Un pied en région et un autre au « national ». Christophe Borgel est député de la Haute-Garonne et numéro 3 du PS. La semaine dernière, c’est le parlementaire haut-garonnais qui est interpellé par l’abandon du prolongement de la ligne B du métro vers Labège. Cette semaine, c’est l’actualité nationale qui domine l’agenda politique de Christophe Borgel. Un séminaire doit se tenir à l’Assemblée Nationale le 8 mars. La veille des manifestations et des appels à la grève contre la réforme du code du travail, le gouvernement va essayer de ressouder une majorité socialiste déchirée par le projet Valls-El Khomri. Interview.
Le Blog Politique. Le maire de Toulouse, Jean-Luc Moudenc a confirmé l’abandon du fameux « PLB », le Projet de Prolongement de la Ligne B du métro vers Labèges. Vous demandez à Jean-Luc Moudenc de revenir sur sa décision. Pourquoi ?
Christophe Borgel. Le projet de prolongement est une nécessité économique. C’est un sujet qui touche au développement économique d’une zone qui englobe Labège mais aussi Ramonville et le parc technologique du Canal. Ce sont 20 000 salariés, 1 000 entreprises et des milliers d’étudiants. Un abandon va compromettre des projets d’installations de « start –up », des projets de développement concernant notamment le numérique. Mais l’enjeu n’est pas seulement économique. Un prolongement de la ligne B va améliorer les conditions de vie et de circulation des gens. D’ailleurs ce ne sont pas seulement les nombreux salariés et étudiants qui vivent et travaillent sur la zone de Labège qui sont concernés. Tous les jours ce sont 20 000 véhicules et 25 kilomètres de bouchon sur le tronçon du Palays (NDLR secteur limitrophe à l’embranchement autoroutier qui mène à Labège). Le prolongement du métro permet de décongestionner la circulation automobile et de limiter la pollution.
Le Blog Politique. Jean-Luc Moudenc propose une solution alternative : la création d’une 3eme ligne de métro avec une station « Labège Innopole ». Selon vous, cette solution n’est donc pas la bonne ?
Christophe Borgel. Le prolongement de la ligne B a fait l’objet d’une enquête publique. Le chantier est prêt à être lancé et des financements sont là. Pour la 3eme ligne de métro on nous parle de 2024. Ce n’est pas faire injure au prometteur du projet de dire que ce calendrier ne sera pas respecté. C’est le cas dans tous les dossiers du même genre. Il est impossible de garantir le calendrier. Le projet PLB est finalisé. S’agissant de la 3eme ligne de métro, on réfléchi encore au tracé. Sur le fond, la création d’une seule station à Labège n’est pas du tout à la hauteur des enjeux économiques et de gestion du trafic automobile.
Le Blog Politique. L’adjoint aux Finances de Jean-Luc Moudenc, Sacha Briand rappelle que l’abandon du PLB a été décidé par l’ancien maire de Toulouse, le socialiste Pierre Cohen en 2008.
Christophe Borgel. Je ne rentre pas là dedans. 2008, c’était il y a 8 ans. On peut toujours faire l’exégèse des problèmes. Mais aujourd’hui ce n’est vraiment pas le sujet. Comme toujours Sacha Briand est sur une ligne dure et essaie de nous emmener sur le terrain d’une polémique politicienne. Ce n’est pas à la mesure des attentes et des besoins de la population.
Le Blog Politique. On change de sujet. La semaine va être cruciale à l’Assemblée Nationale. Le groupe parlementaire PS est divisé et on peut se demander s’il existe une majorité pour voter le projet défendu par Manuel Valls. Quelle est votre position ? Vous soutenez le gouvernement ?
Christophe Borgel. Je me félicite du report de 15 jours de la présentation du projet de loi en conseil des ministres. Les députés ont obtenu la création d’un séminaire. Un séminaire qui va se dérouler en deux temps : le 8 mars et le 14 mars. Cela va permettre d’échanger. Le gouvernement est dans une position de dialogue. Il n’est pas dans le « ça passe ou ça casse ». Le gouvernement n’est pas dans une position bloquée.
Le Blog Politique. Sur le fond, vous êtes favorable à une refonte du code du travail ?
Christophe Borgel. Le débat se focalise sur les prud’hommes et les ruptures de contrat. Je suis dans une démarche pragmatique. Il faut tenir compte des réalités, de l’évolution du marché du travail et de l’économie. Les carrières professionnelles ont évolué. Les salariés vivent des évolutions professionnelles voulues ou subies parce que des boîtes ferment. Il faut remplacer des protections devenues obsolètes par de nouvelles protections. Il faut entrer dans le débat avec pragmatisme. Quand j’entends que l’on revient que l’on revient au XIXe siècle. Je sais que nous sommes dans un pays qui aime les mots qui claquent et les grandes phrases. Mais au XIXe siècle le grand débat c’était le travail des enfants.
Le Blog Politique. Selon vous, le projet qui a fuité dans la presse contient des positifs ? Et lesquels ?
Christophe Borgel. Un renforcement de la lutte contre les travailleurs détachés et un important chapitre sur la santé au travail mais aussi le compte personnel d’activité. De même on renforce le dialogue social au niveau des entreprises. Cela ne me choque pas du tout. Au contraire. On ne doit pas avoir peut du dialogue au sein des entreprises.
Le Blog Politique. Cette semaine étudiants, syndicats et salariés vont manifester. Redoutez-vous que la rue impose sa loi et que les manifestations conduisent à un enterrement du projet ?
Christophe Borgel. Les manifestations sont une forme d’expression. Je pense que l’on ne peut pas se permettre de rien faire. Une réforme est nécessaire. Le but est de s’adapter au nouveau monde du travail en donnant plus de sécurité et de liberté aux entreprises et aux salariés. L’immobilisme n’est pas une solution.
Le Blog Politique. Face à la contestation, Manuel Valls dispose d’une arme absolue : l’article 49.3. Cette disposition constitutionnelle permet de passer en force. Selon vous, l’utilisation de cette arme « nucléaire » est-elle une solution ?
Christophe Borgel. Le 49-3 fait partie de la Constitution. Sa première utilisation remonte au vote de la loi Macron et on ne peut pas dire que le Parlement n’a pas pu débattre. Prononcer le mot 49-3 n’a rien d’abominable. Actuellement nous sommes dans une phase de dialogue et de discussion. C’est une phase normale. Même si cela passe par une tension au sens physique du terme entre l’exécutif et le Parlement.
Propos recueillis par Laurent Dubois (@laurentdub)