Un maillot de bain fait bouillir l’actualité. L’interdiction du Burkini est le sujet chaud de l’été 2016. Des municipalités prennent des arrêtés qui finissent devant les tribunaux. Le premier ministre, Manuel Valls, et sa ministre de l’Education, Najat Vallaud-Belkacem, se déchirent publiquement et frontalement sur le sujet. Quelques centimes de tissus recouvrent l’horizon politico-mediatique et la région Occitanie n’échappe pas à cette ébullition.
Dans l’Aude, un maire est tombé dans le grand bain des arrêtés anti-burkini. Mais, à plus de 200 kilomètres du littoral méditerranéen, le débat est également arrivé sur les berges de la Garonne.
La seule plage toulousaine ne borde pas de l’eau salée. C’est celle du lac de Ramée. Mais la question du Burkini s’est tout de même posée. Le maire de la Ville Rose, Jean-Moudenc reprend (à la syllabe près) les mots utilisés, le mercredi par Nicolas Sarkozy lors de son passage sur le plateau de TF1 : « un acte militant et politique et qui reléve de la provocation« .
Néanmoins, Jean-Luc Moudenc ne s’aligne pas sur la position de son collègue de Leucate. Dans les colonnes de l’hebdomadaire toulousain, La Voix du Midi, le maire de Toulouse déclare avoir « des doutes sur la pertinence de prendre un arrêté anti-Burkini« . Jean-Luc Moudenc pointe « un contexte d’incertitude juridique« . Pour le premier magistrat de la première métropole d’Occitanie « prendre un arrêté annulé par la suite (ndlr par la justice administrative) serait contre-productif, puisque les partisans de ce geste militant y verraient le triomphe de leurs provocations ».
Il serait plus judicieux de légiférer plutôt que de laisser les maires se débrouiller avec les arrêtés municipaux
La députée (LR) de la Haute-Garonne, Laurence Arribagé, partage l’analyse du maire de Toulouse. La parlementaire ne souhaite pas déposer une proposition de loi. Contactée par France 3 Midi-Pyrénées, elle déclare : « il serait plus judicieux de légiférer plutôt que de laisser les maires se débrouiller avec les arrêtés municipaux. Je pense qu’il est du rôle de l’Etat d’agir sur ses questions« .
En fait, la solution peut venir non pas du Palais Bourbon et des député(e)s mais du Palais-Royal et du juge administratif. Le Conseil d’Etat vient de se prononcer, ce vendredi 26 août, sur la légalité de l’un des arrêtés adopté cet été. La haute juridiction administrative censure l’interdiction édictée par le maire de Villeneuve-Loubet :
Les mesures de police que le maire d’une commune du littoral édicte en vue de réglementer l’accès à la plage et la pratique de la baignade doivent donc être adaptées, nécessaires et proportionnées au regard des seules nécessités de l’ordre public. Il n’appartient pas au maire de se fonder sur d’autres considérations.
Le Conseil d’Etat estime qu’un arrêté anti-Burkini ne peut être fondé sur le principe de laïcité. La décision du juge laisse une marge d’appréciation aux maires. Mais seule une atteinte à l’ordre public (risque de violence ou de trouble) peut juridiquement justifier une interdiction du port du Burkini. Cette position clarifie les choses. Mais le dossier est loin d’être clos. Il s’invite dans la campagne des présidentielles. Nicolas Sarkozy plaide pour une loi interdisant le port de signe religieux à l’école, à l’université, dans les administrations et les entreprises. L’ancien chef de l’Etat n’a pas formellement cité les lieux de baignade. Mais, en cas de victoire de l’ancien de chef de l’Etat en 2017, le Burkini pourrait faire l’objet d’un débat parlementaire. L’adoption d’une loi permettrait de « casser » la jurisprudence du Conseil d’Etat et offrirait l’occasion à Laurence Arribagé de passer des paroles aux actes.
Cette semaine, Laurence Arribagé a déclaré son soutien à Nicolas Sarkozy. Un soutien rendu public avant la décision du Conseil d’Etat mais qui trouve, dans l’affaire du Burkini, une raison supplémentaire de s’exprimer.
Laurent Dubois (@laurentdub)