C’est le troisième homme de la primaire. Dans les sondages, Bruno Le Maire est dans le « tiercé » de tête, derrière Alain Juppé et Nicolas Sarkozy. Secrétaire d’Etat a 39 ans, ministre à 40 ans, Bruno Le Maire passe un cap et se lance dans la course à la présidentielle.
En moins de 10 ans, l’énarque-agrégé de lettres est passé des couloirs de la diplomatie aux coulisses de Matignon et du statut de conseiller du Prince à l’arène politique. Le député de l’Eure est jeudi 9 juin à Toulouse. Ce sera son 376 déplacements. Bruno Le Maire s’exprime sur la primaire, Nicolas Sarkozy, Alain Juppé, son réformisme et les blocages qui grippent le pays. Interview.
Le Blog Politique -Vous venez de remporter le prix de l’humour politique pour votre phrase « mon intelligence est un obstacle ». Jacques Chirac qualifiait d’Alain Juppé de « meilleur d’entre nous ». Comme le maire de Bordeaux, vous êtes passé par les grandes écoles de la République. Il y a du Juppé en Bruno Le Maire ?
Bruno Le Maire. Chaque responsable politique a sa propre histoire, son propre parcours. Ce n’est pas parce que nous avons fait les mêmes écoles que nous portons les mêmes idées. J’ai démissionné de la fonction publique, je ne cumule pas les mandats et je n’ai jamais gouverné aux destinées de ce pays. C’est ma différence.
Le Blog Politique-Dans les sondages, vous êtes le troisième homme de la primaire. C’est une bonne surprise ou un résultat que vous analysez froidement et qui vous donne envie d’aller plus haut ?
Bruno Le Maire. L’objectif n’est pas d’être le troisième homme mais de gagner la primaire. Pour cela, le seul sondage qui compte, c’est celui des 20 et 27 novembre prochains. Ce que je ressens sur le terrain, c’est que les Français veulent que les choses changent et qu’ils sont prêts à faire le choix du renouveau. Prêt à renouveler la classe politique, prêt à refonder le dialogue social.
Les français veulent que les choses changent
Le Blog Politique- L’organisation de la primaire va, en partie, conditionner les résultats. Quels sont les points qui vous semblent décisifs : choix implantation des bureaux de vote, organisation des débats dans les fédérations départementales… ?
Bruno Le Maire. Nous n’avons pas le droit à l’erreur. Ce qui est décisif c’est d’effacer le souvenir honteux de l’élection interne de 2012 en s’assurant que l’élection de notre candidat soit incontestable et incontestée. Cela nécessite une organisation transparente et équitable pour tous les candidats. J’ai toute confiance en Thierry Solère, qui coordonne cette primaire et notamment l’implantation des 10 000 bureaux de vote, pour réussir ce défi.
Effacer le souvenir honteux de l’élection interne de 2012
Le Blog Politique-Vous êtes confiant dans la qualité et la sincérité de la compétition ? La lutte ne va pas trop laisser de traces ?
Bruno Le Maire. Ce n’est pas une question de confiance mais de nécessité : nous n’avons pas le choix. Après le désastre du quinquennat Hollande et le pitoyable spectacle de l’UMP en 2012, notre famille politique a le devoir de rester unie. Je compte sur le sens des responsabilités de chacun.
Le Blog Politique-Nicolas Sarkozy a-t-il une longueur d’avance sur ses concurrents parce qu’il est le président de LR ?
Bruno Le Maire. J’ai effectué 375 déplacements depuis janvier 2013 pour aller à la rencontre des Français et échanger avec eux. J’ai tissé depuis quatre ans un tissu solide d’élus locaux et nationaux qui me soutiennent avec loyauté. Avec mon équipe nous pouvons compter sur des milliers de bénévoles, de jeunes et de donateurs qui partout en France croient au renouveau politique que je porte. Je ne sais pas si Nicolas Sarkozy a une longueur d’avance, mais je n’ai pas pris de retard.
Le Blog Politique-La primaire se marque à droite pour séduire militants et sympathisants. Cette « droitisation » est-elle un handicap car il faudra ensuite parler à l’ensemble des français ?
