Plutôt que la déprime, Alexandrin a choisit la rime. Et même si la rue est son quotidien, la mendicité son gagne-pain, rien jamais rien ne peut l’empêcher de trouver le bon mot, le bon vers, au bon moment. Plus qu’un exercice, c’est une discipline, une façon de vivre…
« C’est ce jeu avec les mots qui me tient debout… C’est cette quête du beau qui m’évite de rester à genoux… ». Alexandrin ne parle pas en alexandrins mais en vers assurément, et ce du matin au soir, quelques soient les circonstances, le contexte et l’orientation du vent. Sans domicile fixe, Alexandrin fait du porte à porte pour proposer sa poésie contre quelques menues monnaies, il arpente ainsi les rues de la ville au hasard des rencontres, en change lorsque plus rien ne l’y retient.
Faire sonner les mots est devenu son obsession et son unique richesse.
« Bonjour mon brave monsieur, j’espère ne point vous déranger sous ces cieux. Je me présente, Alexandrin de Vanneville, poète des campagnes et des villes, arpentant les chemins de terre et de bitume, par le vent et par la pluie, sans me taire et sans amertume, je survis en proposant ma poésie »
Vendre sa poésie, rester libre, sans attaches, sans femme, sans enfants… Alexandrin est seul et heureux de l’être jusqu’au jour où son chemin croise celui de Kevin, un jeune garçon qui a fui son foyer pour cette même envie de liberté. Alexandrin en fait pour un temps son auxiliaire, son « contrat à durée indéterminée en mendicité » comme il l’appelle.
C’est un drôle de personnage que nous ont imaginé Alain Kokor et Pascal Rabaté, oui un drôle de gus que l’on croirait arrivé tout droit d’un autre siècle avec son accoutrement, ses bonnes manières et ses vers. Pourtant, il s’agit bel et bien d’une histoire contemporaine, une ode à la poésie, une invitation à la vie, un album magnifiquement écrit et mis en image par deux auteurs de très grand talent, réunis pour la première fois. Les rimes sont sublimes et drôles, le trait de Kokor comme toujours délicat et presque évanescent se marie à merveille avec l’histoire. Bref, pour ne plus être chagrin, lisez Alexandrin!
Eric Guillaud
Alexandrin ou l’art de faire des vers à pied, de Pascal Rabaté et Alain Kokor. Éditions Futuropolis. 22€