Vous ne ne connaissez certainement pas, son nom n’est pas passé à la postérité mais il a marqué son époque en apportant un autre regard sur l’art du paysage, le peintre Lazare Bruandet, être aussi talentueux et créatif que violent et imprévisible, est le personnage central de ce nouvel album du très talentueux Frantz Duchazeau…
Paris, le 21 janvier 1793. Louis XVI vient d’être guillotiné. « Ils ont raccourci l’cochon » entend-t-on chanter dans les rues de la capitale tandis que certains se défoulent sur une femme ayant eu le malheur d’apporter un soutien à la royauté. C’est le début de la Terreur !
Pour le peintre Lazare Bruandet, pas le temps de traîner dans les rues. Entre sa maîtresse, une brune plantureuse, sa peinture et la taverne du coin, notre homme retrouve son foyer, le temps de tuer sa femme dans une crise de jalousie. Et de fuir ! Direction la campagne avec pinceaux mais aussi sabre et pistolet dont il sait tout autant se servir. On ne sait jamais en ces temps chaotiques !
Et c’est dans un monastère qu’il se réfugie, lui le pourfendeur d’ecclésiastiques, avec une ambition, une seule : peindre. Et oublier ce pays qui se déchire.
« Ce n’est rien que de donner un coup de sabre ou un coup de fusil… », se dit-il devant la beauté d’un paysage, « mais c’est bien autrement difficile de donner un coup de pinceau sur le haut des arbres ou sur un ciel bleu ».
Mais la colère des hommes ne s’arrête pas aux rues de Paris. Des révolutionnaires, des royalistes, ratissent la campagne à la recherche de têtes à couper. Bruandet doit poser ses pinceaux à contrecoeur pour apprendre à ces hôtes, les moines, à se défendre…
Sacré personnage que ce Lazare Bruandet, dans la vraie vie comme ici, une gueule de héros comme on les aime, taillé à la serpe, au regard aussi fou que déterminé, un dur à cuire qui s’attendrit devant la beauté de la nature et déteste la violence des hommes dont il a pu souffrir enfant, un hors-la-loi ou plus exactement un esprit libertaire, égocentrique, qui se moque des règles imposées. Oui, un sacré personnage, un sacré caractère et une sacrée BD au scénario d’une très belle fluidité et au trait charbonneux séduisant.
Ceux qui ont adoré Le Rêve de Meteor Slim aux éditions Sarbacane – et j’en fais partie – ne pourront que se régaler ici. La somptueuse couverture devrait suffire à les en convaincre !
Eric Guillaud
Le peintre hors-la-loi de Frantz Duchazeau. Casterman. 20€
© Casterman / Duchazeau