06 Sep

Aurélien Pradié, « Fillon-Copé : une violence polie »

Une vraie-fausse rentrée. Aurélien Pradié revient d’une escapade grecque et d’un séjour au Cap Ferret. Mais, en fait, il n’est pas vraiment parti. Le jeune conseiller général du Lot s’ennuie en vacances. Après la présidentielle et une candidature aux législatives, Il a « juste pris un peu de temps pour respirer ». De retour à son bureau, « c’est encore calme ». Les « plénières » de l’assemblée départementale reprendront  en octobre. En revanche, s’agissant de son parti, « il n’y a pas eu de trêve véritable ». Après la défaite de Nicolas Sarkozy, l’UMP doit se trouver un nouveau leader. Tout l’été, sur les plages ou dans la presse, les candidats sont allés à la rencontre des militants. L’ébullition parisienne et les passes d’armes entre François Fillon et Jean-François Copé n’ont pas franchi les frontières du Lot. « La seule agitation concerne les 8000 parrainages ». Des parrainages indispensables pour briguer la présidence de l’UMP et dont la collecte constitue un enjeu stratégique. Pour les petits candidats, cela permet de montrer leur influence et donc de négocier – en position de force – des postes. Aurélien Pradié a fait son choix. Il va donner son parrainage à un de ces compétiteurs qui participent pour participer. Il s’agit de Xavier Bertrand. Pour lui, c’est un signe de reconnaissance. Il a travaillé avec l’ancien ministre du Travail. Xavier Bertrand a confié à l’élu lotois une mission sur l’emploi des jeunes en milieu rural. Aurélien Pradié ne l’oublie pas. En revanche, il précise immédiatement que son parrainage et son vote sont deux choses différentes. Dans l’immédiat, c’est Xavier Bertrand. Mais, au moment de glisser son bulletin dans l’urne, ça se jouera entre François Fillon et Jean-François Copé. Sa fibre« chiraquo-gaulliste », le fait pencher du côté de l’ancien premier ministre. Il a « tendance à dire que Fillon est le bon candidat ». Néanmoins, « la ténacité de Copé est une qualité essentielle pour diriger l’UMP ». L’électeur Pradié a quelques semaines pour trancher ce dilemme. En attendant ses deux favoris se livrent une lutte qu’il qualifie de « violence polie ».

LD

Congrès contre congrès

C’est la loi du genre : une élection présidentielle s’achève, un  chef de l’Etat est élu et un parti, au moins, perd son leader.
Cette fois-ci, ce sont les deux plus grosses formations du pays qui se retrouvent orphelines.

Le numéro1 du PS (certes seulement depuis l’issue des Primaires) est à l’Elysée, celui de l’UMP s’est mis en retrait (définitivement ?) après la défaite. Et voici les deux formations au pied du mur, pas de la même manière mais face à une même obligation : se retrouver un chef.
Martine Aubry a annoncé son départ à l’université d’été de La Rochelle, mais pas son successeur et la guerre fait rage entre Harlem Désir et Jean-Christophe Cambadélis. L’ambiance n’est guère plus à la franche camaraderie à l’UMP. Les anciens Sarkozystes ne savent plus à quelle bannière se vouer et le parti peine à se trouver une ligne directrice, notamment quant à savoir comment placer le curseur face au FN.
L’issue des tractations socialistes s’officialisera à Toulouse fin octobre. D’ici là, il ne faut surtout pas déranger le gouvernement au travail et faire preuve d’unité, c’est ce qu’a demandé à ses troupes Jean-Marc Ayrault.
A droite, certains diront que les patrons des multiples courants n’ont que ça à faire, se concentrer sur les négociations d’alcôves, tant l’opposition est pour l’heure encore sous le choc des scrutins et à ce point en cour d’organisation. Difficile de se retrouver opposants après tant d’années d’exercice.
Mais ce temps ne sera pas perdu pour l’UMP tant il est véritablement à la croisée des chemins. Borloo et ses centristes ont d’ores et déjà pris du champ et l’ancien parti présidentiel doit prouver qu’il n’était pas que ça, l’instrument d’un homme, qui l’a porté certes au sommet mais qui l’a entraîné avec lui dans sa chute. Hervé Morin, de son côté, se verrait bien créer une énième fédération des centres.

