27 Nov

Sivens : « bye, bye » l’argent européen

L’Europe fait barrage. Bruxelles se penche sur le projet de Sivens. Le dossier est désormais entre les mains de la Commission. Le respect d’une directive « eau » est sur la sellette. La ministre de l’Ecologie, Ségolène Royal, réaffirme la nécessité d’un ouvrage dans la vallée du Tescou. Mais l’intervention des instances communautaires bloque les fonds européens. Début de la fin ? Péripétie temporaire ? Gérard Onesta exprime son point de vue. Un point de vue « partial ». L’élu régional est écologiste. Hostile au projet. Mais son point de vue est loin d’être « partiel ». L’actuel vice-président à la Région a été pendant des années le vice-président du Parlement Européen. Gérard Onesta connaît bien les arcanes Bruxelloises.

 

Gérard Onesta- vice-président EELV de la Région

Gérard Onesta- vice-président EELV de la Région

-Midi-Pyrénées Politiques : D’après vous, qu’est-ce qui explique l’intervention de la Commission ?

Gérard Onesta : « Hommage au Collectif (du Testet). Hommage à ceux qui ont tenu bon. Si le Collectif n’avait pas défendu mètre par mètre le site de Sivens et, si malheureusement, un gamin n’avait pas perdu la vie, la Commission ne serait pas intervenu avant 2 ou 3 ans. Je connais le fonctionnement de la Commission. C’est parce que l’on parlé de Sivens dans les médias que Bruxelles a bougé ».

-Midi-Pyrénées Politiques : Pas de lobbying des Verts auprès de la Commission ?

Gérard Onesta : « Il y a eu des relais via le Parlement Européen, nos élus régionaux et nationaux. Mais la cause principale de l’intervention de la Commission c’est la médiatisation. Les commissaires ont entendu parlé de Sivens. Ils se sont saisis du dossier ».

-Midi-Pyrénées Politiques : Une procédure est ouverte. Mais, d’après vous, le « verdict » va tomber dans combien de temps ?

Gérard Onesta : « Ce n’est que mon pif politique. Mais je me dis que s’ils se sont saisis relativement rapidement du dossier ce n’est pas pour trancher dans quelques années. Mais plutôt dans quelques mois. Encore une fois, c’est une simple intuition ».

-Midi-Pyrénées Politiques : L’intervention de la Commission marque un coup d’arrêt au projet ?

Gérard Onesta : «  L’ouverture d’une procédure d’infraction c’est « bye, bye » l’argent européen. La perte du financement européen c’est un coup dur et peut être même fatal au projet. C’est un quart du budget qui disparaît. Je suis catégorique. Pour les deux millions européens c’est cuit. Ils ne les auront pas (les conseillers généraux du Tarn, maitres d’œuvre du projet). Il n’y a plus de carotte européenne. Et, en plus, c’est un coup de bâton avec un risque de condamnation de la France ».

-Midi-Pyrénées Politiques : L’entrée en scène de la Commission va-t-elle influencer la position de Ségolène Royal ?

Gérard Onesta : « Ségolène Royal a désormais une porte de sortie supplémentaire. Elle sait que la responsabilité de l’Etat français peut être recherchée. Cela peut déboucher sur des pénalités financières. Elle va tout faire pour s’en prémunir. De plus la Commission vise la directive sur l’eau. Je n’imagine pas une seule seconde qu’elle n’en tire pas toutes les conséquences ».

Propos recueillis par Laurent Dubois

18 Nov

Départements : le changement c’est maintenant?

Après Augustin Bonrepaux en Ariège, Pierre Izard s’apprête à passer la main en Haute-Garonne. Et après lui d’autres ? Les élections de mars prochain promettent donc de faire émerger de nouveaux présidents dans un contexte très agité pour les départements.

 

Pierre Izard ne briguera pas un nouveau mandat pour la présidence du Conseil général de Haute-Garonne.

Pierre Izard ne briguera pas un nouveau mandat pour la présidence du Conseil Général de Haute-Garonne.

Rien d’officiel mais une certitude administrative : Pierre Izard n’a pas déposé sa candidature paritaire avant-hier soir minuit comme le processus de désignation interne l’impose. Le PS 31 a donc pris acte de la décision du président du Conseil Général de Haute-Garonne de ne pas se représenter.

