas que « contrairement aux Etats Unis ou d’autres pays, en France, notre héritage criminel est largement sous-estimé ». Il y aurait donc là « matière à de nouvelles histoires. »

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La BO à se mettre entre les oreilles pour prolonger le plaisir de cette BD : Il était une fois en Amérique d’Ennio Morricone

Pour en savoir plus : Editions Glénat et le site Il était une fois en France

Le blog de Sylvain Vallée

Le reportage de France 3 sur le Tome 4

30 Oct

Spécial Jeunesse #1

Le Grand Paris de la BD n° 4

Nouveauté de la rentrée 2012 : les vacances de la Toussaint durent plus longtemps ! Voici donc une sélection de trois albums, une tri-thérapie d’humour contre la grisaille de cet automne hivernal …

Game Over – Cold Case t8 de Midam & Adam – Madfabrik

Beaucoup de parents pourraient hésiter à acheter une bande dessinée sans paroles ou presque. Certes les phylactères sont rares dans les aventures de ce petit Barbare, l’avatar de kid Paddle dans le monde du jeu vidéo, un autre personnage du dessinateur Midam. Un petit Barbare qui vit dans l’espoir, renouvelé à chaque planche, de sauver sa princesse Brindille. Deux personnages dont la fin est toujours connue, puisque toujours la même : Game Over – une fin de partie où ils se retrouvent écrabouillés, décapités, dévorés, voire plus si affinités. A partir de cette trame narrative des plus simples, les deux scénaristes font preuve d’inventivité pour charmer leurs lecteurs, de sorte que le rire est systématiquement au rendez-vous. D’ailleurs si vous même avez des idées de gag, n’hésitez pas à leur en faire part : nombreux sont les internautes à avoir proposé une planche. Alors, pourquoi pas vous ? Si cela vous tente : gameoverforever

Grrreeny – Vert un jour, Vert toujours de Midam – Madfabrik

Midam encore, avec un nouveau venu dans la galerie des personnages de sa Mad Fabrik, sa propre maison d’édition. Une sorte de cousin de Kid Paddle, un cousin de la jungle, un tigre devenu vert après avoir nagé dans un lac radioactif. L’idée de départ est séduisante : alerter sur les risques écologiques de la planète. Mais cette bonne intention ne suffit pas pour que le message soit compris. Dès que la démarche est trop ouvertement militante, cela ne fonctionne plus. Le discours environnemental plaqué bloque le rire. Quelques gags sont néanmoins réussis, souvent les moins bavards, comme celui où Grrreeny multiplie les cadeaux à base d’objets récupérés et qui se voit offrir au final un container pour trier et recouvrer. Gageons que si l’auteur murit une suite à ce premier album encore un peu trop vert, il saura s’entourer de gagmen ou fera peut-être appel, comme pour Game Over, aux internautes. La préservation de notre caillou commun le mérite.

Titeuf :  A la folie t13 de ZepGlénat

La bonne nouvelle de cette rentrée. Titeuf a refait son apparition dans nos cours de récréation. Treizième album, celui de la maturité. Cela se sent que son auteur Zep a fait l’école buissonnière pendant quatre ans. Celle d’Happy Sex, suivi de deux rééditions : Happy Rock et Happy Girls. Trois univers adultes où la liberté de ton est assumée, comme dans ses carnets intimes.

Pour notre pré-ado à la houppe rebelle, c’est donc un retour en grande forme. Comme le suggère le sous-titre A la folie, Titeuf est encore amoureux, mais plus de Nadia, la bêcheuse qui lui distribue beigne sur beigne depuis toujours. Une nouvelle demoiselle fait son apparition dans la classe : Ramatou, une migrante échappée de la misère et de la guerre d’un pays qui pourrait être l’Angola. Le moment le plus gracieux de la rencontre entre ces deux ados naissants, c’est – au sens littéral – quand ils décollent pour marcher sur les nuages. Un subtil instant de poésie graphique. Que les amateurs de « caca prout », marque d’humour consubstantielle du monde de l’enfance, se rassurent. Cet ingrédient est toujours là, dès les premières cases : un long récit ouvre l’album. Titeuf n’est plus un gars, il est confronté à l’angoisse ultime de la perte du zizi. Cela fera 20 ans en décembre que Titeuf a trouvé sa place dans tous les cartables. Un plaisir renouvelé à partager en famille.

Quelques planches à découvrir de Titeuf

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Zep - Glénat

29 Oct

Versailles – le Crépuscule du Roy t1 de Eric Adam, Didier Convard & Eric Liberge – Glénat

Le Grand Paris de la BD n° 3

Versailles T1 Le Crépuscule d'un Roy Glénat

Si Versailles m’était dessiné ou comment le 9ème art fait une entrée remarquée dans un des plus grands symboles de l’Histoire de France.

