Une élection sans surprise. Mais un scénario inédit. Samedi 3 septembre, lors d’un congrès à La Rochelle, Sylvia Pinel a été élue à la tête du PRG. L’ancienne ministre succède à Jean-Michel Baylet. Une succession préparée de longue date. En revanche, cette passation (programmée) de relais ne prévoyait pas un duel avec un concurrent. Le challenger, Guilhem Porcheron, est parvenu à décrocher 34,5% des voix. Dans le camp du vainqueur, comme dans celui du vaincu, on salue la bonne tenue de la compétition et un esprit fair-play. Malgré un peu de tension, tous les acteurs s’accordent à dresser un bilan positif. Récit.
Sylvia Pinel et Jean-Michel Baylet @Max PPP
Samedi 4 septembre, La Rochelle. Le parti socialiste a déserté une préfecture des Charentes-Maritimes qui habituellement héberge l’Université d’été du PS. Mais, pour la saison 2016, ce sont les radicaux de gauche qui ont pris la place. Pendant trois jours, du vendredi 2 septembre au dimanche 4 septembre, environ 500 radicaux de gauche se sont réunis au Palais des Congrès, salle de l’Encan. Le programme prévoyait une séance de formation pour les élus (sur la transition énergétique) et trois ateliers (l’Europe, Valeurs Républicaines, Ecologie et développement économique). Mais le moment phare a été l’élection à la présidence du parti.
Dans cette compétition, la présidente par intérim n’avait pas simplement une longueur d’avance sur son (seul et unique) concurrent. Sylvia Pinel disposait d’une carte maîtresse. Elle bénéficiait du soutien de Jean-Michel Baylet. Pendant 20 ans, le ministre de l’Aménagement du Territoire a régné sur le parti radical de gauche. Il a annoncé, à différentes reprises, l’entrée en politique de son fils, Jean-Benoit. Une entrée qui aurait pu aboutir sur une présidence du PRG. Néanmoins (malgré une absence de transmission père-fils) la présidence du PRG reste tout de même dans la « famille ». Sylvia Pinel était une candidate « naturelle » et sa désignation n’est absolument pas étonnante.
Une élection incontestée malgré la tension
La seule surprise vient de l’éruption d’un trublion. La candidature inattendue de Guilhem Porcheron a secoué le cocotier. Une secousse toute relative. Mais réelle. Guilhem Porcheron ne faisait pas le poids face au rouleau compresseur Baylet-Pinel. Mais, selon plusieurs sources, la piqûre de « moustique » a agacé Jean-Michel Baylet. Lors du vote, l’agacement s’est transformé en nervosité. D’après un délégué présent à La Rochelle, ce sont les fédérations du Tarn et surtout du Tarn-et-Garonne (la plus importante avec 59 délégués) qui ont fait penché la balance du côté de Sylvia Pinel. Au moment du dépouillement, un certain suspens aurait plané. Au point de troubler les nerfs de Jean-Michel Baylet et de susciter un petit incident entre le ministre et un journaliste.
Selon un proche de Guilhem Porcheron, la candidature du challenger a mobilisé le camp Baylet-Pinel. Les statuts du PRG permettent des votes par procuration. Et l’afflux de procurations s’expliquerait par une mobilisation des soutiens de Sylvia Pinel. Nombreux appels téléphoniques. Appel au vote.
Malgré ces crispations et une certaine tension (lors du dépouillement ou avant le vote), les deux parties en présence dressent un tableau positif. Un parlementaire PRG parle d’un « bon Congrès » et « d’une ambiance agréable« . Du côté du perdant, même tonalité. Comme le précise Guilhem Porcheron, « l’ambiance était très agréable. Les gens étaient là pour voter« . Des doutes sur la sincérité du scrutin ? Des bourrages d’urnes ou des choses suspectes ? Guilhem Porcheron balaye le moindre doute : « L’élection a été parfaite. Il n’y a vraiment rien à dire. Ils n’ont pas tricher. Ils ont récupéré de beaucoup de procurations. C’est normal. Ils ont simplement fait le boulot. Ils disposaient des fichiers militants et pas moi ».
Sylvia Pinel : rupture ou continuité avec la présidence Baylet ?
Un participant au Congrès regrette que le candidat malheureux n’est pas pu prendre la parole pour remercier ses électeurs. Mais, Guilhem Porcheron préfère saluer l’élection de la nouvelle présidente : « Je pense que c’est quelqu’un de bien et avec qui je peux parfaitement travailler en bonne intelligence et dans une parfaite entente« .
Pour l’ex-concurrent l’objectif est clair. Il s’agit de transformer son capital électoral en une place dans l’organigramme. Guilhem Porcheron espère que son score va déboucher sur un poste de vice-président. Son intégration dans le staff aura valeur de test. Sylvia Pinel va-t-elle s’inscrire dans la continuité de Jean-Michel Baylet ou assumer une certaine rupture ? La nouvelle présidente du PRG n’est pas complètement neuve. Elle assure l’intérim depuis l’entrée de Jean-Michel Baylet au gouvernement. Dans cette phase intermédiaire, les équipes issues de l’époque Baylet sont restées en place. Le premier test va-être de voir si la présidente du PRG va imprimer sa marque en faisant son propre casting. Sylvia Pinel va-t-elle tendre la main à son ancien adversaire ?
Le second test sera beaucoup plus politique et peut même devenir polémique. En novembre prochain, le PRG va devoir se prononcer sur sa ligne par rapport à la présidentielle de 2017. Parmi les 35% d’électeurs de Guilhem Porcheron, on trouve des délégués qui plaident pour une autonomie par rapport au PS. L’adversaire de Sylvia Pinel a même fait campagne pour un candidat PRG face au candidat PS en 2017. Cette ligne politique va-t-elle se dissoudre dans la désignation de Sylvia Pinel ? La nouvelle présidente du PRG va-t-elle entendre une partie des voies de son parti ?
Après le Congrès consacrant son élection, Sylvia Pinel a partagé un plateau de fruits de mer avec Jean-Michel Baylet. Cet épisode gastronomique rappelle une évidence. Une élection marque un nouveau début mais pas forcemment une fin. Le vieux compagnonnage entre Sylvia Pinel et Jean-Michel Baylet est loin d’être terminé. Selon une source proche du ministre, Jean-Michel Baylet pense que la présidentielle de 2017 va laminer le PS et conduire à une recomposition de la gauche. Une recomposition dans laquelle Jean-Michel Baylet se voit jouer un rôle aux côtés de Manuel Valls.
Sylvia Pinel ne pourra pas ignorer ce positionnement.
Laurent Dubois (@laurentdub)