 Une page qui se tourne

« Une page de l’histoire de la gauche en Haute-Garonne qui se tourne » dit le Premier Fédéral. On peut même parler d’un chapitre voire d’un tome tant la présidence Izard fut longue. Conseiller général depuis 1967, il avait pris la direction du département en 1988. Alors qui pour lui succéder ? Trop tôt pour le dire. Des prétendants sont en lice mais à l’heure actuelle c’est un peu pour eux la devise du « premier qui bouge a perdu ». Pas un mot donc des Jean-Michel Fabre, Georges Méric ou encore Jean-Jacques Mirassou. Chacun sait ce que parler aujourd’hui peut lui coûter…

 

Ne pas se dévoiler trop tôt, c’est en ce moment la règle d’or des socialistes. La campagne sera rude. Le parti de gouvernement mise sur un rajeunissement des têtes d’affiche et sur un renouvellement des candidats. Exemple en Haute-Garonne seuls 21 des 39 sortants se représenteront. Mais est-ce que cela suffira à donner le change face à un gouvernement et une politique de plus en plus impopulaires ?

 Quels enjeux ?

Rappelons tout de même que les départements de gauche de notre région (tous hormis l’Aveyron) possèdent de solides majorités, parfois même écrasantes comme en Ariège. Deux d’entre eux sont détenus par le PRG, Hautes-Pyrénées et Tarn et Garonne. Dans ce dernier, Jean-Michel Baylet, battu aux Sénatoriales (donc par la volonté des grands électeurs), devra mener une campagne des plus stratégiques.

 

Le patron des Radicaux De Gauche se targue d’avoir été celui qui a sauvé les départements ruraux lors des négociations de son parti avec le gouvernement. Un trophée à son tableau de chasse qui pourrait lui permettre de récupérer  pour le prochain scrutin les soutiens qui lui ont fait défaut aux Sénatoriales.

 

A gauche, les défections sont donc désormais actées, reste maintenant à connaître quelles seront les forces en présence pour les élections départementales des 22 et 29 mars prochains. Du côté de la droite, l’espoir de conquérir de nouveaux sièges est largement avoué, celui de viser la conquête d’un département reste plus ténu.

 

Patrick Noviello

13 Nov

Qui est Ben Lefetey, le leader des anti-barrage de Sivens ?

Tête de Turc des pro-barrages. Porte-drapeau des anti-Sivens. Ben Lefetey attire les micros et attise les rancœurs. L’ancien pâtissier, fils de paysan normand, est l’interlocuteur incontournable des médias. Il incarne la lutte contre le projet de Sivens. Pour certains, c’est un agitateur professionnel. Un activiste qui souffle sur les braises. Pour d’autres, c’est un militant connaissant son dossier et le monde agricole. Un interlocuteur constructif. Ben Lefetey accepte de lever le voile sur son parcours, ses intentions. Au delà des questions sur sa personnalité, le militant Europe-Ecologie avance des propositions alternatives pour une sortie de crise.

Ben Lefetey © MaxPPP

Ben Lefetey © MaxPPP

Midi-Pyrénées Politiques : Comment vous êtes vous retrouver au cœur de la lutte contre le barrage de Sivens ?

Ben Lefetey. Je suis arrivé dans le Tarn, il y a deux ans. Après un séjour de huit ans et demi en Asie ou je me suis occupé de tourisme équitable. Avec ma famille, nous avons décidé de rentrer en France et nous avons choisi le Tarn parce que des amis habitent à côté de Rabastens. En plus, on souhaitait être proche d’une grande ville, Toulouse, sans être à Toulouse. Gaillac était un bon choix. Je ne connaissais pas Sivens. Un jour, j’ai trouvé un tract sur le pare-brise de ma voiture. J’ai travaillé 13 ans dans des ONG nationales. Notamment à Greenpeace France. J’avais donc une sensibilité. Je ne pouvais pas rester indifférent. Je me suis dit : on continue les projets agricoles dépassés.

Midi-Pyrénées Politiques : Avez vous un passé politique ? Notamment du côté de l’extrême gauche ?

Ben Lefetey. Non. Je n’ai jamais milité dans un mouvement d’extrême-gauche. Au NPA ou ailleurs. Je n’ai jamais milité dans un parti politique. Sauf depuis l’an dernier ou j’ai adhéré à Europe-Ecologie.

Midi-Pyrénées Politiques : Vous n’avez donc jamais fait le coup de poing dans des manifestations violentes ? Pas de passé d’activiste ?

Ben Lefetey. J’ai été salarié pendant 13 ans de Greenpeace et d’autres ONG dont « Les amis de la Terre ». J’ai été formé à Greenpeace aux actions « coups de poing ». Mais des actions non-violentes et symboliques. J’ai vu et subi la violence des forces de l’ordre. Notamment dans une manifestation en région parisienne avec le DAL (Droit Au Logement). Mais je n’ai jamais basculé dans la violence. « Utiliser la violence pour gagner » n’a jamais été ma théorie. D’ailleurs cette théorie n’a jamais fait la démonstration de sa réussite.