Au-delà de ces renouvellements d’état-major, c’est un autre enjeu qui se dessine : les véritables orientations politiques de chacun des deux grands partis du pays en vue des scrutins locaux de 2014. Les temps sont à la rigueur et à l’économie, mais le combat d’idées, lui, ne coûte rien, messieurs et mesdames les élus, donnez-nous matière à réflexion et à débat.

03 Sep

Sous le soleil : la crise – Volet 4 – Carnets de vacances de Patrick Noviello

Sous le soleil : la crise ! (4)

A l’heure où le gouvernement fait sa rentrée avec un programme de lutte contre la crise, cette série d’été vous emmène à la rencontre des français en vacances (dont je suis en ce mois d’août) et à la rencontre de leurs modes de consommation estivales.

Pas une enquête statistique exhaustive mais plutôt des instantanés pris sur le vif.

Retour à Toulouse, sous une chaleur accablante… Encore quelques jours avant la reprise, le moment idéal pour aller à rencontre des vacanciers de passage ou en séjour qui ont choisi Toulouse.

Direction le musée des Augustins qui invitent encore pour quelques jours à venir découvrir les disciples nord-européens du Caravage. Bonne pioche ! La file d’attente à l’entrée est conséquente, jeunes touristes se mêlent à des couples de séniors et à de nombreuses familles. Ce public divers a un point en commun : chacun essaie de demander une réduction sur le tarif d’entrée avec plus ou moins de succès.

A l’entrée de Toulouse Plage, pas besoin de négocier, l’entrée est gratuite. La municipalité prête même du matériel de jeux (raquettes, ballons…). C’est sans doute aussi pour cela que le site fait le plein cette année. Face à la crise, mais avec un effet « Mars » et  des hommages appuyés à Neil Armstrong, la Cité de l’Espace résiste bien.

Sur son site internet, l’office de tourisme de la ville propose des week-ends « découverte » à partir de 32 euros par personne, les visites guidées, elles, s’affichent à 8 euros. Voilà de quoi attirer les vacanciers dans le cœur de ville où les terrasses sont remplies. Côté commerce en revanche, un patron de boutique se lamente : « j’ai vu personne aujourd’hui ! ». La rentrée approche à grands pas et les achats sont encore tournés vers les rayons scolaires. Augmentation de la prime de rentrée ou pas, ceux-ci ne connaissent pas de période creuse.

Sécheresse oblige, la Garonne, très basse, s’écoule très lentement. Sur les quais, la nuit tombe. Les étudiants sont loin d’être tous  revenus mais les terrasses sont déjà animées place Saint-Pierre. Certains essaient d’oublier la galère de la recherche d’un logement étudiant (déjà des préoccupations de rentrée mais toujours la crise…) Sur la ville, le CROUS comptabilise chaque année 13000 demandes de logements  en Cité-U pour 9000 places.

Pas de vacances pour les squatteurs du Crea. La Préfecture veut faire place nette après la décision du tribunal, les locaux des allées des Demoiselles doivent être évacués. Quand les forces de l’ordre interviennent, aucune famille ne se trouve à l’intérieur. Pour elles, la rentrée devra se faire ailleurs. L’Etat a bien un projet d’hébergement social sur ce site, mais ce n’est pas pour tout de suite. Pour l’heure, on mure tous les accès du bâtiment.

Combien d’habitants de la ville rose auront passé leurs congés chez eux cette année encore ? Nul ne peut véritablement le dire. Comme chaque été, Toulouse s’est vidée de bon nombre d’habitants, surtout en août, l’occasion de ne pas ralentir la cadence des travaux (Tram, voieries….) Il n’y a déjà plus de temps à perdre pour la municipalité. Même si les élections ne sont pas encore pour cette nouvelle saison.

