04 Sep

Prix de l’audace à Angoulême en 2012 pour Teddy Beat, Morgan Navarro revient avec L’endormeur

Merlin n’en peut plus ! Il rêve d’être seul, seul au milieu d’une plage immense, de s’allonger et de dormir, dormir, dormir… Et c’est compréhensible. Cela fait trois semaines qu’il n’a pas fermé les yeux plus de deux heures de suite. Son fils, Samo, refuse de faire ses nuits. Il hurle en permanence et transforme les nuits du père en cauchemar. A bout, Merlin décide de faire appel à l’Endormeur, un être très étrange mais qui se déplace gratuitement le soir pour endormir les bébés et le matin pour les réveiller. Oui mais voilà, si l’Endormeur a finalement bien endormi Samo, il ne pourra décemment plus le réveiller. L’Endormeur a été assassiné ! Désemparé, Merlin va devoir trouver une solution…

Auteur de quelques albums dans le milieu des éditeurs indépendants, parmi lesquels Malcom Foot, Flipper le flippé ou encore Teddy Beat (Prix de l’audace au festival d’Angoulême 2012), Morgan Navarro nous offre ici un récit totalement surréaliste et drôle avec des personnages plus extravagants les uns que les autres et des situations pour le moins cocasses. Un album conseillé pour tous les parents qui auraient quelques soucis avec leur progéniture, histoire de prendre un peu de recul ! EGuillaud

Château rose, L’Endormeur (tome 1), de Morgan Navarro. Editions Delcourt. 14,95 euros

.

L’info en +

Découvrez le blog de Morgan Navarro ici-même !

03 Sep

Les Petits hommes, La Patrouille des castors, Jerry Spring… la rentrée se dessine en intégrale

Finies les vacances, les légendes du journal Spirou reprennent du service pour une nouvelle saison d’intégrales. Et ce mois-ci, ce sont Jerry Spring, La Patrouille des Castors et Les Petits hommes qui s’y collent. Trois volumes, une bonne douzaine de récits, des pages et des pages d’aventures…

Et pour commencer, honneur au plus ancien d’entre eux, le cowboy Jerry Spring. Apparu dans les pages du journal Spirou au milieu des années 50, Jerry Spring s’impose très vite comme un personnage incontournable de la légende du Far West. Ses récits influenceront quantité d’auteurs, de Jean Giraud à Hermann, en passant par Derib. Dans ce cinquième et dernier volume de l’intégrale sont réunis cinq aventures, et non des moindres, publiées entre 1966 et 1977 : Jerry contre KKK, Le Duel, L’Or de personne, La Fille du canyon et Le Grand calumet. Un cahier documentaire replace chacun de ces récits dans le contexte de l’époque, un contexte marqué par la fin d’un modèle, celui du gentil héros, propre et poli, face au méchant, sale et grossier. Les anti-héros prennent le pouvoir et modifient profondément et durablement le paysage culturel européen. De son côté, Jerry Spring vit ses dernières heures. Son créateur, Jijé, décède en 1980. Il faudra attendre les années 90 pour que notre cowboy remonte à cheval pour une ultime chevauchée sous la plume de Festin et le pinceau de Franz…

La Patrouille des castors fait son apparition dans le journal Spirou quelques mois seulement après Jerry Spring. Nous sommes en novembre 1954 et le scoutisme a encore de belles heures devant lui. La série emmenée par MiTacq au dessin et Jean-Michel Charlier au scénario passera d’ailleurs le cap des quarante ans de longévité et disparaîtra avec la mort de son créateur MiTacq. Ce troisième volume de l’intégrale réunit quatre récits, Le Traite sans visage, Le Signe indien, Les Loups écarlates, Menace en Camargue, et un cahier graphique avec nombre d’illustrations inédites, de croquis, de photographies…

Petits par la taille mais grands par la notoriété, les habitants de Ravejols, village touché par la chute d’une mystérieuse météorite, reviennent pour trois nouvelles aventures, initialement publiées entre 1976 et 1978 dans le journal Spirou. Il s’agit de Les Ronces du Samouraï, Le triangle du diable et Le Peuple des abysses. Très proche graphiquement de Franquin, le dessinateur Seron devient à cette époque un pilier « discret » de la rédaction du journal Spirou et Les Petits hommes une des séries phares. Preuve en est ce mini récit également publié dans les pages de cette intégrale mettant en scène une rencontre au sommet entre les Petits hommes et les fameux Schtroumpfs de Peyo. Toute une époque ! EGuillaud

.

Dans le détail :

Jerry Spring (Intégrale 5), de Jijé, Lob et Philip. 24 euros

La Patrouilles de Castors (Intégrale 3), de MiTacq et Charlier. 28 euros.

