Depuis le 13 novembre, les sondages scrutent l’impact des attentats sur les Régionales. Dans le Tarn, inutile d’affuter des échantillons et de commander une étude. Un tract suffit à mesurer les effets. Dans le département de Jaurès, le spectre d’Al Qaïda plane sur les urnes. Plus surprenant, c’est le candidat de la droite et du centre qui est à la manoeuvre.
Le tract porte les couleurs de la droite et comporte la photo de Dominique Reynié. Mais il pourrait arborer le logo du Front National. Mais pas forcément le portrait de Louis Aliot. En « Midi-Pyrénées/Languedoc-Roussillon », le candidat du FN évite les écarts et la caricature. Ce n’est pas le cas du document de campagne qui circule dans la ville de Graulhet.
Dominique Reynié a un côté « caméléon ».
Sur une terre frontiste, à Perpignan, Dominique Reynié n’hésite pas à faire « couleur » locale. Plus précisément couleur « treillis de combat » en déclarant au sujet des migrants venus de Syrie : « Je demande…qu’ils soient pris en charge par nos militaires, ceux de la Légion Etrangère notamment et qu’ils retournent chez eux…libérer leur patrie parce que c’est un honneur de libérer son pays ».
En dehors de certaines « concessions » aux climats locaux, Dominique Reynié cultive l’image d’un modéré. Cette image ne cadre pas vraiment avec le tract graulhétois. Les fins connaisseurs peuvent toujours prétendre que Graulhet est un Perpignan sur Tarn. Un bastion historique du Front National. Mais, malgré cela, le ton et les mots sont particulièrement « épicés » :
« Parmi les multiples raisons de voter contre l’équipe PS rappelez-vous ceci : il y a cinq ans, la municipalité accueillait l’intellectuel islamiste Tarik Ramadan…petit fils du fondateur des Frères Musulmans, une secte terroriste proche d’Al Quaïda ».
Passons sur le contenu. Peu importe que l’intellectuel « proche » d’une « secte terroriste » soit effectivement douteux. C’est vrai. Mais impossible de nier une autre évidence. Tariq Ramadan a arpenté tous les plateaux de télévisions et studios de radio de la planète médiatique. Tariq Ramadan sent le souffre. Mais la mairie de Graulhet est loin d’être la seule à l’avoir invité.
En revanche, l’utilisation électorale d’une (prétendue) collusion entre une mairie socialiste, un intellectuel et…Al Qaïda est particulièrement « corsée ». Dominique Reynié durcit son discours et muscle ses méthodes. Evidemment, au delà du contexte des attentats, les sondages ne sont pas étrangers à cette tactique. Au 1er comme au 2nd tour, Dominique Reynié est relégué derrière Louis Aliot.
Face à cette redoutable concurrence, le candidat de la droite et du centre ne court pas après le FN. Il lui vole ses habits.
L’auteur formel du tract est le colistier tarnais de Dominique Reynié : Bernard Carayon. Ce n’est pas Dominique Reynié qui a tenu la plume. Mais, d’après nos informations, le document a été validé par le staff de la tête de liste régionale.
A quelques kilomètres de Graulhet, dans l’agglomération albigeoise, il n’est pas du tout certain que le centriste Philippe Bonnecarrère (sénateur du Tarn) et Stéphanie Guiraud-Chaumeil (maire DVD d’Albi) apprécient cette tentative de hold-up électoral.
Dans le département voisin de la Haute-Garonne, un des sponsors de Dominique Reynié risque également de grincer des dents. Pas évident que le centriste Jean-Luc Moudenc apprécie le braconnage (sans complexe) de Dominique Reynié.
Laurent Dubois