Menaces de vote sanction contre l’actuelle majorité socialiste, appel à l’alternance, ombre du FN sur le scrutin. N’est-il pas temps de se poser les bonnes questions ?
Voilà que l’on nous fait d’une Cantonale partielle, un évènement majeur. Je parle évidemment de celle de Brignoles, dans le Var, pour ceux qui rentreraient d’un voyage de quinze jours au Groenland et ne seraient pas au courant. Quoi ? Le FN peut emporter une élection locale partielle avec 5000 voix ? Eh bien oui. Ce n’est pas une première et sûrement pas une dernière.
Les analystes de notre belle et palpitante vie politique n’ont pas attendu les résultats définitifs pour s’emparer du dossier. La mèche avait été allumée dès le premier tour. J’aurais bien aimé avoir autant d’échos et de téléspectateurs au moment où Laurent Dubois et moi-même, essayions d’expliquer les enjeux des dernières cantonales et à quoi sert un conseil général.
Brignoles et après ?
Donc les analyses sur l’effet Brignoles se multiplient mais pour nous dire quoi ? Principalement que le FN pourrait jouer un rôle majeur dans les prochaines Municipales et majoritairement dans les communes de moins de 3000 habitants. Mais ce parti a-t-il envie de gérer des petites villes ou des villages ? Eux-mêmes, j’en suis sûr, sont bien conscients qu’ils n’en auraient pas les forces vives. Mais le prochain scrutin est une caisse de résonnance formidable pour les Marinistes. Quant au suivant ? « Front National : le premier parti de France aux Européennes de juin » selon un sondage IFOP pour le Nouvel Observateur. Au nom de quoi ? Sur quels critères ? Décidément, le FN fait vendre du papier et des sondages.
Et puis nous sommes dans un pays qui aime bien se faire peur : « Imaginez si les frontistes entraient en force dans les Conseils Municipaux à la faveur du nouveau mode de scrutin ! », « Imaginez si la droite se décide à faire alliance dans l’entre-deux tours, comme ça, ni vu ni connu, avec des candidats sans étiquette mais qui seraient à la solde du FN ! », « Imaginez si telle ou telle commune venait à être conquise ! » et si, et si…
Hommes ou étiquette ?
« Pour qui et pourquoi vont voter les électeurs » reste sans aucun doute les seules questions qui vaillent d’être posées. N’est-il pas rabâché que pour des Municipales plus que pour toute autre élection, le citoyen vote pour un homme ou une femme qu’il connaît de près ou de loin, plutôt que pour une étiquette. Oui mais par exemple à Toulouse, quel nouvel arrivant connaît Cohen, Moudenc, Maurice, De Veyrac…. et Laroze.
Je ne suis pas de ceux qui pensent que le FN puisse figurer au second tour à Toulouse. Et Serge Laroze, le candidat frontiste, n’y croit d’ailleurs pas lui-même à vrai dire ou tout du moins la dernière fois que je l’ai eu au téléphone, il ne m’en a pas convaincu. Mais ailleurs qu’à Toulouse ? Dans les villes préfectures, les communes moyennes ou même dans les campagnes où les dernières Législatives ont été teintées d’un bleu très foncé sur certaines circonscriptions ?
Contestation et alternative
Là encore certains s’inquiètent, lancent des incantations menaçantes comme cette tête de liste socialiste désigné dans le Tarn et Garonne qui prédit un grand risque F.N à Moissac. D’autres ne voudraient pas que, l’année du centenaire de la mort de Jaurès, ses terres tarnaises plébiscitent le parti de Marine Le Pen. Des listes se préparent à Saint-Benoît de Carmaux et Carmaux.
Mais pourquoi utiliser le bulletin FN alors ? Pour contester, faire-valoir sa déception de « l’UMPS » comme on dit chez les frontistes ? Pour une alternative ? Pour changer ? Pour bien voir ce qu’ils seront capables de faire que n’ont pas réalisé les parti traditionnels (en dehors des sempiternels thèmes de la sécurité et de l’émigration) ? Les trottoirs seront-ils plus propres repeints en bleu marine ? Les routes seront-elles moins embouteillées ? Les impôts locaux vont-ils baisser ?
Parce que les véritables problématiques de ces élections, ce sont celles-là. Une vague plus ou moins bleue foncée au soir du 30 mars prochain ne renversera pas le gouvernement. François Hollande restera à l’Elysée jusqu’en 2017 et se représentera dans la foulée (je dis ça pour les impatients de droite comme de gauche).
En revanche :
- si vous vous demandez pourquoi vous avez encore écrasé une déjection canine alors que vous leviez les yeux au ciel pour compter les étages de l’immeuble qui se construit en face de chez vous,
- si vous vous rendez-compte qu’une heure de stationnement en centre-ville coûte désormais un euro cinquante mais qu’il y a plus de pistes cyclables ou encore que votre bus passe plus fréquemment qu’avant et qu’il est plus confortable,
là vous pourrez vous demander pour qui et pourquoi vous allez voté le 23 mars prochain.
Patrick Noviello