C’est une des vedettes du dernier remaniement gouvernemental. Avec Emmanuelle Cosse et ses collègues « écolos », Jean-Michel Baylet partage le podium des nominations les plus commentées. Comme pour les « entrants » écologistes, le ton est souvent ironique et même franchement cinglant. Mais peu importe la volée de bois vert. Jean-Michel Baylet retrouve les projecteurs de la politique nationale.
Comment ce retour est-il vécu dans le Tarn-et-Garonne ?
Pour Jean-Michel Baylet, le Tarn-et-Garonne, c’est un peu l’enfer et le paradis sur terre. C’est un « paradis » électoral et plus de trente ans de mandats : maire, député, sénateur, président du département. Mais c’est également le territoire qui lui a infligé ses deux plus cuisants revers : la perte de son siège sénatorial et du conseil départemental.
Comment les élus et les responsables politiques du département, vivent-ils le « come-back » ministériel de Jean-Michel Baylet ?
Réponse sous forme de réactions.
La première est publique. Elle émane de l’adversaire politique de Jean-Michel Baylet, Brigitte Barèges. Enfin « adversaire politique », l‘expression est peut-être trop forte ou du moins plus vraiment d’actualité. La maire de Montauban a multiplié, ses dernières années, les attaques contre le PDG de la Dépêche du Midi.
Le journal de Jean-Michel Baylet a longtemps été la cible favorite de l’édile de la droite tarn-et-garonnaise. Mais, le département bruisse d’un accord tacite entre les deux anciens « meilleurs ennemis ». Le rédacteur en chef de l’édition locale du quotidien de Jean-Michel Baylet aurait porté ses lettres de créances à l’Hotel de Ville. Et, surtout, un vote commun au sein du conseil départemental (lors du vote d’une décision modificative du budget) traduirait cette alliance. Une alliance « contre nature » qui reposerait sur une hostilité commune envers le nouveau président du département, Christian Astruc.
En tout cas, une chose est certaine. Brigitte Barèges accueille la nomination de Jean-Michel Baylet sans tir de boulet rouge. Son communiqué de presse n’est pas sympathique. La tonalité est critique. Mais on est loin d’une pluie acide. D’autres élus sont beaucoup moins compréhensifs.
Evidemment, l’expression est beaucoup plus libre en OFF que dans un communiqué de presse.
Mais, de droite à gauche, les propos tenus sont loin d’avoir la « douceur » du texte de Brigitte Barèges. Un responsable de gauche déclare : « les derniers soubresauts sont toujours les plus e…(NDLR ceux de Jean-Michel Baylet). Dans le landerneau, tout le monde se marre. Jean-Michel Baylet qui a tanné la réforme des collectivités et qui devient ministre de ces mêmes collectivités. C’est la semaine du carnaval et c’est du grand carnaval ».
Pour un élu de droite, « c’est un mélange de moquerie et d’indifférence. Mais on croise également des gens qui disent « vous voyez, on vous l’avait dit, il n’est pas encore mort ». Il y a une peur. Que Baylet se venge et que le département le paye ».
Un élu de gauche partage cette crainte : » Sylvia Pinel, vice-présidente à la Région et Jean-Michel Baylet ministre des Collectivités, on risque de subir une vengeance et de voir le département passer à la trappe« . Drôle d’ambiance. Certains territoires vivent une nomination ministérielle comme une chance. Un ministre à Paris, ce sont des portes qui s’ouvrent plus facilement et des dossiers qui avancent plus rapidement.
Mais, dans le Tarn-et-Garonne (seul département de Languedoc Roussillon Midi Pyrénées a avoir un représentant au conseil des ministres), ce sont les craintes qui l’emportent largement sur l’enthousiasme ou les calculs d’opportunités. Jean-Michel Baylet s’est retiré du paysage politique tarn-et-garonnais. La rancoeur est sans frontière. Mais a priori le nouveau ministre fait sa vie en dehors de son ancien fief. Plusieurs témoignages concordent.
« Cela fait des mois que Baylet ne met plus dans le Tarn-et-Garonne. On ne le voit pas dans les manifestations et les événements du département. Mais, en même temps, il n’a plus vraiment de titre pour le faire. Il est un simple conseiller départemental et en dehors de son canton de Valence d’Agen il n’a pas de raison de sillonner le département ».
« Il est membre de la commission des finances au conseil départemental mais il n’a assisté à aucune réunion. Il vient juste aux « plénières » (NDLR réunion trimestrielle du conseil départemental) ».
Pour un élu de gauche, la discrétion de Jean-Michel Baylet n’est pas simplement conjoncturelle. Elle traduit la fin d’une époque « La nomination de Jean-Michel Baylet ne lui remet pas le pied à l’étrier dans le département. Il sait qu’il ne redeviendra plus jamais président du département. Il n’y a pas de marche arrière. Christian Astruc (NDRL actuel président) a désormais une majorité. Jean-Michel Baylet qui fait trembler tout le monde, c’est fini. La page est tournée« .
Un élu modère : « Baylet va revenir avec carrosse blanc et chevaux ». Un autre va dans le même sens : « Baylet a désormais son bâton de Maréchal avec son ministère mais il ne va pas laisser tomber Sylvia Pinel (NDLR ancienne ministre du Logement) qui, elle, revient sur sa circonscription et redevient députée. Il va être là tous les week-ends. En plus, il compte bien dézinguer Christian Astruc (NDRL président du conseil départemental et « tombeur » de Jean-Michel Baylet à la présidence du département) et mettre les bâtons dans les roues de Valérie Rabault (NDRL députée PS du Tarn-et-Garonne) ».
Samedi dernier, le 13 février, Jean-Michel Baylet était à 700 km de Montauban. Le nouveau ministre a assisté à « France-Irlande ». Mais, que ce soit dans la tribune du Stade de France ou dans le Tarn-et-Garonne, Jean-Michel Baylet revient dans le match. Reste à savoir s’il va jouer simplement l’arbitre ou entrer carrément dans la mêlée.
Laurent Dubois (@laurentdub)