On a beaucoup glosé sur la décision de Dominique Reynié de maintenir sa liste au second tour, malgré sa troisième position à l’issue du premier tour. Son score (18,81 %) est le plus faible de France pour une liste du centre et de la droite et le risque d’une élection du candidat FN en Languedoc-Roussillon est réel.
Une position de « ni retrait, ni fusion », validée par le président des Républicains, Nicolas Sarkozy et le bureau politique du parti lundi matin.
Mais la vraie question qui mérite d’être posée est la suivante : en maintenant sa liste, Dominique Reynié ne favorise-t-il pas en fait la liste de gauche de Carole Delga et n’enlève-t-il une forte réserve de voix au candidat du FN Louis Aliot ?
« Le front républicain favorise l’élection du FN quand il veut l’empêcher« , a expliqué Dominique Reynié à l’AFP, « la pire des idées serait de se retirer et de fusionner avec les socialistes« . Un point de vue qui se discute, si l’on en croit les sondages en PACA et dans le Nord-Pas de Calais Picardie, là où le PS s’est retiré, qui annoncent une victoire des candidats de droite face au FN.
« En se maintenant, Reynié en apparence défavorise la gauche », explique Emmanuel Négrier, directeur de recherche au CNRS et consultant politologue pour France 3 Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées. « Mais en réalité c’est peut-être exactement l’inverse : il permet de conserver dans le camp de la droite des électeurs qui, en son absence, seraient allés voter FN »
Même point de vue pour Luc Chatel, conseiller politique de Nicolas Sarkozy et ancien ministre qui a affirmé sur Public Sénat et Sud radio que le retrait de M. Reynié aurait été « sans doute le meilleur moyen de faire élire le Front national ».
« Les réserves de voix de Louis Aliot, explique le politologue de France 3 Laurent Dubois, ne sont pas dans son propre camp où il a déjà fait le plein. Il sait qu’il doit aller chercher des voix chez les électeurs de la droite traditionnelle qui soit se sont abstenus, soit savent désormais que Dominique Reynié ne peut pas battre la gauche. C’est pour cela que dans le débat que nous avons diffusé mercredi il ne s’en prend pas à Reynié mais directement à Delga pour endosser l’habit du seul recours contre la gauche ».
En clair, nombreux sont ceux qui pensent que le retrait de Dominique Reynié aurait ouvert un boulevard pour une partie de ses électeurs du premier tour qui se seraient reportés sur Louis Aliot (FN), alors seul à pouvoir battre la gauche et les socialistes.
« Mes réserves de voix se trouvent chez M. Reynié », juge lui-même Louis Aliot. Mais pour la tête de liste du Front National, le maintien du candidat des Républicains n’est pas si grave, car il espère ouvertement siphoner ses voix au second tour « Le maintien de Dominique Reynié n’est peut-être pas le handicap qui a été décrit par beaucoup de politologues, dit-il. Des pans entiers se reporteront sur nos listes ».
Reste la question morale, évoquée par des ténors de la droite comme Jean-Pierre Raffarin ou le président de l’UDI, Jean-Christophe Lagarde. Une option balayée par Dominique Reynié et Nicolas Sarkozy.
Dimanche, au soir du second tour, Dominique Reynié n’aura peut-être pas gagné les élections mais si le Front National est battu, il aura, d’une certaine manière, participé à une sorte de front républicain, par défaut.
Fabrice Valéry (avec AFP)