29 Août

La Voix est Libre : Au cœur du débat de société

Même si nous n’irons pas aux urnes cette année, c’est une saison plus politique que jamais qui s’annonce.
Alors que le gouvernement va s’efforcer de mettre en application les promesses électorales de François Hollande, PS et UMP vont désigner leurs nouveaux chefs à travers leurs congrès.
Celui des socialistes se tiendra même à Toulouse, donnant lieu à une émission spéciale.

Cette saison sans scrutin nous permettra également de revenir sur les grands débats de société qui vont être abordés par nos parlementaires : réforme de l’université, euthanasie, mariage gay, déontologie de la vie publique, politique fiscale…
Cette année se tiendront aussi les états généraux des territoires voulus par l’ariégeois Jean-Pierre Bel, président du Sénat.

En ville ou à la campagne, problématiques nationales ou locales, avec des élus ou des membres de la société civile, « La Voix est Libre » relance le débat chaque samedi matin à 11h30.
Et puis pour plus de discussion, n’hésitez pas à réagir par les commentaires dans ce blog.

Rédaction en chef/Présentation : Patrick Noviello
Politologue : Laurent Dubois

27 Août

Sous le soleil : la crise ! Volet 3 des Carnets de vacances de Patrick Noviello

Sous le soleil : la crise ! (3)

A l’heure où le gouvernement fait sa rentrée avec un programme de lutte contre la crise, cette série d’été vous emmène à la rencontre des français en vacances (dont je suis en ce mois d’août) et à la rencontre de leurs modes de consommation estivales.
Pas une enquête statistique exhaustive mais plutôt des instantanés pris sur le vif.

A ceux qui disent que la Costa Brava n’est qu’un amas de béton posé au bord de la mer, il faut répondre, sans scrupules : « Vous avez parfaitement raison. Il ne faut pas y aller ». Il y a ainsi quelques chances que vous puissiez encore trouver de la place sur des plages de calanques qui n’ont rien à envier à la Crête. D’ailleurs, sur le plan économique, les Grecs n’auront bientôt plus grand chose à envier à nos voisins espagnols. Le taux de chômage ibérique n’a jamais été aussi élevé, un actif sur quatre n’a pas d’emploi dans le pays.
La droite s’est laissée le temps de revenir au pouvoir pour ouvrir grand son parasol d’austérité, et sur les plages, barcelonaises et alentours  notamment, vous rencontrerez pas mal de jeunes catalans préférant rester sur leur serviette ou dans l’eau, plutôt que de trimer pour quatre ou six cents euros par mois. Dans le pays, le chômage frappe plus de 24% de la population active et plus de la moitié des 16-24 ans. Face à cette situation, désespérée pour certains, c’est le départ à l’étranger : « mon fils est parti cette année vivre en Italie » nous confie notre logeuse. « Et il s’y plait ? » lui demandai-je. « Il a un travail, c’est le principal, après… » me répond-elle, fataliste.
La dette publique a doublé en quatre ans. En cause notamment, une bulle immobilière qui a fini par éclater. Pour sonder l’état des lieux de cette récession, il faut une fois encore prendre du recul dans les villes moyennes de l’arrière-pays, en s’éloignant des côtes : des quartiers entiers aux immeubles vides, neufs et qui n’ont jamais été occupés jusqu’à présent. Dans les grandes cités, c’est pire. Des milliers de personnes issues de la classe moyenne y fuient la précarité et nourrissent un cortège récent mais grandissant de néoruraux. « C’est un phénomène en plein essor qui va s’accentuer à mesure que la situation économique ira en s’aggravant » commente un anthropologue catalan, interrogé par le Journal du Dimanche.
Tout cela, la plupart des touristes, français ou autres, ne le voient pas. Ils continuent de faire leur shopping dans les rues de Figueras et trouvent toutefois  que « tout a augmenté ».  Dans les bars et restaurants, les prix varient parfois du simple au double, un litre de Gazole à quatre-vingt dix centimes voilà deux ou trois ans, s’affiche maintenant à un euro soixante. « Ça ne vaut plus autant le coup qu’avant » me confie une vacancière habituée du coin. Signe des temps, comme en France, le débat sur l’ouverture des commerces le dimanche, au moins en zone touristique, a fait débat ici. Figueras a tenté l’expérience, sans succès pour l’instant.
Retour sur la plage. Sur le parking, c’est la ronde des gros 4X4 et autres berlines allemandes des classes supérieures barcelonaises descendues pour le long et Saint week-end du 15 août. La crise n’a pas encore terrassé tout le monde au pays de Cervantès.
Patrick Noviello