Les Petits hommes (Intégrale 4), de Seron, Mitteï et Desberg. 24 euros

01 Sep

Le Croiseur fantôme de Devig ou le retour de la ligne claire…

S’il avait su, le père Mils serait resté tranquillement dans sa paroisse à s’occuper avec Mademoiselle Woolton de la prochaine tombola, de la décoration de la salle et dans le même temps de la rédemption de ses ouailles. Mais il était impossible pour lui de refuser de tendre la main à cet homme venu le voir, totalement désemparé par la maladie de son fils. Une maladie étrange, très étrange, qui laissait le corps médical médusé. Le père Mils, intrigué, se lance alors dans une longue et dangereuse enquête…

Après Alerte sur Fangataufa et Menace sur Apollo, deux albums réalisés en équipe avec Philippe Geluck (oui oui le Geluck du Chat!), Devig se lance en solo signant Le Croiseur fantôme, histoire qui nous transporte aux coeur de l’Amérique des années 50 pour une histoire inspirée de faits réels et des travaux de l’ingénieur Nikola Tesla sur le rayon de la mort. Au delà du scénario plutôt bien construit, Devig confirme avec cet album son attachement à la ligne claire, école belge initiée par des gens comme Hergé ou Jacobs et mise à jour un peu plus tard par Floc’h, Swarte ou encore Chaland. Un dessin élégant, une atmosphère rétro, un récit captivant ! EGuillaud

Le Croiseur fantôme, de Devig. Editions Casterman. 12,95 euros

.

L’info en +

Pour en savoir plus, voici deux liens, celui du blog de l’auteur Devig, et celui de la page wikipedia consacrée à l’ingénieur Nikola Tesla

29 Août

Chère Patagonie, le nouvel album de Jorge González aux éditions Dupuis

« Un ovni ! Ou un miracle ! Comme vous voulez. » C’est par ces termes que débutait ma chronique de Bandonéon, l’album précédent de Jorge González.  C’est par ces mêmes termes que j’ai envie de commencer celle-ci tant Chère Patagonie nous interpelle d’entrée par son volume, 280 pages, par sa couverture, ténébreuse, presque inquiétante, par son graphisme général, ses couleurs, sa narration et son histoire. L’histoire justement. Jorge González, Argentin d’origine, établi à Barcelone depuis plus de 15 ans, raconte à travers des bribes de vie l’histoire de son pays, l’Argentine donc, mais aussi de la Patagonie, territoire le plus austral de la planète situé à cheval sur l’Argentine et le Chili. Des références historiques jalonnent le récit depuis le XIXe siècle jusqu’à nos jours mais, pas d’inquiétude, de judicieuses précisions historiques sont apportées en fin d’ouvrage, de même qu’un glossaire nous éclaire sur les termes inconnus de ce côté-ci de la planète. Si les premières pages peuvent paraître rudes, voire hermétiques, n’hésitez pas à vous laisser porter, la suite déboulonne tout ça et happe le lecteur jusqu’à la fin dans un tourbillon de destins et d’aventures depuis les terres sauvages de Patagonie jusqu’aux rues grouillantes de Buenos Aires…

__________________________________________

Découvrez l’interview de l’auteur ici

__________________________________________

Visuellement, comme dans Bandonéon, Jorge González nous invite à vivre une véritable expérience graphique et narrative, passant d’illustrations pleine page, tantôt proches de l’esquisse, tantôt très picturales, à des planches fractionnées par plusieurs dizaines de cases, pour ne pas dire des centaines, entrainant l’œil d’une scène à l’autre sans rupture. Impressionnant ! Jorge González ne fait pas de la BD pour faire de la BD, il explore, teste, invente, réinvente, pousse les cases ou au contraire fractionne la page à l’extrême au point de la recouvrir totalement, pose enfin un visage ou un cheval d’un coup de crayon, plante un décor de pastel et d’aquarelle à la Turner tendance Rothko. Le trait est sec, vif, nerveux, les ambiances, énigmatiques, hantées. Hantées peut-être par tous ces êtres que l’on y croise, des Indiens, des colons, des boutiquiers et même un réalisateur de cinéma allemand… Sans hésitation, Chère Patagonie est à classer parmi les albums indispensables de l’année 2012 ! EGuillaud

Chère Patagonie. Editions Dupuis. 26 euros

Ch.

L’info en +

Le graphisme de Jorge González vous interpelle ? Alors, je ne peux que vous conseiller de visiter son site  ici-même sur lequel il a tenu un making-of tout au long de la réalisation de l’album.

25 Août

N’embrassez pas qui vous voulez, de Sandrine Revel et Marzena Sowa. Editions Dupuis. 20,50 euros.