Midi-Pyrénées Politiques : C’est vous qui avez fait venir les Zadistes qui occupent le site de Sivens ?

Ben Lefetey. Non. J’ai même dissuadé en février 2013 des Zadistes de venir.

Midi-Pyrénées Politiques : Avez vous des ambitions politiques ? Vous serez candidat à des élections ?

Ben Lefetey. Avant mon départ pour l’Asie, j’ai passé plus de dix ans dans des ONG qui sont des contre-pouvoirs. On n’obtient pas de changement significatif en tant que contre-pouvoir. J’ai participé à la rédaction d’un livre blanc sur « la politique de développement durable en France » sous le gouvernement Raffarin. Il a fini à la poubelle. Alors oui.

Midi-Pyrénées Politiques : Le dossier de Sivens est devenu un dossier politique. Avec notamment l’intervention de Ségolène Royal. Comment jugez-vous la première réunion qui s’est déroulée au ministère de l’Ecologie ?

Ben Lefetey. Le bilan est très positif. C’est l’instauration d’un dialogue. Nous avons discuté de la méthode. Pas du fond. Tout le monde était forcément d’accord. Lors de la seconde réunion (qui s’est déroulée ce jeudi 13 novembre), nous allons soulevé la question du coût, du financement. Prochainement, nous allons demander que soient associés les 200 agriculteurs de la vallée du Tescou.

Midi-Pyrénées Politiques : Vous parlez de dialogue. Dans le cadre de négociations, êtes vous prêt à faire un geste et à évacuer une partie du site de Sivens ?

Ben Lefetey. C’est aux pouvoirs publics de voir à quelles conditions les Zadistes peuvent partir. Ils doivent prendre contact avec eux. Je l’ai dit à un conseiller de Ségolène Royal. D’ailleurs il faut associer les Zadistes aux réunions avec les autres acteurs du dossier. Les Zadistes sont des lanceurs d’alerte. Ce ne sont pas des voyous, des assistés et des casseurs. Le noyau dur c’est 30 ou 40 personnes. Et contrairement à ce que l’on prétend, elles sont originaires de Midi-Pyrénées. Il y a beaucoup de Tarnais parmi eux. De Gaillac, Castelnau de Montmirail.

Midi Pyrénées Politiques : Quelles sont vos propositions alternatives ?

Ben Lefetey. Il faut trouver de l’eau pour la vallée du Tescou. Il faut regarder la quantité et pour qui. Une fois cette évaluation faite, il faut regarder si il ne faut pas financer des réserves au niveau des fermes.

Midi-Pyrénées Politiques : Et si le création de réserves ne suffit pas ? Un barrage ?

Ben Lefetey. Oui. S’il reste encore des besoins, construire une retenue en amont ou en aval du site actuel. Mais je pense que la création de réserves individuelles suffira. En revanche, il est impossible et impensable de faire des travaux sur le site où est mort Rémi Fraysse. C’est devenu un lieu de sépulture.

Midi-Pyrénées Politiques : Les pro-barrages descendent dans la rue samedi. Une réaction ?

Ben Lefetey. On est complétement dans l’irrationnel. Il s’agit de manifester soi-disant pour défendre la démocratie. Mais ceux qui manifestent veulent imposer par la force un projet retoqué par des experts. Les associations n’ont pas été entendues. Les avis défavorables émis contre le projet ont été méprisés. Le prétendu respect de la démocratie locale invoqué par les manifestants a été bafoué.

Propos recueillis par Laurent Dubois

05 Nov

Sivens : dossier politique

Réunion au Ministère de l'Ecologie, hier soir. AFP PHOTO / ERIC FEFERBERG

Réunion au Ministère de l’Ecologie, hier soir. AFP PHOTO / ERIC FEFERBERG

Comme de l’eau retenue, il stagne…. Ni abandon, ni reprise des travaux, le projet de barrage de Sivens est à l’arrêt. A l’issue de la réunion organisée au Ministère de l’Ecologie par Ségolène Royal, pas de décision définitive donc. A quoi pouvait-on s’attendre d’autre ?

Certains de mes confrères se sont bien agités hier en fin d’après-midi croyant un abandon possible, mais je ne préfère ne voir là que la crainte d’une nouvelle réaction épidermique d’un gouvernement totalement imprévisible.

