Eden Hôtel n’est pas la première bande dessinée sur le Che. Il y a eu le fameux Che publié en 1968 et signé Hector Oesterheld, Alberto Breccia, Enrique Breccia, plus proche de nous, Le Che une icône révolutionnaire de Spain Rodriguez (Hors Collection) ou encore le livre d’Olivier Wozniak, Maryse et Jean-François Charles, Libertad Che Guevara (Casterman). Mais c’est peut-être la première fois que le mythique personnage se trouve plongé dans un récit qui relève à la fois de la réalité historique et de la fiction.
Le scénariste argentin Diego Agrimbau est parti d’un lieu et d’un contexte bien réels pour mettre en scène Ernesto Guevara Lynch père et fils. Le contexte, c’est la deuxième guerre mondiale, et le lieu, un hôtel de luxe en Argentine dont les propriétaires allemands ont affiché dès le début de la guerre leur soutien à Hitler, au point de transformer le site en un véritable bunker nazi. Autre fait bien réel, le père du futur Che apparaît comme un membre actif d’Action Argentine, une organisation militante qui enquêtait sur les activités nazies en Amérique du Sud. Et c’est aux portes de l’hôtel que commence la fiction. Ernesto Guevara père et fils n’y ont jamais mis les pieds. « Ils se sont arrêtés devant le portail, ont regardé autour d’eux … », précise Diego Agrimbau dans une interview publiée en fin d’ouvrage, « et sont immédiatement repartis en direction d’Alta Gracia, où ils habitaient alors […] Jamais ils n’ont résidé à l’hôtel. Mais pour moi, c’est là qu’a commencé la fiction, ou plutôt l’uchronie… » Et d’imaginer le père du Che et le futur Che lui-même, alors enfant, infiltrés au coeur de la place forte ennemie avec pour tâche de déjouer les plans d’une éventuelle invasion de l’Amérique latine. Après La Bulle de Bertold et La Grande toile, Diego Agrimbau et le dessinateur Gabriel Ippoliti nous offrent un nouveau récit captivant, bien construit, toujours inscrit dans le plausible, avec un dessin réaliste précis et des couleurs particulièrement soignées. EGuillaud
Ernesto, Eden Hôtel (tome 1), de Gabriel Ippoliti et Diego Agrimbau. Editions Casterman. 13,50 euros