Quoi de plus banal qu’un jeune garçon tentant de voler un baiser à son amoureuse dans la pénombre d’une salle de cinéma ? Rien. Sauf que dans le cas qui nous préoccupe ici, l’affaire se déroule pendant la projection d’un film à la gloire de Staline, qu’elle va provoquer un cri de surprise chez la jeune fille et perturber l’attention générale. Il n’en faudra pas plus pour exciter les petits caporaux locaux de l’immense Union soviétique. Suspension de séance, convocation immédiate de l’enfant incriminé dans le bureau du directeur de l’école, interrogatoire musclé sur son comportement et, pendant qu’on y est, sur le comportement de son père, écrivain, poète, et donc forcément suspect au regard du régime. Ce qui aurait pu prêter à sourire vire au drame…

Non, la morale de l’histoire n’est pas de renoncer à embrasser les filles sous peine de finir au goulag. Sandrine Revel et Marzena Sowa, connue pour sa magnifique série autobiographique Marzi, histoire d’une jeunesse dans la Pologne communiste des années 80, dressent ici le portrait sans concession d’une société malade, paranoïaque, rongée de l’intérieur, prête à tout pour ne pas avoir à se regarder en face et à se remettre en question…  En un peu plus de 90 planches, d’une grande beauté, N’embrassez pas qui vous voulez parle avec force et poésie de résistance intérieure, d’amour, d’amitié, de liberté, d’espoir aussi face à l’adversité. Et c’est beau, franchement beau ! EGuillaud

L’info en +

Un cahier documentaire complète ce très bel album avec nombre de croquis, storyboards, recherches graphiques, découpages, photographies et un texte dans lequel Marzena Sowa revient sur son dernier voyage en Pologne, un voyage effectué avec la dessinatrice Sandrine Revel pour d’ultimes repérages.

20 Août

Les survivants de Nankin, IR$ (tome 14), de Desberg et Vrancken. Editions Le Lombard. 12 euros.

Dix. C’est le nombre exact de jours dont dispose Larry B. Max pour retrouver le trésor de la triade lanfu disparu au lendemain de la Seconde guerre mondiale à Manille. Et l’unique information dont dispose notre agent spécial de l‘Internal Revenue Service est que ce trésor a été fondu à l’époque en trois statues. Des statues de plus de 10 mètres de hauteur, aujourd’hui encore cachées quelque part. Pour Larry B. Max, la tâche s’annonce cette fois particulièrement difficile…

Lancée à la fin des années 90, la série de Stephen Desberg et de Bernard Vrancken connaît un succès international grâce à un savant dosage d’action et d’intrigue politico-fiancière. Un bon scénario mais aussi une belle réalisation visuelle grâce au dessin réaliste de Bernard Vrancken qui allie classicisme et innovation. Ce quatorzième album clôt le diptyque asiatique commencé avec L’or de Yamashita. Si vous aimez Largo Winch, alors vous devriez aimer IR$ ! EGuillaud

18 Août

Dakota (tome 1), de Jean Dufaux et Philippe Adamov. Editions Glénat. 13,90 euros.

Gordon Ox vit dans un monde parfait, un monde sans heurts, qui possède les meilleurs sportifs, les meilleurs artistes, la meilleure sécurité sociale, le meilleur système scolaire, les plus grands hommes politiques, les plus belles femmes, la plus redoutable armée… et on pourrait en rajouter ainsi des lignes et des lignes. Oui mais voilà, Gordon Ox, même s’il vit effectivement dans ce monde là, n’en fait pas pour autant partie. C’est un « collapse », un exclu qui n’a même pas le droit de profiter du meilleur restaurant du pays et de son fameux risotto, son pêché mignon. Ce monde parfait appartient aux super-héros et à eux seuls. Des hommes parfaits pour un monde parfait ! Aussi, lorsque Gordon Ox tente de s’imposer malgré tout, c’est pour lui le début des pires ennuis…

Jean Dufaux au scénario et Philippe Adamov au dessin, un tandem de choc pour cette nouvelle série de science fiction lancée en juin chez Glénat. On y retrouve la griffe des auteurs, un scénario blindé, une mise en scène efficace et dynamique, des décors somptueux, des personnages de caractère, un trait précis, léger, délicat. En somme, une BD parfaite ! EGuillaud

16 Août

Vie de dingue, Charlotte célibataire avec enfants, de Arianna Rea, Delphine, Cat et Jim. Editions Vents d’ouest. 11,50 euros.

Une vie de dingue ! A 40 ans, Charlotte, fraîchement divorcée, doit chercher un appart, déménager, gérer ses trois filles, faire les courses, le ménage, préparer les repas, assurer la maintenance… mais aussi penser à refaire sa vie, oublier son mari trompeur, s’inscrire sur Mitic, partager des soirées avec d’hypothétiques futurs amoureux et pour finir trouver du temps pour les copines… Une vie de dingue je vous disais !
Publié en mai dernier, ce premier volet de Charlotte célibataire avec enfants nous offre une vision réaliste, très réaliste et bien sentie, mais aussi pleine d’humour et de légèreté de la vie d’une femme célibataire avec enfants en une série de gags en une planche. Après la vie des trentenaires parisiens branchés, la vie des trentenaires jeunes parents et la vie des trentenaires qui se posent mille questions, voici donc la vie d’une maman ordinaire ou presque de 40 ans qui n’a pour sa part plus le temps de se poser des questions… Ca change ! Un livre idéal en cette période estivale. EGuillaud