26 Août

Damien Hennique, retour de La Rochelle

Retour de La Rochelle. Entre Bordeaux et Montauban, Damien Hennique livre, au téléphone, ses impressions sur une Université d’été qui vient juste de s’achever. L’animateur du Mouvement des Jeunes Socialistes du Tarn-et-Garonne est en voiture. Ce n’est pas son premier « aller-retour » en Charente-Maritime. Depuis 2009, il se rend, tous les ans, à la grand-messe estivale des socialistes. La cuvée 2012 a une saveur particulière. « Cela fait très longtemps que le PS n’a pas été dans cette ambiance ». La victoire de François Hollande et le succès des législatives sont dans tous les esprits. « Les militants sont heureux ». Néanmoins, le ciel n’est pas totalement bleu. « L’enthousiasme n’est pas excessif. La crise est là ». De ses discussions dans les couloirs ou au café, Damien Hennique retient un état d’esprit général. Ses camarades sont convaincus d’une chose : « pas de droit à l’erreur ». Les mots « rassemblement » et « discipline » reviennent, en boucle, dans de nombreuses bouches. La ratification, fin septembre, du Traité Européen est au cœur des préoccupations. Les socialistes ont encore en mémoire les déchirures internes autour du TCE. Ils ne veulent pas revivre cette guerre des roses. Aussi les députés tentés par le « non » ont été rappelés à l’ordre. Aucun vote socialiste ne doit manquer à l’appel. L’autre sujet qui alimente les discussions est la succession de Martine Aubry. Damien Hennique évoque « des conclaves dans les cafés de La Rochelle ». Le nom de Jean-Christophe Cambadélis circule. Celui d’Harlem Désir également. D’après le jeune responsable socialiste, ce dernier est « bien placé ».

LD

Anne Laperrouze : « impossible de payer »

Aux portes de la Montagne Noire, sur une colline dominant la plaine du Lauragais, Puylaurens est à la confluence de deux géographies. Le village est également au centre d’un dossier autoroutier. Situé à 50 kilomètres de Toulouse et 25 kilomètres de Castres, Puylaurens est sur le tracé d’une éventuelle infrastructure reliant la sous-préfecture tarnaise à la capitale régionale. Son maire – Anne Laperrouze – est également est cœur du projet. Elle a été la première à s’opposer à une concession autoroutière. Dans un Sud du Tarn marqué profondément par l’influence de Pierre Fabre, cette attitude lui a valu quelques désagréments. Principal employeur de la région, figure phare du milieu économico-politique, le patron d’un des plus grands laboratoires pharmaceutiques français est un ardent défenseur du projet autoroutier. Sans lui, l’idée serait restée dans les cartons. Puissant dans le Tarn, influent à Paris, Pierre Fabre s’exprime peu dans les médias. Mais, en fait, c’est lui le véritable prometteur de l’autoroute. L’industriel castrais a l’oreille des ministres et il peut s’appuyer sur les élus locaux. Face à cette puissance de feu, Anne Laperrouze a longtemps été un « sniper ». Depuis quelques mois, les opposants sont plus nombreux et une salve de critiques résonne sur la place publique. Mais, pendant longtemps, l’ancienne députée européenne – proche de François Bayrou – est montée seule au front.  « Dès le début de l’enquête publique, (elle) a toujours privilégié l’aménagement de la RN 126 ». D’après elle, c’est « la seule formule permettant d’irriguer le territoire et notamment les bourgs traversés ». Ingénieur de formation, Anne Laperrouze a travaillé, dans une autre vie, pour une industrie mazamétaine. Le problème de l’enclavement du Sud tarnais, l’absence d’une liaison rapide et sure entre Castres et Toulouse, elle l’a vécu, concrètement, au quotidien. Cette expérience professionnelle lui a légué une obsession : l’aménagement du territoire. Or, d’après elle, une autoroute concédée ne va pas dans cette direction. Le seul maillon entre le territoire et l’autoroute est un échangeur. L’usager doit souvent faire des kilomètres pour en trouver un. Et, entre deux échangeurs, c’est un mur de bitume. Pour contourner l’obstacle, ce sont des litres d’essence et un dédale de chemins vicinaux. En fait « l’autoroute est juste un corridor avec quelques portes d’entrées ». Des portes d’entrées, des échangeurs dont le coût – entre 25 et 30 millions d’euros l’unité – limite le nombre. De plus, l’autoroute induit des coûts indirects. Des coûts, des dépenses entièrement à la charge des collectivités locales. Anne Laperrouze pense notamment aux conséquences sur sa commune. La construction d’une autoroute impose la création d’une déviation. Anne Laperrouze estime le montant de ce chantier à « environ 3 millions d’euros ». Elle le dit sans nuance : « impossible de payer ».

