16 Mar

[Edito] Un printemps de colère ?

Manifestation de retraités le 15 mars dernier à Toulouse. Photo Max PPP Frédéric Charmeux

Voilà donc qu’on nous annonce 36 jours de grève des cheminots, sur trois mois, et à jours fixes. « Une mobilisation innovante » selon les syndicats. Au contraire, « une tradition française » que ces grèves au long cours vous diront d’autres. Calendrier encore : dans quelques semaines, apparaîtra la date symbolique des 50 ans de Mai 68.  Un souvenir qui s’exprimera peut-être dans la rue, en conditions réelles.

Que toute tentative de réforme puisse susciter la contestation dans l’hexagone, a priori, rien de nouveau. Les syndicats n’ont eu de cesse de brandir un étendard ces derniers jours : le conflit social de 1995 face au plan Juppé et la paralysie qu’il avait entraîné dans le pays. Mais ce qui change aujourd’hui, ce sont peut-être les méthodes, syndicale donc on vient de le voir, mais aussi gouvernementale. Emmanuel Macron avait annoncé qu’il irait au pas de charge, qu’il ne ferait pas dans le corporatisme et qu’il bougerait les lignes. Au risque de soulever une vague de mécontentement.

Pour exemple ces milliers de retraités dans les rues de Toulouse, Montauban, ou encore Tarbes contre la hausse de la CSG. Des femmes et des hommes qui, pour beaucoup, « manifestaient pour la première fois ». Dans les cortèges, leurs propos sont vifs, les insultes fusent à l’égard du gouvernement. « Pas touche à mon pouvoir d’achat, surtout si j’ai bossé quarante ans pour me le constituer ».

Les aînés en colère et les jeunes pas en reste, qui occupent depuis plusieurs jours la Fac Jean Jaurès de Toulouse pour protester contre une sélection suspectée à l’entrée des universités et la fusion de ces dernières. Là encore, comme une impression de déjà-vu avec une nuance toutefois, la voix de ceux qui veulent pouvoir étudier normalement qui se fait entendre.

Une colère sur les pavés des villes mais aussi dans les champs. Les agriculteurs d’Occitanie manifestent depuis deux mois contre l’Europe et l’Etat qui veulent leur supprimer des aides. Les élus ruraux, comme dans le Lot, veulent sauver leurs écoles et la vie qui va avec. Réduire la fracture numérique comme leur promet le gouvernement avec la fin des zones blanches ne suffira pas. La défense des services publics reste le mètre étalon de la contestation sociale.

Coca-Cola, Lafarge, Mac Donald, Carrefour, Bosch, Vallourec… Les conflits n’ont pas non plus manqué dans les entreprises privées dans la région comme ailleurs. Les travailleurs veulent leur part du gâteau sur les bénéfices, un salaire et des conditions de travail décents et à minima sauver leur emploi. Bref public-privé, jeunes ou moins jeunes, le printemps met du temps à arriver cette année mais un vent chaud de fronde semble déjà se lever sur le pays.

Patrick Noviello (@patnoviello)