Blan et Galou… Galou et Blan… Derrière ces pseudos dignes de héros de dessin animé se cachent deux jeunes auteurs de BD bien décidés à croquer la vie et partager avec nous un humour décalé et corrosif. Ils viennent de publier Sois gentil, tais-toi et dors aux éditions Blandine Lacour. Rencontre…
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Quel a été votre premier coup de cœur BD ?
Galou. Mon premier coup de cœur remonte aux années 80. Je suis tombé sur une BD d’Hislaire, Bidouille et Violette : une histoire d’amour impossible entre deux adolescents séparés par deux mondes. C’était à la fois drôle, ténébreux, tragique et d’un romantisme digne de Roméo et Juliette. J’ai découvert à cette occasion qu’il n’y avait pas que les romans qui pouvaient nous emporter et que bien des sensations pouvaient être ressenties à la lecture d’une BD. Mon second coup de cœur, le coup fatal, c’est Bill Watterson avec son Calvin et Hobbes. Alors là, je dois dire que son travail m’a mis K.O. Encore aujourd’hui, je prends plaisir à étudier ses planches et je ne me lasse jamais devant autant de sommets d’inventivité.
Blan. Trois auteurs m’ont donné du plaisir et l’envie d’en donner aussi, à travers des mini-histoires tout en finesse : Scott Adams, Andy Riley et Martin Vidberg. Dilbert, Bunny et les patates me font sourire et réfléchir. J’aime quand le texte et le dessin visent juste, quand ils sont efficaces et sans chichi. J’ai aussi redécouvert Sempé tardivement, je n’avais pas saisi toute la subtilité de certaines scènes plus jeune.
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Quelle a été son influence sur votre travail, sur votre démarche ?
Galou. Sans doute le noir et blanc que Watterson utilise à la perfection. J’ai beaucoup de mal à traiter un dessin avec de la couleur, je trouve que l’on perd en authenticité. J’aime ce côté un peu brut, un peu brouillon que le noir et blanc apporte et que la couleur a tendance à dissimuler.
Blan. Celui qui m’a décidé à faire de la BD, c’est Galou ! Il s’amusait à croquer sa vie et ses amis, c’est comme ça qu’est née La p’tite Blan. J’ai trouvé ça drôle et touchant, et je me suis dit que ce serait génial de pouvoir raconter l’histoire que j’aurais aimé pouvoir lire plus jeune à la place de Tom-Tom et Nana : une BD dont le personnage principal n’est pas forcément hétérosexuel, une BD légèrement déviante, une BD pour dire ce que je n’avais pas osé dire tout ce temps !
Comment qualifiez-vous votre style ?
Galou. Avant de rencontrer Blan, l’idée de devenir dessinateur ne m’avait jamais effleuré l’esprit. Je dessinais des petits personnages pour les coller dans la rue, principalement des mains que je faisais sortir des bouches d’égouts, des distributeurs ou des toilettes publiques, mais je n’avais jamais pensé à faire de la BD. Je n’ai fait aucune école, mais je me suis lancé, je me suis fait la main sur Coming Soon, Naissance d’une déviante (notre premier tome) et depuis je dessine tous les jours des heures pour faire évoluer mon style ! Dans un premier temps, le trait était plutôt minimaliste, je ne m’encombrais pas de détails, j’allais à l’essentiel. Peu à peu, mon dessin a évolué : toujours épuré, avec un esprit « premier jet », mais avec plus de détails. J’apprends en regardant ce que font les autres et en faisant vivre mes personnages. J’essaie de ne pas m’enfermer dans une case/un style, mais de faire au mieux avec ce que je sais faire !
Blan. Humoristique et engagé, caustique et percutant. En tout cas c’est comme ça que j’aimerais qu’on le perçoive. Pour moi le top du style, c’est Desproges, si un jour quelqu’un trouve qu’on s’en approche, même de loin, ce sera la grande classe !
Quel a été l’élément déclencheur pour votre dernier album et le but recherché ?
Galou. Après avoir sorti les trois tomes de La p’tite Blan, nous avions envie de travailler sur quelque chose de différent et l’idée de Sois gentil, tais-toi et dors s’est naturellement imposée. Nous trouvions cela marrant de mettre en situation deux personnages qui partagent le même lit, mais pas toujours les mêmes envies ! L’idée était de dire tout fort ce que les hommes n’entendent même pas à voix basse : arrêtez de faire vos gros lourds, si votre femme ne veut pas faire l’amour avec vous, ce n’est pas à cause des migraines ou des règles, c’est seulement parce qu’elle n’a pas envie de vous là, maintenant. Et à en juger par l’accueil que Sois gentil, tais-toi et dors a reçu lors du Festival de BD d’Angoulême, il semble que beaucoup de femmes se soient reconnues sous le regard gêné de leur mari. Je me souviens en particulier de cette femme qui a tenté de convaincre sa belle-fille de ne pas l’acheter en lui disant que « cela pourrait porter à confusion » si elle l’offrait à son mari. Elle l’a pris quand même..
Blan. L’idée, c’est toujours de faire sourire mais à contre-pied de ce qu’on a l’habitude de trouver en rayons. Les BD dans lesquelles les femmes s’en prennent plein la poire pullulent, alors dans Sois gentil, tais-toi et dors on voulait remettre les choses et les hommes à leur place. Le lit est certainement l’endroit idéal pour ça…
Quels sont vos projets ?
Galou. Dans un premier temps nous allons travailler sur la suite des péripéties de La p’tite Blan avec un tome 4 dans la lignée des trois précédents. En parallèle, j’aimerais sortir une BD un peu plus personnelle sur mon expérience de quarantenaire pré-pubère, célibataire, immature et au chômage. D’ailleurs, à ce propos, si quelqu’un a quelque chose à me proposer (femme, homme, travail ou les trois), je suis preneur !
Blan. J’ai hâte de sortir un nouvel opus de La p’tite Blan et de publier la première BD 100% Galou. Dans le même temps, on continue de travailler beaucoup sur nos dessins d’actualités (www.laptiteblan.fr) car ça nous semble essentiel par les temps qui courent de réagir et de faire réfléchir… On travaille aussi pour des entreprises, c’est moins essentiel mais c’est amusant et ça permet de se remplir l’estomac !
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Interview réalisée par mail le 7 février 2012 – Eric Guillaud