Non finalement Ségolène Royal aura choisi la retenue (NDR : selon l’expression consacrée, n’y voyez aucun rapport avec sa préférence quant au projet). Et voilà qu’elle promet l’envoi de trois nouveaux experts : hydrologue, agronome et biodiversité. La vallée du Testet aura décidément été examinée sous toutes les coutures.

Et le grand public de se demander : « mais ça avait pas été fait tout ça déjà ? Si si… Ce qui conforte Jacques Valax Conseiller Général du Tarn dans sa position : « si le travail pour lequel j’ai été élu ne sert à rien, je rends mon tablier ! »

Le cœur du débat politique porte sur deux conceptions de la manière de porter des dossiers comme celui de Sivens. D’un côté des élus écologistes et Front de gauche qui demandent à ce que le citoyen soit plus écouté et qui se retournent vers l’Etat pour demander un moratoire.

De l’autre la majorité des élus départementaux qui disent avoir justement suivi la procédure légale imposée par l’Etat pour mener le projet et qui aujourd’hui expliquent que si le citoyen doit être plus entendu, c’est à l’Etat de le décréter. Ce sera tout l’enjeu du débat que nous allons impulser ce samedi 8 novembre dans « La Voix est Libre » dans le cadre de notre polémique de la semaine.

 

Patrick Noviello

04 Nov

Ségolène Royal et Sivens : un simple tour de table

Fin de la réunion. Ségolène Royal vient de présenter à la presse son compte rendu. Pendant plus d’une heure, la ministre de l’Ecologie a reçu les acteurs du dossier Sivens. Les premières réactions sont mitigées. Le ressenti des participants est franchement négatif.

Ségolène Royal. Photo @AFP

Ségolène Royal. Photo @AFP

Du côté d’Europe Ecologie, le bilan est plutôt positif.

Guillaume Cros, président du groupe EELV à la Région estime qu’ « a priori on n’est pas dans une situation bloquée. Ce que l’on pouvait craindre ». Il retient surtout l’hypothèse de la création d’une retenue en amont. L’élu écologie avait plutôt en tête une alternative en aval. Mais il va réfléchir à cette piste.

Au final, Guillaume Cros continue «  à demander l’arrêt du projet ». Néanmoins, il précise immédiatement : « l’intervention de Ségolène Royal permet d’espérer une issue ».

Le point noir concerne l’appel à une évacuation de Sivens. Guillaume Cros est catégorique. La ministre demande la fin de l’occupation du site. L’élu écologiste estime que c’est « totalement irréaliste. Pour déloger les Zadistes, il faut renvoyer les gendarmes ».

Du côté des participants le ressenti est franchement négatif Un des invités salue l’ambiance sereine et la liberté d’expression. Néanmoins, pour lui, cette réunion se résume à un simple tour de table, sans échange. Un autre participant estime même qu’il entendu lors de la conférence de presse de la ministre des choses qu’il n’a pas entendu pendant la réunion.

Pierre Verdier (président de la commission développement durable du Conseil Général du Tarn) est plus modéré. Le conseiller général précise : « il ne faut pas trop attendre d’une première réunion. Nous avons pu exposer la position du conseil général ». Il repart « un peu frustré ».

 

Laurent Dubois

26 Oct

(Exclu) : Sivens, les Experts : poursuite du projet mais des réserves

Préfecture du Tarn. Lundi 27 octobre. Le rapport sur le barrage de Sivens va être présenté demain à 15 heures 30. Il est très attendu. Le 8 septembre dernier, la ministre de l’Ecologie, Ségolène Royale a nommé deux experts pour évaluer le projet. En accord avec le conseil général du Tarn, un ingénieur des eaux et forêts et un inspecteur général de l’environnement sont désignés. Les experts doivent, selon l’expression de Ségolène Royal, « favoriser le dialogue et vérifier les garanties d’une gestion durable de la ressource en eau ».

@AFP

@AFP

Après des semaines d’auditions et d’études, le rapport des experts est arrivé sur le bureau de la ministre. Il n’a pas de caractère public.

Le document aurait pu rester dans les tuyaux gouvernementaux. Ségolène Royal a décidé une formule médiane : pas de conférence de presse ou de publication. Mais une restitution, à huis clos, aux acteurs du dossier.

D’après nos informations, la conclusion du rapport est « favorable » à la poursuite du projet. Les experts estiment qu’il peut continuer. Mais Ils mettent  en avant des raisons pratiques. Les sommes engagées et les travaux déjà réalisés rendent difficile un arrêt.

