02 Avr

Covid-19 et état d’urgence : Arnaud Viala veut un « Parlement 2.0 »

Le député LR de l’Aveyron a déposé une proposition de loi constitutionnelle. Son objectif : que les parlementaires puissent participer à tous les travaux à distance via un système sécurisé.

Arnaud Viala, député L.R de l’Aveyron à l’Assemblée Nationale en février dernier. Photo Vincent Isore/IP3 MaxPPP

L’initiative est partie d’un « fort sentiment de frustration ». « Moi, j’étais candidat pour retourner siéger à Paris. Mais il y a eu des restrictions. Vous le voyez bien, maintenant c’est un député par groupe » soupire Arnaud Viala.

Un problème de fonctionnement institutionnel grave »

Pour lui il est paradoxal qu’on n’ait pas les moyens de faire fonctionner le Parlement au moment où on en a le plus besoin. « Ça m’évoque un problème de fonctionnement institutionnel grave » affirme-t-il sans détour. « Le Conseil des Ministres, lui, se tient bien par visioconférence » rappelle-t-il. Et de conclure : « Nous sommes certes dans une situation exceptionnelle, mais imaginez que la Seine en crue se mette à inonder le Palais Bourbon. C’est déjà arrivé par le passé. Où se réunirait-on alors ? Rien n’est prévu. »

Sollicité par ses soins, la Présidence de l’Assemblée réfléchirait selon lui à des solutions palliatives pour le court terme. « Ça a été le cas ce mercredi pour la mission d’information. Elle était accessible par tous les députés via un code sécurisé » nous explique-t-on au cabinet de la présidence de l’Assemblée Nationale. « Les commissions peuvent également se réunir ainsi » complète ce même cabinet.

Obligé de toucher à la Constitution ? »

Mais Arnaud Viala, lui, souhaiterait voir le système se généraliser pour tous les débats afin que l’Assemblée puisse retravailler au complet. Mais faut-il pour en arriver là une proposition de loi constitutionnelle ? « J’aurais voulu ne pas toucher à la Constitution mais selon les experts juridiques que j’ai consultés, on y est obligé » précise l’élu aveyronnais.

L’unique article de cette proposition de loi dit ceci : « Lorsqu’une situation exceptionnelle empêche les parlementaires de se réunir, le Parlement peut exercer ses pouvoirs à distance ».

Pour l’heure, loin d’Arnaud Viala, l’idée de prêter de mauvaises intentions à l’exécutif. « Mais imaginez qu’on se retrouve demain dans une telle situation avec un gouvernement moins républicain au pouvoir… » prévient-il.

Patrick Noviello (@patnoviello)

 

 

 

01 Avr

Covid-19 et gestion de la crise : maires battus mais toujours en première ligne

Ils ont perdu dès le soir du premier tour des élections municipales le 15 mars dernier, mais ils sont toujours en poste. Comment vivent-ils cette position si particulière ? Leur motivation est-elle intacte ? Et leurs adversaires vainqueurs dans tout ça ?

Photo MaxPPP Julio Pelaez

« Ce premier tour n’aurait jamais dû avoir lieu ! » Plus il y repense, plus il en est persuadé. Jean-Paul Raynaud n‘en démord pas. Pour le (toujours) maire de Saint-Juéry dans le Tarn « la démocratie locale a été impactée ». Selon l’élu Divers Gauche, ce sont près de 1250 votants qui auraient manqué à l’appel sur sa commune qui compte six fois plus d’habitants.

Un autre maire battu partage cette analyse d’un scrutin faussé par le coronavirus. « On a clairement été empêché » affirme Bruno Costes. Le maire LR de Pibrac, en Haute-Garonne, estime que toute sa fin de campagne a été impactée.

« Nous devions assurer en tant qu’élus la gestion de cette crise sanitaire, et contrairement à certains de nos adversaires nous avons préféré annuler nos réunions publiques ». Lui estime les votants de plus de 65 ans de sa commune à environ 2000 personnes. Autant d’électeurs probablement dissuadés par les annonces d’Edouard Philippe le vendredi précédent le scrutin selon lui.

On est passé à autre chose »

« Ceci dit, nous en sommes là. Et la seule chose qui compte maintenant, c’est de rendre le meilleur service à notre population dans cette crise » assène Jean-Paul Raynaud, un brin fataliste. Accompagnement des personnes isolées via le CCAS, éventuelle réouverture de la crèche pour les enfants de personnel soignants, cellule de veille téléphonique trois jours par semaine et une présence physique quotidienne à la mairie, voilà de quoi l’occuper. « Et lundi prochain, nous tiendrons un bureau municipal par conférence téléphonique » annonce l’élu tarnais.

« On est passé à autre chose » reconnaît également Bruno Costes. Le maire de Pibrac assure être dans « une gestion de crise au plus près des habitants ». « On ne sait pas combien de temps ça peut durer. On a réorganisé tous nos services en conséquence pour aider les plus vulnérables et nous efforcer de créer une solidarité ».

Et leurs adversaires vainqueurs dans tout ça ?

« Aucun contact ! C’est quelqu’un que je ne connais pas, que j’ai dû croiser trois ou quatre fois » évacue Jean-Paul Raynaud, sans acrimonie pour David Donnez, avant de livrer le fond de sa pensée. « Moi, je crois que dans cette période-là, il ne faut pas tout mélanger. Je travaille avec mes huit adjoints. Si on vient rajouter de nouvelles personnes avec qui on n’aura pas forcément la même vision, on sera moins efficace » se justifie le maire de Saint-Juéry.

