Après une dictature, une révolution et une guerre civile, le Nascencio, petit état d’Amérique latine, est un pays ruiné qui pour s’en sortir a décidé de développer un projet particulièrement ambitieux au sud de son territoire : transformer la jungle en terres arables. Des milliers et des milliers d’hectares qui devraient être à terme dédiés à la culture de variétés de céréales à haut rendement. Et pour relever ce défi, une société japonaise, le groupe Seshimo, et un homme, son président, Yûji Seshimo. Mais à l’occasion d’une visite sur le terrain, le président est kidnappé par des mercenaires qui réclament l’arrêt des travaux. Qui se cache réellement derrière ces hommes ? Et quel est leur véritable but ? C’est au propre frère de Yûji Seshimo, Kenichi, un ancien du Vietnam, devenu détective privé aux Etats Unis, que revient la lourde charge de démêler l’affaire…
Une petite pépite ! Enemigo est ce qu’on peut communément appeler une oeuvre de jeunesse de Jirô Taniguchi, une œuvre prépubliée au Japon dans la revue Play comic entre décembre 1984 et avril 1985. Même si l’auteur avait déjà une quinzaine d’ouvrages à son actif au Japon, il faut attendre les années 90 et la publication en France de L’homme qui marche (1995) ou du Journal de mon père (1999) pour véritablement découvrir l’homme et son travail. Un travail d’ailleurs fondamentalement différent de cet album Enemigo qui s’inscrit sans ambivalence dans le genre « aventure » avec beaucoup d’action, de violence, un peu de sexe aussi et une certaine dimension politique. Nous sommes bien loin ici des récits intimistes de celui qui est aujourd’hui devenu une figure, une star même de la bande dessinée internationale. Malgré tout, Enemigo laisse déjà entrevoir un talent immense et des inspirations américaines (cinéma) et européennes (bande dessinée) comme le soulignent Baru, François Schuitten et Vittorio Giardino en postface. EGuillaud