En revanche, les experts soulèvent des points négatifs :

Le surdimensionnement du projet. Le barrage (une digue de 315 mètres le long et 13 mètres de haut) doit permettre de stocker 1,5 millions de m3 d’eau. Il nécessite le déboisement des 13 hectares de la zone humide du Testet. Au total, ce sont plus de 40 hectares qui sont concernés. Les experts estiment que le volume de stockage (1,5 millions de m3) est 1,5 fois supérieur au besoin réel d’irrigation.

Une surestimation du nombre d’exploitations bénéficiant du barrage. Une guerre des chiffres oppose les pros et les anti-barrages. Pour les uns, le barrage doit permettre l’irrigation de 80 exploitations. Pour d’autres seules 20 exploitations bénéficieraient du barrage. Les experts estiment que le chiffrage du maitre d’ouvrage est surestimé.

Des questions sur le financement. Le projet coute 8,49 millions d’euros. Le budget de fonctionnement s’élève à 300 000 euros par an. L’Agence de l’Eau Adour-Garonne, le conseil général du Tarn, la Région Midi-Pyrénées et des fonds européens doivent financer. Les experts relèvent le fait que le tour de table financier n’est pas bouclé. Ils s’interrogent notamment sur les financements européens (Feader).

Toutes ces observations et la conclusion des experts n’ont pas un caractère « obligatoire ». Le rapport ne clôt pas le dossier. Il fournit uniquement des éléments de décision à Ségolène Royal. Et des arguments aux protagonistes. Le conseil général va évidemment s’appuyer sur la conclusion (le projet peut continuer). Les anti-barrages vont surtout retenir les réserves émises (surdimensionnement, financement non assuré). La bataille de Sivens est loin d’être finie.

Laurent Dubois

 

Correctif : Ce texte a été rédigé et mis en ligne le dimanche 26 octobre à 11 heures. A ce moment, seule une réunion de restitution était prévue. Elle devait se tenir à la Préfecture du Tarn à 15 heures 30. Le déroulement était le suivant : 1 heure de restitution et 1 heure de questions/réponses. L’accès à cette réunion devait se faire uniquement sur invitation. La presse n’était pas invitée. Lundi 27 octobre, vers 9 heures 40, une conférence de presse (14 heures à la Préfecture) a été organisée. La veille, dimanche dans la nuit, le rapport des experts a été mis en ligne sur le site de la Préfecture du Tarn. Cette mise à disposition du public n’était pas initialement prévue. 

 

23 Oct

« L’aménagement du territoire » selon Aurélien Bellanger

C’est au départ une critique de ce livre largement promotionné qui m’a interpellée. Elle disait « le roman que tous les élus locaux devraient avoir lu ! » Elle avait raison sur deux points. Il s’agit bien d’un roman. Et si nos politiques veulent ouvrir les yeux ou faire leur autocritique ces presque cinq-cents pages ne leur seront pas inutiles.

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Tout d’abord soulignons la justesse du propos de l’auteur. A titre d’exemple, si vous voulez comprendre comment la France s’est dessinée de l’Antiquité (voire avant) à nos jours, il suffit de lire les vingt premières pages et déjà, vous mesurerez la qualité des travaux, plus ou moins fictionnels, d’Aurélien Bellanger.

La notion d’équilibre est une notion clé de la géographie, et plus spécialement de la branche exécutive de celle-ci, nommée aménagement du territoire

D’entrée, l’auteur n’est pas tendre avec les technocrates, ceux qui se tiennent éloignés du suffrage universel pour garder toute leur influence : « L’image de l’hexagone permit alors aux haut-fonctionnaires du pays de jouer passionnément à un jeu qui tenait du puzzle, du casse-tête et du kriegspiel, mais qu’ils préféraient appeler aménagement du territoire. »
Exemple chez nous : « Un arc Atlantique fut créé pour revitaliser les deux faces ouest de l’hexagone. On pensa même le relier via un axe qui prenait Toulouse pour pivot, à l’arc méditerranéen »(…) « On désenclava, raccorda, modernisa ; le pont de Normandie et le viaduc de Millau furent vécus comme des assomptions républicaines. »

Airbus et la rationalité économique

Pas tendre non plus, Aurélien Bellanger évoque la norme de l’éclatement sur plusieurs sites européens de grands groupes comme Airbus « désastreuse en termes de pure rationalité économique ». Et puis l’auteur rappelle aussi, sous l’impulsion du Général De Gaulle l’émergence des régions.
Le livre se veut également d’une actualité brûlante à l’heure où l’on s’interroge sur la concession au privé de nos autoroutes et où la cour des comptes s’attaque sans détour à la rentabilité très contestable du TGV en France. « Pendant plus d’un quart de siècle, le rail allait incarner en France le progrès triomphant »(…) « Le TGV était un jouet de technocrate indifférent à l’existence du territoire réel. La carte de la grande vitesse était une carte autonome. »

Le TGV, un jouet

L’ouvrage critique également le partenariat public-privé qui va constituer le montage financier de notre future LGV dont nous débattions, il y a peu, dans « La Voix est Libre ». Tout cela parce que « Toulouse, la ville de l’Airbus, reliée à Paris par plus de 400 vols par semaine, voulait son TGV ».
Bref cet ouvrage, roman certes, au-delà de s’avérer d’instructif, est d’une actualité brûlante. A lire donc dans les plus brefs délais.