Un scénario de science fiction sous les ors de la royauté, l’idée est belle : transformer le Château de Versailles en un univers où « ses habitants ont perdu tout contact avec la réalité du monde qui les entoure », pour une histoire où passé et futur ne se distinguent plus vraiment.

Didier Convard et Eric Adam, les deux scénaristes, sont partis de la réalité historique connue de tous : le « Roy » (son nom n’est pas donné mais tout évoque le règne du Roi Soleil) et sa Cour, ses complots et ses intrigues galantes.

« Versailles, plus qu’un château : un monde », dans lequel apparaissent peu à peu des éléments incongrus (des lames tranchantes jaillissent des manches des valets), anachroniques (la géolocalisation d’une marquise égarée) ou irréels (le doyen de la Cour a 263 ans)

Versailles de Liberge/Convard/Adam - Glénat

La plume des auteurs sait nous égarer et brouille les pistes au fur et à mesure que l’histoire progresse. Ils ont eu accès à toutes les pièces du palais et toutes ses archives en lien avec le comité scientifique de Versailles. Cela se sent dans les dessins d’Eric Liberge : chaque détail est rendu avec précision pour mieux nous prendre au piège, jusqu’à la révélation finale.

C’est un des avantages de ce pari original entre les éditions Glénat et le Château de Versailles, un partenariat pour une trilogie : trois albums, trois époques – futur, présent et passé. Et la bonne idée, c’est de ne pas avoir fait une énième BD patrimoniale, souvent assommante pour les enfants et un achat obligé pour les adultes en fin de visite du monument.

Versailles de Liberge/Convard/Adam – Glénat

A vous de juger si cette nouvelle orientation de la Bande Dessinée vous séduit ou si ce n’est qu’une façon de faire venir encore plus de touristes dans un des lieux les plus visités en France.

Car ce n’est que le début. En plein essor dans l’édition d’art, les partenariats entre éditeurs et institutions publiques touchent depuis peu le monde de la BD. En novembre, paraitra aussi Les fantômes du Louvre, promenade en 22 portraits d’Enki Bilal, coédition entre Futuropolis et le musée du Louvre.

Les trois tomes du triptyque annoncé sont indépendants. Le deuxième marchera sur les traces d’Alexandre Dumas et de son Chevalier de Maison-Rouge en jouant sur les paradoxes temporels entre notre époque et celle de Marie-Antoinette. Quant au troisième il mettra en scène Molière et le Masque de fer.

Pour aller plus loin à la rencontre des auteurs :

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La BO de l’album à se glisser entre les oreilles pour prolonger le plaisir : Dustin O’Halloran « Opus 17 » le musicien classique contemporain découvert à travers le film « Marie Antoinette » de Sofia Coppola.

Les liens pour découvrir les premières planches :

Les éditions Glénat & Le Château de Versailles

27 Oct

Le magasin des Suicides d’Olivier Ka & Domitille Collardey – Delcourt

Le Grand Paris de la BD n°2

Ne cherchez pas, une boutique comme celle ci vous ne la trouverez pas sur les Champs Elysées, quand bien même, si pour les grecs anciens, ces champs étaient une succursale des enfers. Ils considéraient même le suicide comme une souillure. L’iconoclaste romancier Jean Teulé sait nous surprendre, avec lui, le suicide devient une activité commerciale fort lucrative. Depuis 10 générations, la famille Tuvache propose des kits pour finir sa vie, succès garanti. « Le Magasin des Suicides » est le livre le plus vendu de son auteur Jean Teulé, traduit en 19 langues, un auteur qui s’est aussi fait connaître avec ses bandes dessinées à base de photos retouchées. Cette fois ci ce n’est pas lui qui est au pinceau, et cet album n’est pas d’avantage une déclinaison papier de l’adaptation papier du film d’animation adapté par le cinéaste Patrice Leconte, lui aussi auteur de BD à ses débuts.

Le magasin des suicides planche 3

C’est en fait à l’auteur de inspiré de « Pourquoi j’ai tué Pierre » Olivier Ka que l’on doit cette version BD. Les gags mis en cases font toujours autant mouche : « Vous avez raté votre vie ? Réussissez votre mort ! » L’humour est servi noir : « Payer à crédit ? Vous plaisantez ! Pourquoi pas une carte de fidélité ! » Mais n’y voyez pas une ode au suicide, bien au contraire, sous le crayon de Domitille Collardey, Alan le dernier né de la famille Tuvache prend vie en couleur. Ses parents ont choisi son prénom en hommage à Alan Turing, un suicidé célèbre considéré comme le père fondateur des premiers ordinateurs à qui Apple pourrait rendre hommage avec sa pomme croquée. Mais Alan est très différent de son frère Vincent (référence au peintre suicidé Van Gogh) et de sa sœur Marilyn (Monroe). Lui est dessiné en couleur, quand eux sont sombres et suicidaires, lui est plein de vie et va bousculer toute la vie de la famille. Ce qui n’est vraiment pas bon pour les affaires. Le dessin suit se bouleversement et le cadre des cases disparaît, la mise en planche rappelle la liberté dont faisait preuve Winsor McCay pour « Little Nemo ».