LD

24 Août

Sous le soleil : la crise ! volet 2 des Carnets de vacances de Patrick Noviello

Sous le soleil : la crise ! (2)
A l’heure où le gouvernement fait sa rentrée avec un programme de lutte contre la crise, cette série d’été vous emmène à la rencontre des français en vacances (dont je suis en ce mois d’août) et à la rencontre de leurs modes de consommation estivales.
Pas une enquête statistique exhaustive mais plutôt des instantanés pris sur le vif.

En route vers l’Espagne
L’avantage chez nos voisins ibériques, c’est que certains loueurs n’imposent pas forcément une réservation du samedi au samedi, un bon début de stratégie pour éviter les traditionnels bouchons, du moins si tout se passe bien.
Arrivés sur l’A9, à hauteur de Sigean, un panneau lumineux indique « Voitures : sortie 43 ». Qui a dit que le style télégraphique avait été abandonné en France ? Le temps de réfléchir à cette formule pour le moins laconique et nous voilà parvenus à Perpignan et déjà englués dans ce que la radio des autoroutes appelle ironiquement un « embêtement ». Difficile de faire plus diplomatique pour une radio financée par la société privée qui a la concession de ce qui n’est plus désormais qu’une piètre « deux fois deux voies » bien peu améliorée depuis son inauguration sous Giscard.
Pour plus d’informations, nous changeons de fréquence et passons chez nos confrères de France Bleue Languedoc Roussillon où la consigne est on ne peut plus claire : « Si vous circulez en direction de l’Espagne sur l’A9, quittez l’autoroute dès que vous le pouvez ! Un accident qui a mis en causes plusieurs véhicules dont un poids-lourds couché sur la chaussée occasionne de gros bouchons ».
Un camion sur le flanc arrive donc à paralyser un axe majeur de circulation du territoire. Il va falloir organiser au plus vite une émission sur le thème du ferroutage, d’autant que, le long du ruban de bitume, la future  ligne grande vitesse Barcelone-Perpignan est aussi neuve que déserte.
Cap sur la sortie 41 et une situation cataclysmique sur la Nationale où bon nombre de conducteurs ont dû suivre les consignes de la radio locale publique. Retour sur la fréquence des autoroutes qui envoie allègrement les naufragés sur les aires de repos où ils auront tout le loisir de réaliser des dépenses imprévues en restauration et autres achats divers et variés de spécialités locales ou pas.
Pour notre part, nous cherchons en vain, un petit restaurant local pour y faire une halte mais les enseignes franchisées ont cannibalisé les bords de nos routes pour y servir des plats qui ne sont plus préparés mais simplement décongelés ou au mieux réchauffés, et ça pour le même prix. A regret donc, cap sur la zone commerciale de Perpignan-sud et la brasserie d’un centre commercial. Parmi les consommateurs accoudés au bar, difficile de savoir qui va prendre un vrai repas même si les prix restent ici raisonnables.
A la télé, on passe les infos régionales mais les gens se parlent, se connaissent même pour beaucoup : une communauté humaine crée sur un territoire totalement artificiel, entièrement consacré au consumérisme et aux derniers emplois industriels du coin. Difficile encore de savoir parmi cette clientèle qui ne partira pas en vacances. Quelques artisans débarquent sur les coups de midi trente, la pause s’impose, dehors le thermomètre dépasse les 35 degrés à l’ombre.
