La Fille, c’est une grande brindille aux cheveux rouges. Sa moto, c’est une anglaise des années 60, pétaradante et rutilante. Un bolide à son image. L’homme qu’elle a dans la peau est un cowboy minuscule, mais un vrai, avec Stetson, santiags et belles moustaches. Ce livre-disque est dessiné et mis en musique par un attelage inhabituel : l’auteur à succès de B.D, Christophe Blain (Quai d’Orsay, Isaac, Gus) et une chanteuse à la voix envoutante, Barbara Carlotti (L’amour, l’argent, le vent). Le résultat : un conte érotique à réserver aux oreilles et aux regards avertis, pour un plaisir inédit entre Comics et Pop Music.
Un jour que la Fille chevauche sa moto dans la Sierra Nevada, elle rencontre une horde de motardes, dont le sport favori est de casser du cow-boy. Christophe Blain, qui nous avait réjoui avec Quai d’Orsay et Gus, un autre cowboy, rend ici un hommage revendiqué à l’illustrateur belge Guy Pellaert. Pravda la Survireuse, est aussi une motocycliste, une icône sexy des sixties & seventies, de laquelle l’héroïne de Blain pourrait bien être la fille.
« Pour écrire ce conte, je suis parti d’une histoire de huit pages que j’avais faite pour le magazine Pilote, en hommage à Pravda la Survireuse de Guy Peellaert et Pascal Thomas. L’hommage s’est transformé en un récit plus personnel. J’ai travaillé et retravaillé, attentif aux remarques de Barbara, qui pointait sans concession les passages qui ne fonctionnaient pas, ou qui m’encourageait lorsque je trouvais une bonne direction. »
Barbara, c’est Barbara Carlotti, la chanteuse à la voix grave, une voix différente dans la chanson française, récompensée par le prestigieux Grand Prix du disque de l’Académie Charles Cros pour son dernier album en 2012 : L’amour, l’argent, le vent.
« Nous avons construit le conte en flux tendu, j’apportais le texte, Barbara m’enregistrait en train de le lire à haute voix, puis elle réenregistrait le texte. Elle commençait à y ajouter les chansons, je lui montrais des planches, ça lui donnait de nouvelles idées de musique. Je lui ai infligé des heures d’écoute de bruits de motos, Barbara a mis l’histoire en son, elle a réuni, enregistré la plupart des bruitages. Nous voulions une vraie bande-son de film. »
Avec la reprise de Hey Cowboy de Lee Hazlewood et celle de Blanche Neige de Brigitte Fontaine, la playlist qui accompagne le récit multiplient des références très larges. Et impossible de ne pas penser à l’univers de Russ Meyer et son célèbre Faster, Pussycat ! Kill ! Kill, dans le mâle imaginaire.
Des influences revendiquées par Barbara Carlotti : « Au final, c’est un mélange hybride qui nous ressemble et qui doit d’une certaine manière être notre interprétation de l’histoire. Ce qui fait l’homogénéité, c’est qu’on a finalement utilisé beaucoup de synthétiseurs, tout en gardant un côté acoustique, et que nous avons voulu y mettre de l’énergie et du sexe, car il ne faut pas oublier que c’est un conte érotique. »
Dans ce conte érotique, le cowboy ne mesure que quelques centimètres. Il grandit au fur et à mesure qu’il fait l’amour avec La Fille. Sur la moto avec elle, il est à la meilleure place qui soit, lové dans la boucle de sa ceinture, les yeux grands ouverts face à l’immensité de l’ouest américain, du désert californien. Une des passions d’enfance de Christophe Blain, qui se vivait tour à tour comme un outlaw, un cowboy, un shérif. C’est ce goût pour l’Ouest fantasmé, qui a donné naissance à sa belle série Gus et aujourd’hui à ce livre-disque.
« C’est une autre de mes passions enfantines. J’adore qu’on me raconte des histoires. Qu’on me les lise. D’ailleurs, c’est un des sujets de ce conte. Le Cow-boy, le personnage principal masculin, fait lire un livre à la Fille, le personnage principal féminin. Les acteurs jouent presque comme les doubleurs d’un film américain des années 60. Si on vous fait écouter, en blind test, la bande-son doublée en français d’un film hollywoodien, même si les dialogues sont banals, qu’ils ne disent rien de l’action, ni du lieu, vous savez immédiatement que vous êtes en Amérique, qu’il s’agit bien d’un film, et vous pourrez vite dire s’il a été tourné dans les années 50, 60, 70 ou 80. Vous sentez le souffle de l’aventure, vous êtes dans une Amérique rêvée, fantasmée, fausse et vraie, plus grande qu’elle-même. C’est un paradis perdu. »
Au final, cet objet peut se dévorer de trois façons :
– classique, celle que je préfère, le livre seul
– le livre plus le CD comme un enfant qui attend la petite clochette pour tourner la page suivante de l’album, un peu trop lourd et redondant à mon goût
– sur la route, le CD seul comme une histoire avec de vrais chansons à l’intérieur
Pour se faire une idée de la BO et de l’album :
Pour en savoir plus sur : Christophe Blain Barbara Carlotti
Pour lire les premières planches : Gallimard
Le point de vue le presse spécialisée : Culturebox Du9 Motomag