Notre pays est-il en train de se refermer sur lui-même ? C’est ce que tend à prouver le baromètre Ipsos-Steria « fractures françaises » réalisé pour Le Monde, France Inter, la Fondation Jean Jaurès et le Cévipof. 79% des français interrogés y pensent qu’ « on n’est jamais assez prudent quand on a affaire aux autres ». Que vaut une société qui n’a plus confiance en elle-même ou en autrui ? A quelles extrémités peut-elle se livrer ?
Au regard de la morosité qui s’installe dans l’opinion publique, cette étude fait planer quelque chose d’inquiétant chez les analystes sociétaux que nous sommes. Rajoutons à cela que 66% des interrogés sont d’accord avec l’idée qu’il y a trop d’étrangers en France et que près de 50% des français seraient pour le rétablissement de la peine de mort, on sent évidemment comme une radicalisation de l’opinion.
Quelles préoccupations ?
Défiance également à l’égard de la classe politique, phénomène que nous connaissons bien. Nous, journalistes politiques, ne sommes pas forcément là pour combattre ce phénomène mais pour essayer de rendre le débat démocratique accessible voire intéressant. Pourtant, toujours selon cette étude, pour 74% des sondés, les journalistes ne parlent pas des vrais problèmes des français.
Je me permets donc une légère riposte. Que penser de cette réponse en rapport avec les premiers mots de cette chronique (Notre pays est-il en train de se refermer sur lui-même ?) ? Est-ce nous qui ne captons pas les préoccupations majeures des français ou celles-ci sont-elles si individuelles qu’impossibles à exposer dans leur ensemble ?
Dans un autre registre, la divergence de point de vue n’est-elle pas aussi trop opposée désormais. Prenons l’exemple, certes souvent ressassé mais toujours marquant, du clivage entre les catégories populaires et plus aisées, toujours selon ce baromètre. Comment expertiser un thème comme la mondialisation quand pour 68% des cadres elle est une opportunité et quand pour 74% des ouvriers, elle représente une menace ?
Municipales au révélateur
Autant vous dire que le prochain scrutin va se dérouler dans un véritable chaudron idéologique, pas forcément très fin en termes d’ingrédients contenus, mais très brûlant. Le maire est sensé incarné l’élu le plus proche et populaire pour les citoyens. Ça tombe bien quand toutes les autres institutions sont au plus bas (72% des français n’ont pas confiance dans l’Assemblée Nationale, 73% dans le Sénat). Paradoxalement 84% des personnes interrogées s’accordent à dire qu’on a besoin d’un vrai chef en France pour remettre de l’ordre. Ils sont aussi nombreux à penser que les hommes et femmes politiques agissent principalement pour leurs intérêts personnels.
Ces Municipales ne constituent-elles pas pour la classe politique l’occasion de prouver le contraire ? Les candidats ont l’occasion d’exposer des projets collectifs et concernant pour le grand public, le tout à l’échelle d’une commune. Profitons-en parce que dès ce scrutin passé, les élections Européennes, elles, vont plutôt nous ramener à des considérations de partis voire de blocs de partis. Une guerre d’étiquettes qui ne risque pas d’améliorer l’image de l’élu dans l’opinion publique.
Patrick Noviello