Deux mois après l’annonce de sa candidature, Jean-François Copé multiplie les déplacements à un rythme soutenu. Carcassonne, Nîmes, Manosque et Cavaillon la semaine dernière. Ce mercredi 27 avril, il est à Toulouse avant les Pyrénées-Orientales. Les sondages ne classent pas Jean-François Copé parmi les favoris de la primaire. Il oscille entre 1 et 3 points dans les baromètres. Mais l’ancien président de l’UMP affirme qu’il peut gagner même s’il relativise en précisant qu’il a « conscience d’attaquer l’Himalaya par la face Nord« .
Dans une interview exclusive pour Le Blog Politique de France 3 Midi-Pyrénées, Jean-François Copé déclare disposer des parrainages nécessaires pour se présenter à la primaire et cite parmi ses soutiens la députée de Haute-Garonne et présidente de LR31, Laurence Arribagé. Le candidat à la primaire se prononce également sur les « chances » d’Alain Juppé et défend son programme.
Le Blog Politique. Vous étiez opposé au principe des primaires. Vous êtes désormais candidat et engagé dans la compétition. Qu’est-ce qui vous a fait changer d’avis et convaincu de vous présenter sur la ligne de départ ?
Jean-François Copé. C’est vrai qu’à l’origine je n’étais pas à l’aise avec ce principe des primaires. Il me semblait en rupture avec l’esprit de la Vème République, celui de la rencontre d’un homme et du peuple… J’ai évolué ! Pourquoi ? Parce qu’aujourd’hui aucun leader naturel ne s’impose à droite. Et comme il serait suicidaire d’utiliser le premier tour de l’élection présidentielle pour départager tous les candidats de notre famille politique, mieux vaut le faire dans le cadre de primaires ! Elles permettront de dégager un candidat reconnu par l’ensemble de la droite et du centre. A titre personnel, je m’étais donné deux critères pour être sur la ligne de départ. Le premier était d’être lavé de tout soupçon dans l’affaire dite Bygmalion, sur le financement de la campagne présidentielle de 2012. Les juges, vous le savez, m’ont fait connaître qu’ils ne retenaient aucune charge contre moi. Mon éthique personnelle m’aurait empêché de me présenter si jamais j’avais été mis en examen. Le second critère était d’être prêt, tout simplement. Je le suis. J’ai derrière moi 20 ans d’engagement politique local et national. Surtout, je porte des idées, celles d’une droite décomplexée, que je ne vois nulle part ailleurs. Des idées que j’ai décrites dans mon livre, le Sursaut français, je veux les porter moi-même. Mon expérience, mon parcours, mon projet me portent à être candidat pour me mettre au service des Françaises et des Français…
Contrairement aux autres principaux concurrents, je n’ai pas été aux manettes entre 2007 et 2012″
Le Blog Politique. 11 candidats sont en piste. Ce n’est pas trop ? Vos atouts par rapport aux autres concurrents ?
Jean-François Copé. C’est la démocratie ! Mais ne nous y trompons pas : il y a beaucoup de candidats à la candidature, mais il y en aura beaucoup moins sur la ligne de départ fin septembre. Tous n’auront pas les parrainages requis. Il y aura cinq ou six candidats au final. Quant à moi, j’estime avoir plusieurs différences avec les autres candidats. D’abord, je ne suis comptable d’aucun bilan. Contrairement aux autres principaux concurrents, je n’ai pas été aux manettes entre 2007 et 2012. Or ce quinquennat –où tout n’a pas été mauvais loin de là !- a été une occasion manquée pour réformer la France en profondeur. Les Français avaient des attentes immenses en 2007, ils ont été déçus. Ils savent qu’il y a peu de raisons que ceux qui n’ont pas eu assez de résultats hier, en aient plus demain. Moi, je n’ai pas ce problème, j’étais de ceux qui poussaient pour réformer plus en avant : par exemple, c’est moi qui, avec mes amis députés, ait bataillé pour interdire le port de la burqa alors que l’exécutif, initialement, ne voulait pas de cette loi ! Ensuite, je suis le seul maire d’une ville moyenne, Meaux. Une petite France ancrée dans le réel : 50% de logements sociaux, 27 nationalités. Et j’y ai eu des résultats : la délinquance a été divisée par deux en dix ans, des centaines d’emploi ont été créés, la laïcité a été réaffirmée, la rénovation des quartiers a changé le visage de la ville… Si j’ai été réélu à chaque fois au premier tour, c’est bien parce que mes administrés ont vu leur cadre de vie s’améliorer. Ce que je fais pour Meaux, c’est ce qu’il faut faire pour la France. Enfin, je suis le seul à assumer une méthode de gouvernement infaillible pour réformer : celles des ordonnances, c’est-à-dire de 15 décisions immédiatement applicables au lendemain de l’élection sans passer par l’interminable procédure législative. Je n’aurai pas la main qui tremble quand il s’agira de prendre des décisions difficiles qui seules pourront remettre notre pays en ordre de marche !
Le Blog Politique. Pour participer aux primaires, le ticket d’entrée est élevé : 250 élus dont 20 parlementaires issus de 30 départements et 2 500 adhérents. Où en êtes-vous de votre « récolte » de signatures ?