« L’aménagement du territoire », Aurélien Bellanger, Gallimard

Patrick Noviello

20 Oct

TLT, retour au tribunal de commerce : le début de la Fin ?!

Info Midi-Pyrénées Politiques – Retour au Tribunal de Commerce. En 2009, les dirigeants de « TLT » présentent un plan de continuation à la juridiction commerciale toulousaine. Le plan est validé. Un échéancier est mis en place. Il s’étale jusqu’en 2017 et doit permettre d’éponger un passif d’environ 5 millions d’euros. Un commissaire aux comptes veille sur l’exécution du plan.

 

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Octobre 2014. Le tribunal de commerce est de nouveau saisi du dossier « TéléToulouse ». Une audience est prévue le 21 novembre à 10 heures 30. Le commissaire à l’exécution du plan peut être « spontanément » à l’origine de cette procédure. En cas de non respect du plan de continuation, il doit saisir la juridiction commerciale. C’est une obligation juridique. Mais des créanciers, face à une accumulation d’impayés, peuvent également être à l’origine de la saisine.

En toute hypothèse, plusieurs sources le disent ouvertement : « TLT » ne paie plus ses créanciers.

Dans l’absolu, juridiquement, le tribunal de commerce peut intervenir pour différentes raisons. Pas uniquement le non remboursement des dettes. Mais, d’après plusieurs sources différentes et concordantes, c’est l’hypothèse d’une cessation de paiement et donc d’un non respect du plan de continuation qui est la bonne.

Le « come back » du tribunal de commerce est grave. il montre que les caisses sont vides et que le plan de continuation est un échec. C’est un vrai tournant.  Peut-être le début de la Fin.

D’après une source proche du dossier, depuis la signature du plan en 2009, environ 3 millions d’euros ont été versés aux créanciers. Il reste sur l’ardoise dans les 2 millions d’euros et les versements sont interrompus.

Cette situation est alarmante. TLT crée de la dette. De nouvelles créances viennent s’ajouter aux anciennes. Un ex collaborateur de TLT se demande d’ailleurs comment les salaires peuvent encore être payés. D’après lui, seul le versement, par la mairie de Toulouse, d’une enveloppe de 400.000 euros durant le second semestre 2014 (conformément à un Contrat d’Objectif et de Moyens signé en juin dernier) a permis de sauver la trésorerie.

Sans possibilité de recapitalisation (pas de nouveaux actionnaires à l’horizon), sans recettes publicitaires et avec des factures qui s’accumulent, la télévision locale toulousaine n’est pas au bord du gouffre. Elle est au fond du trou. Un trou qui s’élargit chaque jour davantage.

Du côté du Capitole, le message est clair. Les obligations ont été respectées. Les sommes qui devaient été versées l’ont été. Mais, ce n’est plus le sujet.

Il va falloir trouver des fonds supplémentaires. L’intervention du tribunal de commerce démontre une évidence : « TéléToulouse » n’a toujours pas trouvé son modèle économique. Les recettes ne compensent pas les dépenses. Le passif s’aggrave et les actifs restent une colonne vide.

La chaine locale est artificiellement maintenue par des fonds publics. Avec des audiences plus que modestes et des charges de fonctionnement totalement disproportionnées ce qui était un luxe devient carrément indécent. Jean-Luc Moudenc annonce des économies. Martin Malvy dénonce les coupes-sombres budgétaires décrétées par Bercy. Dans ce contexte, difficile de justifier les puits sans fond.

Dans les couloirs de TLT, on pointe l’Hôtel de Région. L’argent régional ne serait pas arriver dans les caisses de « TéléToulouse ». Interrogé sur ce point, le Conseil Régional répond. Le solde 2013-2014 va prochainement être versé. Cela représente 50.000 euros. S’agissant du COM 2015, aucune demande n’a été adressée par TLT. Quand elle arrivera le Conseil Régional versera une avance.

