Le feuilleton de l’été ne survivra pas à l’automne. Depuis la fin juillet, le PS est empêtré dans la polémique de la « Loi Alary-Pinel ». L’annonce d’une réforme législative pour créer un poste de « président délégué » a soulevé une tempête politico-médiatique. Visiblement, le projet est enterré.
Vendredi dernier, Sylvia Pinel lance un pavé dans la mare. La ministre radicale prend ses distances avec la « présidence déléguée ». Immédiatement, cela fait tourner le sang des socialistes gardois et de certains parlementaires. Un député PS déclare : « c’est incroyable, c’est une ministre qui laisse sous entendre que son parti pourrait ne pas voter un texte soutenu par le gouvernement ».
D’autres réactions sont plus désabusées.
D’après des responsables socialistes, Sylvia Pinel a compris que le projet est mort. Elle dresse (implicitement) l’acte de décès. Cette version est (visiblement) la bonne.
D’après nos informations, Martin Malvy est catégorique. A plusieurs de ses interlocuteurs, il a annoncé ouvertement : «ça ne passera jamais ». Le président de Midi-Pyrénées est bien placé pour le savoir. Il a une ligne directe avec le président des Régions de France. Son homologue aquitain, Alain Rousset, ne cache pas son opposition et même son agacement par rapport à une réforme législative « parachutée » en plein été.
Au delà des propos, il y a les faits.
La création d’une présidence déléguée suppose et impose le dépôt d’un projet ou d’une proposition de loi. Le gouvernement ou un parlementaire doit déposer un texte sur le bureau de l’une des deux chambres.
Au Palais-Bourbon, le groupe PS se réunit mercredi prochain, le 15 septembre. Aucune trace de la « présidence déléguée » dans la liste des textes prévus. Un séminaire de groupe doit se tenir du 21 au 23 septembre. Les députés socialistes n’ont pas encore reçus le programme. Mais, d’après les parlementaires consultés, il n’existe aucune information ou indice permettant de penser que la « présidence déléguée » va être mise au menu.
Ordre du jour de la réunion du groupe députés PS
Du côté du Sénat, les socialistes sont minoritaires. Il serait surprenant que la proposition émane d’une assemblée dont la majorité est ouvertement hostile. De plus, les sénateurs contactés (au nombre de 4, 3 de gauche et 1 de droite) affirment ne pas avoir entendu parler d’une proposition sur la « présidence déléguée ».
Enfin, s’agissant du gouvernement et d’un éventuel projet de loi, c’est clair et précis. Aucun texte sur la présidence déléguée jusqu’au 9 octobre. Cette date est d’ailleurs déterminante et plaide pour un abandon. En effet, moins de deux mois avant le 1er tour des régionales, il est improbable que le gouvernement se lance dans un chantier houleux qui parasiterait la campagne de ses candidats.
Vu l’hostilité farouche des sénateurs (un parlementaire Républicain dit : « les orgues de Staline sont prêtes » NDLR : Nom d’un lance roquettes multiple soviétique), le débat va s’éterniser et s’enliser. Attendre la mi-octobre est plus qu’imprudent.
Dans les prochaines semaines, il va falloir surveiller l’agenda des assemblées et de Matignon. Manuel Valls s’est engagé personnellement et publiquement sur le dossier.
Une reculade serait un vrai camouflet. Il est toujours possible que le gouvernement veuille sauver les apparences. Mais plus le temps passe et plus un enterrement est probable.
Laurent Dubois