Calme plat en surface. Tempête en coulisse. Le week-end du 1er novembre n’a pas été rythmé par des petites phrases ou de grandes déclarations. Et pourtant. Il marque peut-être un tournant. Un véritable « ouragan » (fait de colère et de révolte) secoue la gauche. Le PS se retrouve dans l’oeil d’un cyclone. Ce sont les alliances de 2nd tour qui pourraient en pâtir.
Des accusations de manipulation soufflent violemment dans en direction des socialistes. Le premier « tourbillon » vient de la mairie de Montpellier. Philippe Saurel soupçonne le PS de « miner » sa candidature avec un sondage qui le placerait en dessous de la barre des 4 points.
Le sondage n’existe pas encore. Mais le leader des « Citoyens du Midi » est persuadé qu’un mauvais coup se prépare : faire « exploser » des mauvais chiffres juste avant le dépôt de ses listes en préfecture.
Cette « mine socialiste » viserait un seul but : dissuader des candidats d’aller au bout de l’aventure et exclure Philippe Saurel de la course.
Le maire de Montpellier n’est pas le seul à prêter de « noirs desseins » au PS.
Gérard Onesta et « Nouveau Monde » placent également sur le sellette leurs « camarades » socialistes. Et l’acte d’accusation est particulèrement lourd. Il ne s’agit pas simplement de sondages malveillants mais carrément d’un réquisitoire contre un acte de « piratage ». Une liste servirait à torpiller le vote « Ecolo-Citoyen ».
Bien évidemment, du côté de Carole Delga et du numéro 3 du PS, Christophe Borgel, le démenti est catégorique. En revanche, dans l’entourage de « Nouveau Monde » le dossier est jugé suffisamment sérieux pour remonter jusqu’au national. Cécile Dufflot est alertée.
Pour étayer le réquisitoire, l’entourage de « Nouveau Monde » égrène les faits : une réunion à Castelnaudary cet été au cours de laquelle le « deal » aurait été révélé par son principal bénéficiaire, des témoignages et un précédent.
Georges Frêche, ancien maire de Montpellier
En effet, au moment des Régionales 2010, Georges Frêche est soupçonné d’avoir téléguidé une liste. Une liste qui servait à émiétter le vote écologiste et empêchait les écolos de franchir la barre des 10% au 1er tour. Un membre du cabinet Frêche aurait été à la manœuvre.
D’après plusieurs membres de « Nouveau Monde » le scénario serait en passe de se répéter. Au sein du PS, différentes sources partagent cette conviction. Cela va du « c’est bien possible » au « je suis convaincu que c’est vrai ».
Evidemment, ces différents témoignages ne constituent pas une preuve.
Ils se heurtent à une question de fond. Monter une « vraie-fausse » liste suppose de financer cette « vraie-fausse » liste.
Le financement de la vie politique repose sur des principes. Les dons sont plafonnés à 4 600 euros et ils sont réservés aux personnes physiques. Les entreprises et autres personnes morales ne peuvent pas participer. De plus, il faut désigner un mandataire financier et les comptes de campagne doivent être validés.
Le PS ne pourrait pas financer en sous main. Des milliers de prête-noms ne passeraient pas inaperçus dans les comptes de campagnes. Un campagne « minimaliste » coûte 200 à 250 000 euros. Il faudrait des bataillons de donateurs. Impossible de ne pas éveiller les soupçons en multipliant les généreux volontaires.
Et puis cela poserait une autre question : comment payer des donateurs pour qu’ils payent la campagne ? L’argent ne peut pas sortir des caisses du PS.
Le financement électoral n’est plus celui des années 80-90. De très mauvaises langues parlent de voyages en Russie pour ramener des liquidités. Bien sur, c’est juste une « légende ».
Plus sérieusement, on image mal (le mot est faible) le PS en train de faire des chèques sous la table ou en train de glisser des enveloppes. En réalité, pour téléguider une liste (outre la mise à disposition de candidats), il reste une piste : fournir de la logistique.
Toutes les listes doivent imprimer des millions de documents (bulletins de vote, professions de foi) pour pouvoir participer au scrutin. Ces dépenses obligatoires peuvent être allégées par un imprimeur « sympathique » qui fait des ristournes. Toutes les collectivités dépensent des sommes importantes en imprimerie.
Il est évident qu’un gros client (mairie ou département) peut toujours convaincre son fournisseur d’être conciliant avec un « ami ». Il faut dire que les imprimeries n’ont pas bonne presse.
D’après un officier de gendarmerie spécialisé dans la criminalité organisée, les imprimeries servent parfois de machine à blanchir l’argent sale.
Malgré tout, ce faisceau d’éléments ne suffit pas à démontrer la réalité du « coup tordu » dénoncé par « Nouveau Monde ». Mais, fantasme ou réalité, cela va laisser des traces. Dans tous les sondages, la victoire de Carole Delga repose sur une addition des forces de gauche.
Cette addition prend désormais la forme d’une vraie division.
Pour éviter qu’elle ne dégénère en un véritable schisme, le PS va devoir apaiser rapidement la colère de son « partenaire ».
Laurent Dubois