Jean-François Copé. J’aurai les parrainages nécessaires malgré les pressions assez peu « fair-play» des uns et des autres… Plus de 20 parlementaires et des centaines d’élus m’ont déjà assuré par oral ou par écrit de leur soutien !
Chacun connaît ma proximité amicale et politique avec Laurence Arribagé »
Le Blog Politique. Vous pensez pouvoir obtenir des soutiens dans la région Midi-Pyrénées/Languedoc-Roussillon ? Combien et lesquels ?
Jean-François Copé. Bien sûr ! J’étais par exemple la semaine dernière à Nîmes où mon ami député européen Franck Proust me soutient ! Et puis chacun connaît ma proximité amicale et politique avec Laurence Arribagé, Elie Aboud, François Calvet… Beaucoup d’entre eux sont engagés en tant qu’organisateurs du scrutin dans leur département et, à ce titre sont tenus à une certaine réserve. Ils feront part de leurs choix le moment venu !
Le Blog Politique. Quels sont les thèmes que vous allez défendre pendant cette primaire ?
Jean-François Copé. Un axe fort : le commandement. La France souffre de ne plus être commandée : regardez François Hollande qui recule devant la pression de l’UNEF et de certains casseurs de Nuit Debout pour édulcorer la loi El Khomri… c’est consternant ! Jusqu’à quand allons-nous laisser la France décrocher ainsi ? Partout, nos compatriotes disent que notre pays n’est plus tenu. Eh bien je m’engage à ce que désormais il le soit, à ce « qu’on ne recule plus », c’est pour cela que j’ai fait de cette phrase forte mon slogan de campagne ! Je propose de changer la France en votant dès l’été 2017, 15 ordonnances pour rétablir l’autorité de l’Etat (création de 50 000 postes de policiers, gendarmes, magistrats, gardiens de prison, militaires…), restaurer la liberté économique (avec 50 milliards de baisses d’impôts et de charges), lutter contre le communautarisme (faire en sorte que l’Islam s’adapte à la République et pas l’inverse)… Il n’y aura pas de Sursaut français possible sans rétablissement du commandement, du leadership, à la tête de notre pays !
Le Blog Politique. Pensez-vous que les perdants aux primaires vont s’aligner derrière le vainqueur ? La lutte ne va-t-elle pas laisser des traces ?
Jean-François Copé. Pas d’angélisme : il n’y a pas de compétition sans éclats. Il y aura forcément des frictions. Pas de catastrophisme non plus : nous serons tous derrière le vainqueur ! En tous cas, moi je n’aurai pas d’état d’âme. Si jamais je ne l’emportais pas, je serai à 100% derrière notre candidat ! L’essentiel est de réussir l’alternance. François Hollande est le pire Président de la Vème République, la France ne peut pas se permettre de continuer avec lui.
Le Blog Politique. Nicolas Sarkozy est un des favoris des primaires. Pensez-vous que sa mise en examen dans l’affaire Bygmalion est un obstacle ? Son éventuelle qualification aux primaires peut-elle « exploser » en vol en raison d’un calendrier judiciaire qui peut venir percuter celui des présidentielles ?
Jean-François Copé. Je n’ai pas d’information particulière en ce qui concerne Nicolas Sarkozy ni en ce qui concerne l’avancée de l’instruction de l’affaire du financement de la campagne présidentielle de 2012. Il prendra sans doute la décision de se présenter ou non en accord avec ses valeurs.
Nous sommes à un an des élections tant de choses peuvent se passer… Rien n’est joué, rien n’est plié, rien n’est écrit
Le Blog Politique. Alain Juppé est le favori des sondages. Le match est plié ? S’il gagne les primaires, il deviendra le futur président de la République ?
Jean-François Copé. Les sondages d’avril 2016 ne font pas le Président de mai 2017. Nous sommes à un an des élections tant de choses peuvent se passer… Rien n’est joué, rien n’est plié, rien n’est écrit. Fin 1994 pas grand monde ne misait sur Jacques Chirac et il a gagné six mois après… Les pronostics ne servent à rien, seule la vérité des urnes compte.
Le Blog Politique. Ce week-end l’extrême droite a remporté une victoire historique en Autriche. En France Marine Le Pen est bien placée dans les sondages pour 2017. Pensez-vous que la présidentielle va se gagner en « droitisant » la droite ?
Jean-François Copé. Le score de l’extrême-droite en Autriche s’explique largement par l’incapacité de l’Europe à apporter une réponse crédible à la crise des migrants… Tout se joue là : dans la crédibilité et les résultats pas dans la « gauchisation » ou la « droitisation ». Celui ou celle qui sera le prochain président de la République sera celui ou celle qui aura donné le plus de gages quant à sa capacité à agir pour redonner à la France son indépendance et sa grandeur, à agir pour que, dans les dix ans qui viennent nos enfants, qui aujourd’hui ont la tentation de l’expatriation, puissent vivre et réussir dans notre pays.
Propos recueillis par Laurent Dubois (@laurentdub)