Pas de trêve estivale. Fin août le facteur distribue les avis d’imposition et…les convocations judiciaires. Pascal Pallas n’échappe pas à la règle. Le rédacteur en chef de l’hebdomadaire « La Voix du Midi » a inévitablement reçu un courrier du Trésor Public. Mais, en plus, il a droit, cette semaine, à une ordonnance de renvoi devant le Tribunal Correctionnel. Le journaliste est poursuivi pour complicité de diffamation. L’affaire est liée à la publication, dans les colonnes de son journal, du témoignage d’un couple de militants FN. A première vue, le dossier est politique. Le Front National est à l’origine d’un dépôt de plainte. Mais, insiste Pascal Pallas, c’est en réalité le juge qui a décidé de le poursuivre. Coup de projecteur sur un épisode faussement « politico-judiciaire ». Et qui, en réalité, met sur la sellette les relations entre la Justice et la liberté d’information.
Pascal Pallas-Rédacteur en chef de « La Voix du Midi ». Photo : L.Dubois/France3MidiPy
-Avez-vous été surpris par la convocation reçue cette semaine ?
Pascal Pallas : « Pas du tout. Depuis le jour de ma mise en examen (le 17 mars 2014), je m’attendais à cette convocation ».
–Quels sont les faits à l’origine de votre prochaine comparution ?
Pascal Pallas : « Le 4 novembre 2013, j’ai publié sur le site du journal le témoignage des époux Portheault qui sont des anciens militants du FN. Ils ont voulu me rencontrer pour me faire part des dérives qu’ils ont constaté dans la base militante ».
-Avez vous contacté le Front National afin qu’il réagisse à ces allégations ?
Pascal Pallas : « Bien sur. J’ai téléphoné à Serge Laroze (responsable du FN 31) ».
-Vous estimez avoir fait votre travail de journaliste ?
Pascal Pallas : « J’ai respecté la méthodologie habituelle en faisant le contrepoint du témoignage des époux Portheault et en contactant les responsables du FN afin d’avoir leur point de vue ».
-Le Front National est connu pour avoir des relations difficiles avec la presse. D’après vous, c’est un règlement de compte politique ?
Pascal Pallas : « Le Front National a déposé plainte uniquement contre les époux Portheault. Je ne suis pas visé par cette plainte. Pour eux, il n’y a pas de soucis avec le journaliste. C’est le juge chargé de l’instruction qui a décidé de me poursuivre pour complicité de diffamation. D’ailleurs je suis mis en examen à titre personnel. C’est rare dans ce genre d’affaire. Généralement c’est le directeur de la publication qui est poursuivi. Pas le journaliste. Par chance, j’ai le soutien de mon employeur, de mon groupe de presse qui prend en charge les frais d’avocats ».
-Qu’est ce qui va se jouer devant le Tribunal Correctionnel ?
Pascal Pallas : « La question de fond à laquelle va devoir répondre le juge est : fallait-il ou non publier ce témoignage. S’il répond non et qu’il me condamne cela signifie qu’il sera impossible de faire du journalisme. Ainsi, si un opposant au maire de Toulouse exprime sa désapprobation il sera impossible de publier ses propos. Il y aura un risque permanent. Celui d’être poursuivi pour complicité de diffamation. La liberté d’information est en jeu ».
-Avez reçu des soutiens ?
Pascal Pallas : » Mes confrères me soutiennent. Ils sont inquiets pour l’exercice de leur métier. Du côté des politiques, le soutien est également unanime et oecuménique. Le président d’une collectivité a même proposé de prendre la tête d’un comité de soutien et un vice président du Conseil Régional propose de venir témoigner à la barre. Les politiques ont compris que c’est aussi leur liberté d’expression qui se joue ».
Propos recueillis par Laurent Dubois