« Camille Pouponneau m’appelle » reconnaît Bruno Costes à Pibrac. « Mais les responsables c’est nous ! » prévient-il dans la foulée. « Ce sont les maires et les adjoints en place qui ont la capacité à gérer cette crise. Or quand une majorité change, il y a toujours une période d’incertitude et de l’inexpérience. L’important actuellement c’est qu’il n’y ait pas d’interférence. Chacun à sa place » recadre le maire de Pibrac.

Et après ?

« Je n’y pense pas vraiment » assure Jean-Paul Raynaud. A demi-mot, il avoue qu’il s’était finalement habitué à ne plus être maire et à pouvoir souffler. « Mais aucune date butoir n’est fixée. Et c’est bien normal vue la situation. Tout ne reprendra pas du jour au lendemain » reconnaît-il. « Notre prolongation est due à cette crise, on le sait. C’est pour ça que je ne m’avancerai pas dans la suite de la gestion de la mairie » prévient-il.

L’après ? La question ne se pose pas non plus pour Bruno Costes. « Moi je faisais partie de ces maires qui travaillaient » clame-t-il sans détour. L’homme occupe un poste aux affaires institutionnelles chez Airbus doublé d’une mission importante à l’AFNOR. « J’y pilote toute la stratégie normative pour la France. Nous nous sommes notamment mobilisés pour aider les sociétés qui fabriquent aujourd’hui des masques alors qu’elles ne le faisaient pas jusqu’à présent » précise-t-il avec fierté.

Oubliera-t-il pour autant son mandat de maire une fois la crise sanitaire passée ? « Sous réserve que les élections ne soient pas annulées… » conclue-t-il.

Patrick Noviello (@patnoviello)

Carnet de confinement (3) : la confiance règne…

Peut-on encore parler politique par les temps qui courent ? Plus que jamais. C’est l’objet de cette chronique.

Conférence de presse du Premier Ministre et du Ministre de la Santé le 28 mars dernier à Paris (Photo Geoffroy Van Der Hasselt/AFP.

Selon un sondage commandé la semaine dernière par France Info, plus d’un citoyen sur deux estiment que le gouvernement n’a pas pris la mesure de la gravité de la situation. Et ils sont près de 8 sur 10 à considérer que l’exécutif ne sait pas où il va. Paradoxe à relever, ce dimanche, le JDD, lui, publiait un autre sondage dans lequel la côte de popularité d’Emmanuel Macron bondit de 11 points et celle de son Premier Ministre de 6.

Une méfiance contagieuse

En période difficile, plus que jamais, la France se cherche peut-être un ou des Hommes providentiels… Enfin, et je m’arrêterai là pour les sondages, une dernière étude, elle, annonce que plus d’un quart des Français sont persuadés que le Covid-19 a été fabriqué en laboratoire. Bref la méfiance semble, elle aussi, contagieuse.

D’ailleurs plus le temps passe, plus l’union sacrée qui semblait se dessiner autour de l’état d’urgence sanitaire se fissure. La Ligue des Droits de l’Homme par exemple surveille la police après le vote du Parlement. « La Cellule de veille urgence sanitaire de Toulouse regrette l’installation d’un climat de défiance et d’une logique de répression, en lieu et place d’une réelle volonté d’apaisement et de pédagogie » explique son antenne locale dans un communiqué.

« En raison des restrictions drastiques apportées à nos libertés fondamentales dans la situation actuelle, la section de Toulouse de la Ligue des droits de l’Homme entend maintenir une vigilance rigoureuse à l’égard des mesures et décisions prises par les pouvoirs publics. Elle a en conséquence décidé de mettre en place une cellule de veille pour collecter toutes informations relatives à des mesures et décisions qui ne respecteraient pas scrupuleusement ces principes » poursuit la LDH.

(A nouveau) médecin malgré lui

Alors en qui avoir encore confiance ? La médecine ? Même là tout est contesté, jusqu’aux procédures elles-mêmes. L’appel de Philippe Douste-Blazy en atteste. L’ancien maire de Toulouse est aussi membre de la fondation de l’IHU de Marseille où l’infectiologue Didier Raoult a lancé des essais cliniques de traitement du Covid19 par chloroquine.

Philippe Douste-Blazy qui vient de renfiler sa blouse à Garche, lance un appel au Président de la République et au Ministre de la Santé pour l’utilisation de ce traitement. « Nous n’avons pas le temps d’attendre des essais cliniques qui seraient parfaits certes, mais qui arriveraient beaucoup trop tard pour beaucoup trop de malades ».

A l’opposé, le chef du service des maladies infectieuses au CHU de Toulouse est beaucoup plus mesuré. « Il y a eu un emballement très important sur des données virologiques de l’équipe de Marseille de niveau de preuve faible, cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas d’intérêt mais cela veut dire que la démonstration est insuffisante pour l’instant » relativise le professeur Pierre Delobel.

Une grève et ça repart ?

Pas facile dans ce climat ambiant de défiance de rester un confiné serein. D’autant que le redémarrage ne s’annonce pas des plus guillerets. La CGT Service-Public a déposé un préavis de grève d’un mois en avril « contre les mesures antisociales de l’état d’urgence sanitaire », une façon aussi de rappeler que la réforme des retraites n’a pas eu le temps d’être adoptée.

« La situation de crise sanitaire ne doit pas servir à affaiblir les droits et protections des salariés. Au contraire, elle met en avant que rien ne sera plus comme avant et qu’il est plus que jamais urgent de donner satisfaction aux revendications des travailleuses et des travailleurs » précisent dans un communiqué la CGT Haute-Garonne, FSU et l’Union Syndicale Solidaire

Une fin de confinement qui démarrerait par une grève… Comme si la vie pourrait reprendre comme avant ? Je crois que je deviens méfiant moi aussi…

Patrick Noviello (@patnoviello)