Après une addition de soixante euros, somme toute raisonnable pour un couple avec trois enfants, nous reprenons la route vers l’infranchissable Perthus, toujours par l’itinéraire Bis. Et les choses se compliquent sur la voie de contournement du Boulou, arrêt total. Nous mettrons une heure pour parcourir deux kilomètres. Notre véhicule est bloqué à droite par un muret central en béton et à gauche par cette satanée voie LGV toujours aussi vide. Au loin, on aperçoit l’autoroute à l’asphyxie en direction de l’Espagne.
Il est temps d’abandonner l’itinéraire Bis et de pénétrer un peu plus dans les chemins de traverse. Nous laissons donc là le flot incessant de véhicules sur un double constat :  1- Ce trafic, pour un lundi du mois d’août, atteste bien qu’une majorité d’européens (néerlandais, belges, allemands, britanniques, français…) partent encore en vacances en voitures malgré la crise et un litre de diesel à plus d’un euro cinquante. 2- Nos infrastructures routières frontalières sont moyenâgeuses en cas d’incident surtout quand nos gendarmes sont en congés et n’y assurent pas la circulation.
C’est donc parti pour un itinéraire ter et une autre France encore, à la fois celle d’un arrière-pays, celle d’une zone frontalière nichée à travers montagnes et pinèdes. Après Amélie-Les-Bains, la route commence à monter sévèrement, devant nous un camping-car néerlandais toutes options piloté au GPS. Aujourd’hui plus grand monde n’avance sans être géo localisé, le mal du siècle pour certains (dont l’auteur de ces lignes), une bouée de sauvetage doublée d’une grande avancée  technologique pour d’autres.
A un peu moins de deux heures de l’après-midi, les terrasses de café vivent, prouvant ainsi que ces villages ont encore une âme et plus pragmatiquement de l’activité économique. En contemplant les usines désaffectées qui bordent la départementale, on aurait pu penser le contraire. Le tracé est sinueux mais agréable dans un paysage de carte postale, très touristique, les bouchons en moins. Pourtant ce panorama va changer du tout au tout à peine la frontière franchie.
Sur la route de Figueres, une fois traversé  le bourg de Tapis, place à la désolation et une odeur âcre qui vous pique la gorge. A perte de vue des pins calcinés, vestiges des derniers incendies. L’activité économique est en tout lieu toujours suffisamment forte pour permettre à un mégot mal éteint de brûler plusieurs milliers d’hectares de forêt.
Patrick Noviello

Sous le soleil : la crise ! volet 1 des Carnets des Vacances de Patrick Noviello

Sous le soleil : la crise !
A l’heure où le gouvernement fait sa rentrée avec un programme de lutte contre la crise, cette série d’été vous emmène à la rencontre des français en vacances (dont je suis en ce mois d’août) et à la rencontre de leurs modes de consommation estivales.

Pas une enquête statistique exhaustive mais plutôt des instantanés pris sur le vif.

