Le Conseil d’Etat se prononcera, dans les prochains jours, sur l’annulation de l’élection de Dominique Reynié. Pour le moment, seules les conclusions du rapporteur public penchent vers la « mort électorale » de la tête de liste aux régionales 2016. Mais, dans les rangs de l’opposition régionale, le couperet est déjà tombé. La succession est ouverte et de nombreux élus sonnent l’hallali.
Mercredi 18 mai à 14h07, Dominique Reynié envoie un mail à tous ses conseillers régionaux. Le président du groupe de la droite et du centre informe ses collègues que le rapporteur du Conseil d’Etat demande l’annulation de son élection. Dominique Reynié est au courant depuis 48 heures. Comme tous les justiciables, il dispose d’un accès au logiciel Sagace. Un logiciel qui permet de suivre, en temps réel, l’avancement d’un dossier devant la plus haute juridiction administrative française et qui mentionne le sens des conclusions du rapporteur. Mais Dominique Reynié attend le début de l’audience publique pour livrer l’information aux conseillers régionaux de son groupe.
A priori l’information est capitale. Mais elle n’est pas décisive. En octobre 2014, le rapporteur du Conseil d’Etat demande inéligibilité de la maire de Montauban et…ne l’obtient pas. Le juge administratif donne raison à Brigitte Barèges contre l’avis de son rapporteur. Ce précédent pourrait inciter les élus régionaux à la prudence ou du moins à une certaine réserve. Mais ce n’est vraiment pas le cas. Comme le déclare un responsable de la droite régionale : « le corps n’est pas refroidi et ils se jettent sur la dépouille« .
Certains « camarades » de Dominique Reynié lui font ouvertement les poches. Les téléphones chauffent et la présidence de groupe n’est pas le seul objet de convoitise. Le fauteuil de Dominique Reynié en Commission Permanente aiguise les appétits. Une place dans ce comité restreint rapporte 200 euros d’indemnités (mensuelles). Mais, au delà d’un supplément d’indemnité, cela permet de gagner du galon et de sortir du bataillon des conseillers régionaux de base. Lors de l’élection de la nouvelle assemblée régionale, Brigitte Barèges a d’ailleurs fortement insisté (sans succès) pour que son lieutenant à la mairie de Montauban, Thierry Deville intègre la CP. De même, Gérard Trémège n’a toujours pas digéré son « exclusion » de la Commission Permanente pour cause de répartition des sièges avec les ex-languedociens. L’intervention du Conseil d’Etat offre aux déçus d’hier une chance de récupérer leur dû.
Evidemment, c’est la présidence de Dominique Reynié qui attise le plus d’ambitions. L’élection du politologue à la tête du groupe a été chaotique. De piètres résultats électoraux (une troisième place derrière le FN) et une campagne brouillonne ont suscité des envies de dissidence (avec la création d’un groupe UDI) et des velléités de sédition. Désormais, après l’audience du Conseil d’Etat, une partie des élus régionaux bascule ouvertement dans la succession.
Le maire de la Grande-Motte, Stéphan Rossignol est, selon plusieurs sources, dans les starting-blocks. Toujours du côté des ex-languedociens, Christophe Rivenq (directeur de cabinet du maire de Nîmes et conseiller régional) est cité parmi les candidats potentiels. Bernard Carayon, le maire de Lavaur, pourrait également entrer dans la course. Une candidature de Vincent Terrail-Novès circule également. Mais le principal intéressé dément : « je n’ai nullement l’intention d’être candidat à une quelconque responsabilité« .
Toutes ces grandes manœuvres et petits calculs peuvent paraître prématurées. Mais, comme le précise un élu régional, « on tourne la page. Il y a 90% de chance que le Conseil d’Etat suive le rapporteur. Nous le savons tous. Pour nous la page est tournée et je pense que pour Dominique Reynié c’est pareil. Le fait qu’il ne participe plus aux séances du conseil régional, c’est une préparation psychologique ».
Les instances nationales du parti de Dominique Reynié sont sur la même ligne. « Sa vie politique est terminée. S’il souhaitait demander une circonscription pour les législatives ce n’est même pas la peine d’essayer. En même temps, c’était cuit avant l’intervention du Conseil d’Etat » déclare un responsable des Républicains. D’ailleurs, la « mauvaise » nouvelle venue du Palais Royal (siège du Conseil d’Etat) n’est pas une surprise. Selon nos informations, une semaine avant l’audience au Palais-Royal, Nicolas Sarkozy estimait (ouvertement) que les jours de Dominique Reynié au conseil régional étaient comptés.
La rapidité avec laquelle les instances régionales et nationales des Républicains enterrent Dominique Reynié peut surprendre. Pour comprendre, il faut se rappeler des relations houleuses entre Nicolas Sarkozy et Dominique Reynié. Au niveau régional, Dominique Reynié a lancé lui-même le requiem. L’annonce de son absence lors des prochaines séances du conseil régional résonne comme une anticipation de la décision du Conseil d’Etat.
Laurent Dubois (@laurentdub)