Perte de majorité. Carole Delga fragilisée. Le rejet d’une délibération en plein débat budgétaire alimente les commentaires et agite le bocal politique. Le texte « retoqué » portait sur l’autonomie fiscale. Une seule voix a fait défaut. Cet accroc est-il sérieux ? Depuis le début de la mandature, une évidence s’impose : la majorité de Carole Delga est une majorité plurielle. L’incident lors du vote du premier budget régional marque-t-il le début de commencement d’un schisme ? Analyse.
Jeudi 28 mai le nouveau conseil régional a voté son budget : 2,8 milliards d’euros. Principale enveloppe : 1,59 milliards d’euros concernant l’éducation (440,5 millions d’euros), la formation professionnelle et l’apprentissage (532 millions d’euros). Le second gros chapitre est le développement économique. Il représente 614,3 millions d’euros. Carole Delga qualifie le premier budget de son mandat « d’ambitieux et de volontariste« . Un budget adopté sans le vote de l’aile gauche de la majorité régionale. Six élus du Front de Gauche et la Nouvelle Gauche Socialiste ont fait défaut : Jean-Christophe Sellin, Guilhem Serieys et Liem Hoang Ngoc ont voté contre, Myriam Martin et Muriel Ressiguier se sont abstenues.
Cette fronde (prévisible) n’a pas remis en cause le vote final. En revanche, une délibération a été rejetée. Il faut relativiser et être précis. Le texte « torpillé » n’était pas un acte budgétaire. Son rejet n’a pas d’incidence concrète sur les comptes de la Région. Il s’agissait d’un « cahier des doléances » afin de présenter (officiellement) une demande au gouvernement. Une demande portant sur le « rétablissement de l’autonomie fiscale des régions« . Fin des transferts de compétence sans transfert de moyen. Création de leviers fiscaux et augmentation des ressources propres. En dehors d’une référence à une promesse de campagne de Carole Delga (la création d’une taxe sur le transport routier pour financer les infrastructures transports et notamment la LGV), la délibération contenait uniquement de vielles et récurrentes revendications.
L’opposition régionale reconnait elle-même que les enjeux étaient limités. Comme le précise Elisabeth Pouchelon (LR) : « c’est très symbolique et très probablement un vœux pieux« .
Néanmoins, le résultat est là. Un vote a échappé à Carole Delga. Un élu de la majorité parle d’un « simple » cafouillage : « un moment de grand flottement et d’incompréhension au moment du vote. Certains élus ont sans doute confondu les amendements et le vote final« . Un conseiller régional est sur cette ligne mais évoque une maladresse de la présidence de séance : « Carole Delga a promulgué le vote immédiatement. Cela n’a pas permis à certains de changer leur vote ». Un autre élu pointe un problème de professionnalisme dans l’entourage de la présidente : « Carole Delga est mal conseillée. Elle aurait du attendre avant de promulguer le vote« .
Un vote extrêmement serré : 68 votes « pour », 69 votes « contre », 15 « abstentions ».
Le scrutin s’est déroulé en fin d’après-midi, vers 18 heures 30-19 heures. Mais, quelques temps auparavant, un signe précurseur aurait pu alerter la présidente de Région. Contrairement aux habitudes de l’ex-conseil régional de Midi-Pyrénées, le vote du budget a été fait par chapitres et lors de la mise au scrutin de l’important chapitre sur les transports (incluant la LGV) la majorité a été acquise à une voix près.
Le président du bureau de l’assemblée régionale relativise les choses et « positive ». Gérard Onesta : « la rédaction plus ambitieuse de la résolution (ndlr sur l’autonomie fiscale des régions) devrait permettre de dégager une majorité claire dans un mois lors de la prochaine plénière. Finalement, ce vote de rejet d’une voix qui a surpris tout le monde pourrait s’avérer positif pour muscler le signal envoyé à Paris« .
Un élu de la « majorité » régionale n’est pas sur la ligne Onesta. Guilhem Serieys ne réduit pas l’épisode à un dérapage incontrôlé ou une erreur involontaire. Le conseiller régional évoque une divergence de fond : « la délibération de Carole Delga acceptait la baisse des dotations. Nous sommes plusieurs à avoir voter contre« .
Laurent Dubois (@laurentdub)