Alors si cette nouvelle version du « Magasins des suicides » convainc par son invention graphique, le scénario démarre fort avec la reprise du catalogue drôle des mille et une façons de mourir, mais cela ne suffit pas à compenser la faiblesse de la seconde partie. Reste ce qui fait la force du roman : une invitation à vivre.

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La BO à se mettre entre les oreilles pour prolonger le plaisir de cette BD :

Dominique A « Rendez nous la lumière » de l’album « Vers les lueurs »

Pour découvrir les premières planches de l’album :

Editions Delcourt

Le point de vue de la presse spécialisée

bdgest.com

actualitte.com/critiques-bd

sceneario.com/bd

La bande annonce du film de Patrice Leconte sortie en salle mercredi 26 sept 2012 :

25 Oct

Masqué – Bienvenue à Paris Métropole t1&2 de Serge Lehman & Stéphane Créty – Delcourt

Masqué 2 Le jour du Fuseur

Le tome 2 de la tétralogie est signé Serge Lehman et Stéphane Créty. C’est un Grand Paris noir et angoissant qui est la toile de fond de cette aventure de super-héros.

Le Grand Paris : une capitale à la mesure des grandes mégapoles mondiales. Tel est le décor que Serge Lehman et Stéphane Créty ont choisi pour dérouler les aventures d’un nouveau super-héros : l’Homme Masqué.

L'Observatoire de Meudon

« Paris Métropole » : nombreux sont ceux qui en rêvent. Le Grand Paris : une capitale à la mesure des grandes mégapoles mondiales. Tel est le décor que Serge Lehman et Stéphane Créty ont choisi pour dérouler les aventures d’un nouveau super-héros : l’Homme Masqué. « We don’t need another Hero », chantait Tina Turner en 1985. Si les Etats-Unis en disposent à profusion, la France est toujours à la recherche de la cape d’un super-homme. Si Gotlib, avec Jacques Lob, avaient tenté de relever le défi en 1972 avec Super-Dupont, c’était dans une veine parodique, pas de quoi forger un nouveau mythe moderne.

Tel est donc le défi que s’est lancé Serge Lehman pour le scénario de sa tétralogie « Masqué ». Dans le premier tome toutes les bases et le contexte de la création d’un nouveau mythe sont posés.

L’histoire, c’est celle du militaire Braffort (la traduction en français d’Armstrong, une référence au héros de l’espace) qui après avoir été blessé dans une mission dans le Caucase, regagne Paris. Il découvre la capitale transformée en une métropole rétro-futuriste. Dans son dessin, Stéphane Créty inscrit la ville entre deux références, l’actuel mouvement Steam-punk, en mixant les époques et le gigantisme de l’architecture de Blade Runner, le film de Ridley Scott des années 80. Paris compte désormais dans ses arrondissements La défense, Saint-Denis, ou encore la colline de Meudon et son Observatoire, le décor d’ouverture de ce second tome.

Le préfet Beauregard

La métropole est gérée par le préfet Bauregard, un préfet de Police inspiré de l’actualité francilienne, auquel s’oppose Michèle Caprice, le maire du premier district, Parisville, correspondant au Paris intra-muros actuel. L’histoire s’inscrit dans une contestation sociale, proche de celle des « Anonymous », augmentée par l’apparition d’anomalies, « des êtres-machines  qui s’auto-assemblent et évoluent ». Apparaît alors le super-héros : le sergent Braffort chargé d’une énergie qu’il découvre dans les entrailles de Montmartre, reprend les habits du Fantôme, le Fantômas original du feuilleton de la Belle Epoque, rendu célèbre par le cinéaste Louis Feuillade.

En deux albums, les auteurs réussissent déjà à développer une vision stupéfiante d’un Grand Paris. A la croisée de Tardi, pour la précision dessinée de la géographie des lieux, et de Bilal, pour l’imaginaire débridé, cette bande dessinée propose une approche nouvelle de notre capitale dans le choc anachronique volontaire des objets et des époques.

Reste à trouver un véritable nom à ce nouveau super héros français :« l’Homme Masqué» est un peu court. Le tome 3 à paraitre cet automne donnera peut être une réponse.

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>> Masqué – tome 2 – « Le jour du fuseur » aux Editions Delcourt .
Un scénario de Serge LEHMAN sous la plume de Stéphane Créty

La BO à se glisser entre les oreilles pour prolonger le plaisir de cette BD :

Caravane Palace « Rock it for me »

Pour plus d’informations : éditions Delcourt

Portrait de Serge Lehman sur France 3 IDF