L’Assemblée des Départements de France désormais dirigée par une majorité de droite emmenée par Dominique Bussereau lance une campagne d’affichage pour dénoncer la montée des charges et la baisse des dotations de l’Etat. L’ADF demande 300 millions d’euros pour « sauver » une quarantaine de départements. Sinon quoi ? « Demain, les départements ne pourront plus payer le RSA », « Demain les départements ne pourront plus assurer les aides à domiciles » assène la campagne d’affichage lancée par l’association. Alors info ou intox ? L’avis de quelques Présidents de Département d’Occitanie.
Pour Philippe Martin, Président du Conseil Départemental du Gers et ancien Ministre de François Hollande, « la ficelle est grosse ». « Je n’oublie pas que c’est en 2004 que Raffarin a transféré le RSA aux Départements. Ce qui aurait dû être pris en charge par la solidarité nationale ». Et le député socialiste de ne pas se rappeler qu’entre 2004 et 2012, les élus de droite aient demandé à l’Etat de reprendre la main. « Sous Sarkozy, une réflexion avait pourtant été lancée quant à une péréquation nationale pour les bénéficiaires du RSA et de l’APA » nuance Jean-Claude Luche. Le président UDI de l’Aveyron pense toutefois lui aussi que le RSA devrait « être recentralisé comme l’APA (Allocation Personnalisée Autonomie)».
Pour le Président socialiste de l’Aude André Viola, « il est tout de même un peu curieux de tout mettre sur le dos du gouvernement actuel ». « La campagne de mobilisation de l’ADF, par son calendrier – à la veille du congrès de l’ADF et à l’orée des primaires pour l’élection présidentielle – mais aussi par son ton et son caractère exagérément anxiogène apparaît clairement comme une démarche politicienne » affirme également Georges Méric, Président Socialiste du Conseil Départemental de Haute-Garonne.
Main tendue ou qui étrangle ?
Le groupe de gauche de l’ADF qui réunit 33 départements, et qu’André Viola préside, poursuit dans un communiqué : « Par posture politique, une majorité de départements de droite a refusé tout compromis. Ils ont ainsi fragilisé l’avenir des départements, préférant laisser perdurer l’injustice, quitte à laisser glisser certains territoires vers la faillite ».
« Manuel Valls est premier à avoir tendu la main aux départements pour entamer des discussions. La majorité de droite de l’ADF et Dominique Bussereau ont dit non » affirme Philippe Martin. « Valls fait des propositions qui ne se traduisent pas dans les faits. Il n’y a pas de traitement de fond. Une enveloppe exceptionnelle devrait être dégagée pour les départements en danger. On a l’impression que le gouvernement veut asphyxier les départements pour les supprimer » rétorque Jean-Claude Luche Président UDI de l’Aveyron.
Effet ciseaux et problème historique
De l’avis de tous pourtant, la situation est effectivement grave. « « Il est clair que l’exercice des Conseils départementaux, comme celui des autres collectivités, est rendu difficile en raison de la baisse des dotations de l’Etat, et du fameux effet ciseaux dû à la forte augmentation des dépenses sociales » analyse Georges Méric. « Un problème historique depuis que l’on a donné une certaine autonomie aux départements » explique Philippe Martin. Chez lui, dans le Gers, le nombre de personnes de plus de 80 ans est supérieur de 20% à la moyenne nationale, le tout sur des bases fiscales plus faibles. Alors pourquoi pas des dotations au cas par cas en fonction des données démographiques de chaque territoire ?
En Aveyron, on reconnaît que la situation n’est pas extraordinaire mais pas aussi grave que dans les départements qui ont un RSA lourd. « Une quarantaine » selon la direction de l’ADF. A noter toutefois que plus de dix départements à majorité de droite ne se sont pas associés à cette campagne d’affichage. « L’Aveyron s’est associé à la démarche par solidarité » explique Jean-Claude Luche. « J’attends que l’Etat arrête de baisser ses dotations. Dans notre département nous dépensons 70 millions par an pour l’Allocation Personnalisée Autonomie sur 360 millions de budget ».
Le gouvernement, de son côté, devrait faire de nouvelles propositions pour aider les collectivités territoriales, lors du congrès de l’Assemblée des Régions de France le 29 septembre prochain à Reims, comme lors de celui de l’ADF du 5 au 7 octobre à Poitiers. Ce dernier congrès s’annonce chaud, la fracture entre droite et gauche au sein de l’association étant consommée.
Patrick Noviello