C’est l’été, les doigts de pied en éventail, le cerveau en mode détente et enfin du temps pour lire et éventuellement rattraper le retard. Sur la table de chevet, quelques livres en attente. C’est le moment…
Robinson, c’est le jeune homme qui court sur la couverture, un peu à la manière de Tintin. Sauf que lui ne court pas après les méchants mais après les aventures féminines. Il sort d’ailleurs du lit d’une conquête d’un soir quand il croise deux amoureux sur le pont des Arts affairés à accrocher leur cadenas d’amour. « Vous pouvez me dire ce que ça signifie ? », leur lance-t-il, avant de continuer « y-a-t-il une explication sensée au fait de symboliser votre amour par un cadenas ». Lui aurait volontiers vu un boulet chaîné ou une ceinture de chasteté. Mais pas un cadenas. Et de jeter, rageur, leur appareil photo dans la Seine.
Pas commode le Robinson, Il faut dire que sa journée à mal débuté, viré manu militari par sa fameuse conquête. Et il ne sait pas encore que son ex l’attend au pied de son immeuble pour récupérer ses affaires, que son père va débarquer, mis à la porte lui-aussi par la mère de Robinson, que son neveu Gaspard a mystérieusement disparu, qu’il va passer la nuit prochaine avec MissCampingLaBaule grâce au site pechounkeum.com, qu’il va rencontrer un garçon qui prétend être son fils… Une journée pour le moins chargée imaginée par Jean-Philippe Peyraud, à qui on doit déjà quelques comédies sentimentales sur fond de chroniques sociales – ou l’inverse – telles que Grain de beauté (Treize Etrange, 1999), Première chaleurs (Casterman, 2001) ou encore D’autres larmes (Glénat, 2012).
On y parle d’amour bien sûr, de désamour, d’illusions et de désillusions, d’amitié et de famille, de sentiments d’une façon générale autour d’un personnage légèrement désabusé plongé dans une atmosphère que l’auteur qualifie lui-même d’aigre-douce, une « bédénovela » qui enchaîne les rebondissements « parfois dignes de sitcoms ou du théâtre de boulevard », explique Jean-Philippe Peyraud dans une interview accordée à bdzoom.com.
Avec L’Inversion de la courbe des sentiments, Jean-Philippe Peyraud nous offre une exploration sensible du quotidien, aussi légère qu’essentielle, aussi juste qu’habile, 192 pages de bonheur à partager. Caractères des personnages, dialogues, dessin, narration… un album qui fait mouche.
Eric Guillaud
L’inversion de la courbe des sentiments, de Jean-Philippe Peyraud. Editions Futuropolis. 26 €