Dans le collimateur des buralistes : le paquet de cigarettes neutre. Des opérations pour protester ont déjà débuté en province dont hier en Haute-Garonne , dans le Lot et le Tarn où des radars ont été recouverts. Mercredi plusieurs milliers de commerçants se réuniront devant le Sénat dont la commission sanitaire et sociale va discuter du projet du ministère de la santé. Entretien avec Gérard Vidal, leader des buralistes de Midi-Pyrénées.
Qu’est-ce qui vous dérange dans la mise en place de ce paquet neutre ?
C’est une disposition européenne qui prendra effet à partir de 2020. On l’accepte. Seulement Marisol Touraine veut la mettre en application en France dès mai 2016. On serait alors les seuls en Europe. Que va-t-il alors se passer quand on sait qu’un paquet vendu sur quatre l’est déjà hors réseau officiel ?
Hier vous avez recouvert un radar sur la route d’Andorre, est-ce que d’autres opérations de ce type sont prévues dans les jours qui viennent ?
Cette nuit des radars du Lot et du Tarn ont également été bâchés. Mercredi, nous serons entre quatre et cinq-mille devant le Sénat dont la commission sanitaire et sociale va discuter du projet du ministère de la santé. Enfin, les discussions parlementaires reprendront au Sénat le 8 septembre prochain. Nous passerons la nuit précédente devant les Préfectures.
Le Président de la chambre syndicale du Grand Paris a déclaré : « le gouvernement ne sait entendre que des mouvements où l’on casse tout ». Partagez-vous son point de vue ?
Non. On n’a jamais rien cassé. On est des préposés à l’administration. On a un traité de gérance avec l’Etat. Même si depuis 2003 les ministres des services publics successifs nous promettent de nouvelles prérogatives que nous n’avons pas. Aujourd’hui par exemple, on peut acheter directement de chez soi par ordinateur un timbre fiscal.
Quel regard portez-vous, coïncidence de calendrier ou pas, sur la conférence ministérielle internationale de lutte contre le tabagisme qui s’ouvre aujourd’hui à Paris ?
C’est pour passer en force au Sénat que Marisol Touraine fait ça. Mais regardez, il n’y a quasiment aucun pays européen autour de la table : pas d’Allemagne, de Belgique, de Luxembourg, d’Italie ou encore d’Espagne. Les allemands n’ont pas les paquets neutres et pourtant la consommation a baissé chez eux. Marisol Touraine prend l’exemple de l’Australie. Mais c’est une île ! La problématique de la contrebande n’y est forcément pas la même. Nos gouvernements n’ont jamais su faire en matière de prévention. Ce n’est pas en nous détruisant qu’ils vont améliorer la santé des citoyens.
La proposition de ce député socialiste d’augmenter de 10% la rémunération des buralistes…. Une bonne solution pour sauver la profession ?
C’est un des solutions. Aujourd’hui nous percevons 7% sur un paquet, insuffisant pour pouvoir s’en sortir. 10% en plus serait un minimum. Et encore que pour les plus gros débitants… Mais ils ne sont que 2 à 3000 sur 25000 buralistes au total
Justement, est-ce que certains de vos collègues sont plus menacés que d’autres ? Entre les gros points de vente et les plus petits ?
Ceux qui disparaissent sont ceux qui sont implantés en zone rurale. Ils étaient bien souvent le dernier commerce du village. Les autres débitants très exposés sont les frontaliers évidemment. 1413 commerces ont fermé l’an dernier et en dix ans nous en avons perdu dix-mille.
Que demandez-vous aujourd’hui au gouvernement ?
Tout d’abord une véritable politique de prévention pour que les jeunes ne se mettent pas au tabac. Même si de toute façon, nous, les jeunes on ne les voit plus. Ils s’alimentent souvent directement devant leur lycée.
Ensuite, ce que nous attendons du gouvernement, c’est une harmonisation européenne. Un paquet coûte un euro dans les pays de l’est et trois euros en Andorre.
Propos recueillis par Patrick Noviello.