Dans l’ombre de François Hollande, l’ariégeois Jean-Pierre Bel, ancien président socialiste du Sénat, est en fait l’un des principaux artisans de cette visite et des avancées diplomatiques avec Cuba. Le désormais conseiller du Président pour l’Amérique Latine nous livre son analyse de ce déplacement qui peut marquer une page d’histoire.
François Hollande et Jean-Pierre Bel au moment de leur départ de Cuba vers Haïti, hier. AFP /YAMIL LAGE
Est-ce que cette visite marque un tournant historique dans nos relations avec Cuba ?
Je suis totalement persuadée que cette visite annonce une avancée diplomatique majeure. Cela nous été confirmé par Raoul Castro et son Ministre des Affaires étrangères.
C’est par la France qu’ils veulent signifier leur ouverture vers l’Europe. Autrefois très proches de l’URSS, ils ne souhaitent plus aujourd’hui n’avoir qu’un interlocuteur unique. Ils souhaitent que nous les accompagnions dans leur développement économique. Ils connaissent bien maintenant les entreprises françaises et leur savoir-faire.
Est-ce que vous prenez cela comme un aboutissement de votre travail politique et diplomatique des dernières années ?
On est un certain nombre à avoir établi ce climat de confiance avec eux. Je n’ai fait qu’une seule visite officielle, contrairement à ce qu’ont annoncé de nombreux médias. C’était en janvier 2013 (NDR : il avait alors déjà rencontré Raoul Castro). Dans la foulée, Laurent Fabius s’est ensuite rendu sur place.
Cette mission est aujourd’hui plus que jamais la mienne à Cuba mais aussi aux Caraïbes.
Après cette visite présidentielle, quelle va être la suite ?
Beaucoup d’accords ont été signés avec des entreprises mais aussi sur des échanges universitaires, notamment avec Toulouse.
C’est une nouvelle ère économique qui s’annonce grâce à l’aide notamment de l’Agence Française pour le Développement. On va essayer de faire du concret, rapidement. Je pense notamment à la poursuite de la rénovation urbaine du centre de La Havane. Des chantiers énormes sont à venir.
Pour en revenir au plan diplomatique, comment situer cette visite par rapport aux Etats-Unis ?
Notre voyage est indépendant de ce qui s’amorce actuellement aux USA. Il constitue un facteur supplémentaire de sécurisation, notamment pour ceux qui veulent travailler avec Cuba et y investir.
Cuba est une porte d’entrée sur l’Amérique Latine. L’image de la France sur ce continent se joue aussi là.
Quelle image forte gardez-vous de ce voyage présidentiel à Cuba ?
Le moment où le personnel de l’Hôtel National s’est regroupé pour applaudir François Hollande qui s’en allait. Sur leur visage, on pouvait voir l’espoir qu’a suscité cette visite. Ils l’avaient entendu parler à la télévision et on se rendait compte à quel point ils étaient enthousiastes.
Moins d’optimisme en revanche pour ce qui concerne la situation en Haïti ?
Haïti est un pays qu’on sent sous tension avec un président bloqué dans sa volonté de réformer. C’est un pays très pauvre et qui souffre. La reconstruction mériterait d’aller plus vite. Il est désolant que les enjeux politiques locaux empêchent cela.
Propos recueillis par Patrick Noviello