Ces versements viendront s’ajouter à l’acompte (450.000 euros) versé en juillet 2012.

Mais, depuis, l’opposition régionale a attaqué en justice le Contrat d’Objectifs et de Moyens signé par la Région Midi-Pyrénées. L’affaire est toujours pendante devant le tribunal administratif de Toulouse. Un nouveau versement peut présenter un risque juridique.

La légalité du COM (prévoyant notamment une « régionalisation » de TLT) est d’ailleurs, d’après un fin connaisseur du dossier, « un cauchemar pour tout le monde ». Si le juge administratif annule le COM, toutes les sommes versées seront, rétroactivement, considérées comme « nulles et non avenues ».  TLT pourrait être contrainte de rembourser des centaines de milliers d’euros !!!

En attendant, les comptes de TLT sont dans le rouge. Le tribunal de commerce va placer les acteurs du dossier face à la dure réalité des chiffres.

Pour TLT, ce sera l’heure de vérité.

Laurent Dubois

15 Oct

Economie : Nobel pour tous !

Quoi un toulousain prix Nobel d’économie ? Si certains sont tombés de l’armoire, d’autres voyaient revenir chaque année, le nom de Jean Tirole dans la short-list. Pour tous il était un chercheur discret et un enseignant fidèle à ses étudiants, mais pour certains aussi le symbole du capitalisme libéral dans une école qui fait venir des professeurs aux gros salaires. Au delà de la polémique, la vraie question qui a surgi est celle-ci : pourquoi un esprit si brillant ne peut-il pas servir à redresser le pays ?

Imposteur ou sauveur 

L’image a bien souvent tendance à l’emporter sur les chiffres ou tous autres indicateurs, nous sommes bien placés pour le savoir, mais essayons de ne pas tomber dans la caricature. Entre la dénonciation d’un ultralibéral voire d’un « imposteur » comme l’a qualifié Médiapart et le chercheur-sauveur qui aurait la réponse à tous les fléaux sociétaux et dont les politiques devraient s’inspirer il y a un juste milieu.
Cela n’a pas empêche Emmanuel Macron d’annoncer la couleur lors de la présentation des grandes lignes de sa future loi en Conseil des Ministres de citer le Nobel : « à force de trop protéger, on ne protège rien ». Jean Tirole se défend à travers plusieurs entretiens accordés à la presse de conseiller les politiques. Lui cherche, enseigne, émet des hypothèses.

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Dans Le Monde de ce jour, il met d’ailleurs en garde : « Le danger est de répondre sur des sujets que l’on n’a pas étudiés soigneusement, ce que ferai sans doute mais que je voudrais éviter autant que possible ». Dans ce même entretien, il reconnait toutefois que son travail a été pris en compte au moins deux fois, par la Commission Européenne, sur les brevets et licences dans le domaine de la propriété intellectuelle, ainsi que sur les cartes de paiement. (Voir édition du Monde de ce jeudi 16 octobre pour les détails)
Pourtant ce qui a fait aussi de ce Nobel d’économie sa notoriété et une forme d’emballement médiatique, ce n’est pas simplement ici son origine toulousaine mais l’actualité de ses travaux. Lors de sa première conférence de presse, Jean Tirole  a effectivement abordé des sujets politiques chauds comme la réforme du marché du travail et de l’assurance chômage mais aussi le budget et la dette publique. (voir nos éditions et notre site web).

Pied-de-nez au french bashing

Et puis nos gouvernants y sont aussi allés de leurs allusions bien senties. Manuel Valls a souligné « un pied-de-nez au french bashing ». François Hollande a évoqué « une fierté pour la France ». Enfin, un Nobel d’économie dans un pays en crise, la presse étrangère s’en est aussi donnée à cœur joie.
Seulement Jean Tirole avait évoqué ses études sur le marché du travail depuis 2003. Il avait même signé aux côtés d’Olivier Blanchard devenu chef économiste au FMI, un rapport pour le Conseil d’analyse économique intitulé « Protection de l’emploi et procédures de licenciement ». Ce rapport a-t-il servi comme on dit vulgairement à caler une armoire ?
Mais d’un autre côté n’est-ce pas là véritablement le rôle du chercheur d’indiquer une piste sans forcément lui donner forme réelle ou réussir à l’imposer. Dire que nos économistes français sont brillants et que notre économie nationale est en crise sont deux choses différentes qui n’ont pas forcément de rapports entre elles. Pourquoi vouloir à tout prix en chercher un ?

