21 Jan

Un conseiller régional version grande région, combien ça coûte ?

« Cela va coûter un bras ». « Le coût des déplacements va exploser ». Ces phrases reviennent en boucle dans la bouche des nouveaux conseillers régionaux. A droite comme à gauche, le constat est unanime. Les frais liés au mandat des élus régionaux vont flamber. Remboursement des déplacements, prise en charge des repas et des nuits d’hôtels. La Grande Région est au format XXL en terme de superficie (72 754 km2) et de population (6 millions d’habitants). La masse (inédite) des 158 super-conseillers régionaux va-t-elle être un gouffre financier ? Réponse en chiffres.

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Lundi 18 janvier, la Nouvelle Assemblée Régionale a voté une délibération portant sur « les indemnités de déplacements et remboursement des frais d’élus ». Le texte comporte cinq articles. Pas de chiffres. Uniquement un renvoi à un décret du 3 juillet 2006. Un décret qui s’appliquait à la précédente mandature.

Frais de déplacements : l’effet multiplicateur d’une Région XXL.

Les nouveaux conseillers régionaux vont avaler du bitume. Les Assemblées Plénière (AP) et la Commission Permanente (CP) doivent se dérouler à Montpellier. Les élus vont être sur les routes (4 fois par an pour les AP, 1 fois par mois pour les CP). Mais, de manière plus ou moins régulière, les conseillers régionaux siègent dans des milliers d’organismes extérieurs. Dans les lycées, la participation aux conseils d’administrations est bimensuelle. Certains élus représentent également la présidente dans leur département. Rentrée solennelle du Tribunal de Grande Instance dans le Comminges. Conférence publique sur les déserts médicaux en Lozère…

Impossible de connaître (pour le moment) la masse de tous les remboursements kilométriques. Carole Delga s’est engagée à faire une évaluation globale sur le coût de la Fusion. On va attendre le détail s’agissant des déplacements. Mais on peut avoir un ordre d’idée.

  • Un conseiller régional, élu dans un des départements les plus éloignés de Montpellier, le Gers percevra pour se rendre en CP ou AP  : 221,90 euros pour un aller-retour. Pour un an de mandat (4 AP + 10 CP) , les remboursements s’élèveront à 3 106, 60 euros. Sur l’ensemble du mandat (6 ans) la facture représentera 18 639, 60 euros. Cette somme est calculée sur la base d’un barème établi à partir des chevaux fiscaux du véhicule (0,25 centimes d’euros pour 5 cv et moins, 0,32 entre 6 et 7 cv, 0,35 pour 8 cv et plus).
  • Un conseiller régional toulousain sera indemnisé à la hauteur de 165,90 euros pour un aller-retour. En un an de mandat cela coûtera aux caisses régionales 2 322, 60 euros et 13 935,60 sur l’ensemble de la mandature. Comme dans l’exemple gersois, le calcul est basé sur une fourchette haute : un véhicule de 8 CV fiscaux.
  • La taille de la nouvelle région et la fusion-délocalisation ne va évidemment engendrer pas des coûts supplémentaires que pour les Midi-Pyrénéens. Pour les Languedociens, les distances et les montants des remboursements (calculée sur la base du trajet domicile-hôtel de Région) sont les mêmes.

Frais d’hébergement : un nouveau poste de dépense.

Lors des mandats précédents, les nuits d’hôtels étaient rares. Elles vont être la règle avant ou après chaque Assemblée Plénière et Commission Permanente. Les Assemblées Plénières débutent vers 10 heures et peuvent durer tard dans la nuit. Le décret du 3 juillet 2006 fixe un forfait : 60 euros par nuit. Les conseillers régionaux peuvent toujours profiter des Assemblées Plénières ou des Commissions Permanentes pour cultiver leur gout des jaccuzi et du mobilier design. Mais ils devront ajouter le complément de leur poche.

Selon nos informations, la nouvelle Assemblée Régionale va siéger au Parc des Expositions ou au Corum. L’hémicycle montpelliérain est trop petit pour accueillir les 158 nouveaux conseillers régionaux. Des travaux couteraient dans les 15 millions d’euros. Impossible de vendre cette facture à une opinion publique chatouilleuse sur les dépenses publiques.

Photo AFP

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C’est une bonne nouvelle pour les conseillers régionaux midi-pyrénéens. Le quartier du Parc des Expos fourmille d’hôtels abordables. Avec des nuits entre 58 et 70 euros. Un célèbre site de réservations propose même un charmant endroit pour… 45 euros.

Petite précision pas forcément inutile. Les remboursements sont effectués sur la base de factures et de frais réellement engagés. Les conseillers régionaux qui compteraient (en toute innocence bien-sûr) empocher la différence entre le forfait de 60 euros et une chambre moins chère en seront (normalement) de leurs frais. Les services de la Région sont censés veiller au grain.

Petite compensation, « dans le cadre des mandats spéciaux, les frais d’hébergement et de repas les sommes engagées ne (doivent) pas présent(er) un montant manifestement excessif ». Dixit la délibération votée le 18 janvier. « Montant manifestement excessif ».Tout est relatif. Une bouteille de « Château Petrus » à moins de 3 000 euros, c’est vraiment bon marché. Une délibération de l’Assemblée doit valider le remboursement. Il faut espérer que le laxisme des uns ne couvrira les dérapages des autres.

Les repas : banquet géant à petit prix

Les conseillers régionaux vont devoir relancer leur glycémie. Une Assemblée Plénière, c’est long. Vu la seconde Plénière et l’acharnement du Front National, il va falloir des vitamines à la majorité régionale. Peut être également des sucres lents pour affronter les remous dans ses rangs. En toute hypothèse, les besoins nutritionnels vont devoir rentrer dans un forfait de 15,25 euros.

Une Assemblée Plénière ou une Commission Permanente coûtera, du coté des fourchettes et des couteaux 2 409, 50 euros, soit 33 733 euros par an et 202 398 euros sur les 6 ans du mandat.

Les fins gourmets vont devoir faire preuve de débroullardise ou du sens de la négociation. A un tel tarif, on peut trouver une bonne table. Mais il faut chercher. Ou alors connaître le chef et le convaincre de faire une ristourne. Petit détail. Le généreux restaurateur ne doit pas avoir de lien avec la Région (fournisseur..). Sinon le goût risque d’être amer et la facture salée : une prise illégale d’intérêt.

Laurent Dubois (@laurentdub)