Il avait 13 ans, c’était en mai 2009, un vendredi. Sa prof de math l’avait obligé à rester en classe réaliser un travail qu’il n’avait pas fait. Il lui a demandé de revenir sur cette décision, elle a refusé, il l’a poignardée. 13 ans, c’est jeune pour devenir un meurtrier… Heureusement les secours ont sauvé l’enseignante. Mais l’irréparable a été commis. Ce geste et cette violence resteront gravés à jamais, pour l’un comme pour l’autre des protagonistes.
La victime a repris l’enseignement voilà deux ans et l’on imagine quel chemin elle a du faire pour se retrouver à nouveau devant une classe. Et lui ? Ce gamin au couteau ? Etablissement pénitentiaire pour mineur, un puis deux centres éducatifs fermés et aujourd’hui un établissement de placement éducatif, voici son parcours, la fin définitive de l’enfance, une jeunesse broyée.
Le procès s’est tenu lundi au Tribunal de Grande Instance de Toulouse. Que pouvait-il amener au fond ? La victime n’a semble-t-il pas eu de réponses à ses questions. Selon un expert « à cet âge-là, on est en dehors du réel ». Alors comment juger un tel acte ? Quelle réponse peut amener la justice ? Ce gamin n’était pas, parait-il, un élève à problème. Pas de signaux d’alerte donc, impossible d’incriminer là une mauvaise politique de prévention. L’audience a été longue, la défense a plaidé, tard dans la nuit, comme pour sonder l’insondable, comme si les mots avaient encore quelque chose à signifier quand on parle d’imprévu ou d’inexplicable. Le jugement a été rendu mardi à trois heures du matin : cinq ans de prison dont deux ans fermes.
« Le tribunal a ouvert la possibilité de l’aménagement de la peine évitant l’incarcération » explique l’avocat de la défense. La défense qui, comme la partie civile, ne veut pas voir à travers cette audience un procès symbole de la délinquance des mineurs ou de la violence scolaire. Alors justement, au-delà de cette affaire et de cette décision, que fait-on pour lutter contre un tel acte, ou mieux, le prévenir ? 25 assistants de prévention et de sécurité ont été recrutés dans l’académie, tout droit sortis du programme de campagne présidentiel. Parce qu’il n’y a pas de petits profits, un assureur bien connu des enseignants a même sorti une clause « agression physique ».
Côté politique, Christiane Taubira a annoncé dès le mois de mai son intention de supprimer les tribunaux correctionnels pour mineurs instaurés sous la majorité précédente pour « redonner à la justice des mineurs sa spécificité ». Les anciens tribunaux pour enfants resteront donc les seuls à pouvoir juger les 16-18 ans. L’individualisation et l’atténuation de la peine liée à la minorité sont aussi deux objectifs majeurs pour la Garde des Sceaux. Face à ces recommandations, l’UMP a alors dénoncé un « retour de l’angélisme et de la culture de l’excuse ».
Les juges, eux, semblent soutenir majoritairement la ministre de la justice et rejettent toute accusation de « laxisme ». Après tout, ce sont bien eux qui auront l’avenir de ces jeunes délinquants entre leur main. Christiane Taubira l’a bien compris en ne leur adressant que de simples « recommandations ». C’est bel et bien à eux de juger.