Patrick Noviello

Jean-Michel Baylet affaibli par son coup de force

Fumée blanche ? Fumerolle noire ? Vendredi soir les radicaux de gauche sont en concile. Réunis en comité directeur, ils doivent se prononcer sur le maintien de leurs ministres dans le gouvernement Valls. Le conclave débute à 18 heures 30. L’extinction des feux risque de prendre du temps. Les échanges vont être vifs. Jean-Michel Baylet va devoir affronter une contestation interne.

 

Jean-Michel Baylet ©AFP

Jean-Michel Baylet
©AFP

Jean-Michel Baylet formule un véritable ultimatum. Le président du PRG fixe ses conditions à François Hollande. Il demande la signature d’un contrat. La rengaine d’une sortie du gouvernement est loin d’être nouvelle. C’est le quatrième couplet depuis le début du quinquennat. Mais la forme et le contexte sont très particuliers.

Sur la forme, Jean-Michel Baylet dresse un véritable cahier de doléance. Réforme territoriale. Fiscalité. Politique sociale. Il ne s’agit pas, comme dans le passé, de demander le respect d’un accord électoral ou de défendre l’existence des départements. La longueur et la teneur des exigences inquiète d’ailleurs les socialistes. Un responsable départemental du PS l’avoue sans détour. Il parle sous couvert de l’anonymat. Pas question de jeter de l’huile sur le feu ou de donner l’impression de s’inviter dans les affaires d’un allié. Néanmoins, ce proche de la direction nationale du PS, confesse sa perplexité : « la raison veut que Baylet reste au gouvernement. Mais il fixe la barre tellement haut qu’il donne l’impression de fixer des conditions inacceptables ». Cette inflation, cette mise sous tension, est directement liée à un sentiment de trahison.

Un cadre du PRG le dit sans détour : « Jean-Michel Baylet est très blessé par sa défaite aux sénatoriales. Il était confiant et lui qui n’a jamais été battu subit une défaite. Dans son esprit le PS lui a joué un coup de Trafalgar ». Un esprit de revanche et même de vengeance expliquerait donc la (nouvelle) menace d’une sortie du gouvernement. François Hollande a perdu les Verts. Avec le départ des radicaux, il risque de se retrouver avec une majorité socialo-socialiste. Ce n’est pas bon. En politique, comme dans la vie, il faut s’appuyer sur deux jambes pour marcher. En menaçant de retirer ses 3 ministres, Jean-Michel Baylet vise une sujet sensible.

Un sujet sensible. Mais, pas forcément, un sujet « porteur ». Dans une « guerre froide », il faut que l’adversaire soit persuadé d’une chose essentielle : le camp adverse peut appuyer sur le bouton. L’efficacité de la menace est liée à la crédibilité du danger. Or François Hollande et Manuel Valls peuvent se rassurer. Au PS, par principe, le leitmotiv est : « tout est possible ». Mais, du côté du PRG, la conviction est faite : « bien sur nous resterons au gouvernement » avoue un élu radical du Sud Ouest. Une conviction encore une fois exprimée anonymement. Décidément, l’affaire des ministres PRG s’étale au grand jour. Sauf quand il s’agit de creuser un peu.

Mais, malgré tout, le suspens demeure. Pas forcément sur le résultat du Comité Directeur. Mais sur son déroulement. Les rangs du PRG bruissent d’un risque de confrontation violente. Jean-Michel Baylet doit se préparer à une épreuve de force. Le patron du PRG est contesté. Il va trouver en face de lui, Thierry Braillard. Le secrétaire d’Etat aux sports de Manuel Valls l’a dit ouvertement. Il n’imagine pas quitter le gouvernement. Il a le soutien du premier ministre et, d’après nos informations, ses proches sont mobilisés. Ils seront très présents au Comité Directeur. Mais aussi dans le Forum qui doit suivre et qui va durer tout au long du week-end.

Jean-Michel Baylet a perdu la maitrise totale de son parti. Il reste puissant et influent. Mais des mots très durs sont prononcés. Dans les rangs, à l’image d’un élu PRG, on dénonce « l’omniprésence du chef, la cour du chef, l’usure du chef ».

Des mots qui traduisent des maux profonds. Et qui égratignent un dogme : « Baylet, c’est le PRG et le PRG c’est Baylet ». Il peut toujours compter sur la fidélité de Sylvia Pinel (dont il souhaiterait faire la future présidente du parti). Mais Jean-Michel Baylet doit affronter une résistance interne.

Le comité directeur de vendredi va coûter des cicatrices à Jean-Michel Baylet. Son coup de force, après l’échec des sénatoriales, est censé lui redonner de la vigueur. En fait, il risque de l’affaiblir davantage.

Laurent Dubois

 

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