Loudenvielle (Hautes-Pyréneés), fin juillet.
Les Prix au sommet
Dans un ciel bleu limpide, au-dessus du lac de Génos, les parapentes défilent à la queue leu leu. La passion a un prix plutôt élevé mais n’en parlez pas à ces amateurs de sensations fortes et de panoramas imprenables. Non loin de l’aire d’atterrissage, les jeux gonflables d’un parc d’attraction ne désemplissent pas et là le tarif s’affiche clairement : huit euros de l’heure. Mieux vaut ne pas avoir de famille nombreuse pour s’envoyer en l’air.
Pas mal d’ados préfèrent s’adonner aux joies gratuites du street  basket ou du beach volley, certains y passeront l’après-midi, à l’ombre d’un bâtiment imposant, celui du centre thermo ludique local. On dirait qu’ici la crise n’existe pas. Chaque matin, une imposante file de touristes y attend l’ouverture, qui pour s’y baigner en famille, qui pour un Spa, qui pour un soin. « Le soins c’est le top » s’enthousiasme une mère de famille. A trente euros, les vingt minutes de massage, il vaut mieux.
Pour ceux qui ne sont pas fans de piscines à bulles et préfèrent le patrimoine ou les us et coutumes locaux, direction le moulin de Saoussas. La propriétaire des lieux explique tout sur les métiers d’autrefois dans les Pyrénées, le tout pour quatre euros par adulte. Dans son moulin à eau qui fait tourner meule à farine et scierie, elle a entreposé un pan d’histoire du coin. Et la dame ne compte pas son temps pour expliquer aux curieux de passage comment se transportait l’huile d’Espagne en France dans des outres géantes ou encore comment on battait et fauchait le blé sans aucune machine mécanique.
« Comment vous avez fait pour avoir tous ces objets, ça doit coûter de l’argent, non ? » s’exclame un gamin un peu hors-sujet. « Avec mon mari, c’était notre seul luxe de se les acheter. Parfois j’aurais aimé aller au cinéma ou changer de paire de lunettes, mais non, on préférait agrandir notre collection » lui répond la guide des lieux, sans se démonter.
A la sortie du site, pas d’attrape-touriste ou autre marmotte en peluche qui siffle, en revanche une échoppe est associée au moulin. On y vend des produits locaux. Un quinquagénaire y dévore des yeux les fromages vache ou brebis. Son épouse le rappelle immédiatement à la raison : « N’y pense pas, c’est trop cher ». Les étiquettes affichent pourtant des tarifs raisonnables mais cette année plus que jamais, chacun surveille ses dépenses. Le couple de randonneur s’en va sans se retourner, Monsieur devra sans doute se contenter d’un bout de Comté ou de Cantal (pas très pyrénéen tout ça) acheté à la superette.
Cette dernière ne désemplit pas. Enseigne de grande distribution associée à la montagne, elle accompagne ses clients tout au long de l’année. Les prix affichés en rayon sont toutefois loin de ceux exposés dans les hyper de la même marque. De toute façon, autochtone ou vacancier, personne n’a le choix, dans le village il n’y pas d’autre épicerie donc pas de cas de conscience à avoir si vous vouliez faire travailler le commerce local. Une seule chance pour se rattraper « le mini-marché » artisanal, une fois par semaine en fin d’après-midi, sur la place de l’office de tourisme. Sympathique mais pas de quoi nourrir son randonneur à la semaine.
Commerces toujours, à 20 kilomètres de là, la grande avenue qui mène aux thermes de Luchon, charrie sa foule habituelle en cette fin juillet. Les badauds pénètrent toutefois peu dans les boutiques, qui, pour certaines, ont étendu la période des soldes pour écouler quelques fins de séries aux clients de passage. Les terrasses de café, en revanche, font le plein en cette fin de matinée contrairement aux restaurants qui peinent à faire leurs chiffres des grandes saisons, et ce n’est certainement pas la faute aux régimes imposés aux curistes. Désormais, chacun se serre la ceinture pour d’autres raisons que l’entretien de sa ligne.
Retour en vallée du Louron, la nuit tombe sur Loudenvielle et avec elle, une légère brume qui rase et parfois engloutit les sommets environnants. Les lumières commencent à s’allumer dans les résidences mais nombre d’appartements restent dans l’obscurité. « Cette année, c’est difficile » me confie une responsable d’agence immobilière. « Les propriétaires préfèrent ne pas louer du tout que baisser les prix ou d’accueillir une famille pour deux ou trois jours plutôt qu’une semaine voire une quinzaine ». Dans la maison voisine de la mienne, résonnent des cris de nombreux enfants : la bâtisse a été louée par trois familles en même temps. A 800 euros la semaine, c’est plus économique mais aussi plus chaleureux.
Patrick Noviello