Après les régionales, les législatives. Louis Aliot continue son ouverture et « débauche » une nouvelle personnalité centriste. Cette fois, la cible n’est pas Toulouse et l’entourage de Dominique Baudis. La « prise » est Audoise. L’ancien président de l’UDI 11, Jean-François Daraud portera les couleurs du Rassemblement Bleu Marine (RBM) sur la seconde circonscription de l’Aude.
Personnage plein de faconde et haut en couleur, Jean-François Darraud (surnommé « Monsieur Scoumoune ») est un vieux routier de la politique audoise : deux candidatures aux Municipales à Carcassonne, trois candidatures à des législatives sur la 1ère circonscription, une aux cantonales.
L’ancien centriste a officialisé son ralliement à Louis Aliot ce samedi 22 octobre lors d’une conférence de presse. Gilbert Collard était présent. La participation de l’avocat médiatique et député RBM du Gard véhiculait un message politique. Un message que Louis Aliot explicite sans ambiguïté : « On continue à constituer l’aile radicale ». Gilbert Collard a porté l’étiquette Nouveau Centre lors des municipales de 2008 à Vichy. Jean-François Daraud s’affiche comme un soutien de Jean-Louis Borloo. Deux personnalités (très) différentes. Mais une même stratégie politique : l’ouverture au Centre.
Comment est-il possible de passer du Centre à Marine Le Pen ? Pour Jean-François Daraud, c’est la faute de Jean-Christophe Lagarde. C’est le patron de l’UDI qui l’a poussé dans les bras du RBM :
Depuis le départ de Jean-Louis Borloo, l’UDI est une bateau ivre. Le vrai esprit centriste est mort et c’est la faute de Jean-Christophe Lagarde. Cet homme est dangereux pour la démocratie française. Il ne pense qu’à son ambition. L’ascenseur centriste se casse la gueule. Pour la première fois, le centre n’a pas de candidat pour la présidentielle et on ne fera avaler à personne que la primaire de la droite est également celle du centre ».
Au delà des péripéties du moment, le centrisme c’est (tout même) un corpus idéologique. Une idée appartient (notamment) à la doctrine du Centre : l’Europe. Le Front National est profondément euro-sceptique. Les centristes sont pour une Europe Fédérale et une intégration européenne qui conduit à la fin des Etats-Nations. Une nation que le Front National porte jusque dans son nom. Pour Jean-François Daraud ce n’est pas contradictoire : « je suis un européen convaincu mais contre cette Europe que l’on nous impose« .
Autre point d’achoppement : les valeurs humanistes. Là encore, Jean-François Darraud refuse d’opposer le RBM et le Centrisme. Pour lui son ralliement n’est pas un reniement. L’ancien centriste et futur candidat aux législatives met, toutefois, un bémol :
Je n’aurai jamais rejoint ce camp si Jean-Marie Le Pen était toujours le patriarche. Si c’était toujours lui, je ne serai pas venu »
Visiblement Jean-François Daraud a de la mémoire. Dans le Panthéon Centriste figure Simone Veil. L’ancienne ministre de la Santé a dénoncé régulièrement l’extrémisme du Front National. Un Front National dirigé, à l’époque, par Jean-Marie Le Pen. Simone Veil (déportée en 1944 à Auschwitz-Birkenau) s’est notamment indignée du « Durafour crématoire » qui, plus de vingt ans après, colle toujours à la peau de Jean-Marie Le Pen.
Pro-Aliot mais anti-Le Pen, Jean-François Darraud revendique des racines humanistes : « Ma vie passée parle pour moi. L’Abbé Pierre m’a remis l’étoile civique nationale et je me suis occupé pendant des années d’une équipe de foot pour les aveugles ».
Pour Jean-François Daraud, il n’y a pas de contradiction entre les valeurs humanistes du Centrisme et le Rassemblement Bleu Marine : « j’ai été accueilli à bras ouverts et je ne trouve que humanisme, tendresse et bonheur. A l’UDI ce n’était que des tensions internes et des bagarres. On m’a ouvert les bras ».
Les bras sont ouverts. Mais Marine Le Pen et son parti militent pour une fermeture des frontières. La « France Terre d’Accueil » est un thème défendu par la gauche, une partie de la droite et le Centre. Mais ce n’est pas la tasse de thé du Front National. Comment l’ancien centriste concilie ses anciennes convictions et sa récente conversation ? Avec une formule en forme de pirouette :
Je suis prêt à accueillir mais quand on a une maison avec 3 pièces alors qu’il en faudrait 4 ou 5, je dis stop. Je ne vais pas m’expatrier pour laisser ma place »
Jean-François Daraud a démissionné de la présidence de l’UDI 11 en mars dernier. Cette démission a mis fin à un parcours centriste débuté à l’âge de 18 ans. Mais il a fallu seulement quelques mois pour adopter la ligne de Marine Le Pen.
Laurent Dubois (@laurentdub)