Bruno Le Maire. Je m’emploie depuis plusieurs années à défendre avec constance des idées et des valeurs qui sont les miennes et auxquelles je suis profondément attaché. Il n’a jamais été question de déroger à celles-ci. Je veux être élu sur un programme et ne ferai pas de compromis par opportunisme.
Le Blog Politique-François Hollande et Manuel Valls battent des records d’impopularité. C’est gagné pour la droite en 2017 ?
Bruno Le Maire. Rien n’est jamais gagné. La droite ne doit pas l’emporter par dépit ou par revanche mais parce que le projet qu’elle porte insuffle le renouveau capable de redresser la France et de redonner confiance à tous nos compatriotes. Il est de notre devoir de faire preuve d’audace et de renouveler nos pratiques politiques comme je le demande depuis maintenant plusieurs années : fin définitive du cumul des mandats, limitation à 3 mandats parlementaires successifs, réduction du nombre de parlementaires et d’élus régionaux, et démission de la fonction publique pour les hauts fonctionnaires élus. Je me bats contre les pratiques dépassées, les postures partisanes et les discours incantatoires qui ne trompent plus personne. En 2017, les Français doivent avoir le choix d’une nouvelle offre qu’ils attendent depuis si longtemps.
La droite ne doit pas l’emporter par dépit ou par revanche
Le Blog Politique-Vous avez annoncé que vous ne serez pas le premier ministre du prochain président de la République. Pourquoi ? Matignon est un « cadeau empoisonné » ?
Bruno Le Maire. Je n’ai qu’un seul objectif : gagner la primaire pour devenir le prochain Président de la République Française et réformer le pays. C’est le seul message qui vaille et notre électorat n’en peut plus des manœuvres d’appareil et des parcours sinueux. Il faut offrir un choix clair aux Français pas un plan de carrière.
Le Blog Politique-Dans la galerie des présidents de la Ve République, du Général jusqu’à François Hollande lequel est, selon vous, le meilleur et le pire ?
Bruno Le Maire. Nous devons nous tourner vers l’avenir pour écrire une nouvelle page de l’Histoire de France. Néanmoins je garde une admiration toute particulière pour le Général de Gaulle, et je pense que François Hollande a abaissé la France comme jamais sous la Ve République.
Une admiration particulière pour le Général de Gaulle
Le Blog Politique-Vous venez dans le Sud-Ouest au milieu des grèves de trains et des blocages anti-El Khomri. C’est le côté « gaulois » d’un peuple qui résiste toujours et encore aux réformes ?
Bruno Le Maire. Ce n’est pas la France qui résiste. C’est une minorité qui se dit représentative mais qui en réalité ne représente qu’elle-même et qu’une idéologie totalement obsolète. L’idée selon laquelle le pays serait difficilement réformable ne me semble pas juste. La réalité est que nous nous y prenons mal depuis plusieurs décennies, en refusant d’être clairs sur nos projets et en faisant une fois au pouvoir l’inverse de ce qui a été annoncé en campagne. Or, le rôle du chef de l’État est de respecter la majorité et d’appliquer son contrat de mandat conclu avec le peuple français. La France n’est pas plus difficilement réformable que d’autres pays en Europe. Dans tous les pays européens, quand on porte des changements profonds, comme en Allemagne ou en Italie, cela crée des résistances et des réactions. C’est bien normal, nous sommes en démocratie. Ce qui pose problème en France c’est que nous cédons aux minorités contre la majorité depuis trente ans. Il est temps que la majorité soit respectée.
En France nous cédons aux minorités contre la majorité depuis trente ans
Le Blog Politique-Vous faites une visite à Toulouse. Quels sont vos soutiens en Midi-Pyrénées-Languedoc-Roussillon ?
Bruno Le Maire. J’ai l’honneur d’être soutenu par des élus qui font un travail remarquable et sans qui rien ne serait possible. La liste complète des parrainages que j’ai recueillis est disponible sur mon site Internet.
Propos recueillis par Laurent Dubois (@laurentdub)