A près les Municipales et avant elles, les Législatives, voici Sandra Torremocha à nouveau en campagne, toujours pour « faire entendre le camps des travailleurs » comme l’indique l’intitulé complet de sa liste. Elle tiendra ce soir à 20h30 une réunion publique, salle du sénéchal à Toulouse.
Pourquoi êtes-vous candidate ?
Sandra Torremocha : Nous voulons permettre aux travailleurs qui ne se résignent pas à subir la politique du patronat et du gouvernement, de faire entendre leur voix et leurs exigences. Il n’y a aucune raison d’accepter que l’emploi et le salaire, c’est-à-dire ce qui fait la vie de la majorité de la population, soient des variables d’ajustement plutôt que les profits des capitalistes et des banquiers comme les dividendes des actionnaires.
Il faut affirmer la nécessité de l’interdiction des licenciements pour ne pas aggraver le chômage, la répartition du travail entre tous sans diminution de salaire, l’augmentation générale des salaires et des pensions et leur indexation sur la hausse des prix, le contrôle des travailleurs et de la population sur la marche de l’économie et pour commencer la levée du secret des affaires.
C’est le programme de Lutte Ouvrière, un programme pour les luttes des travailleurs. Car aucune institution, quelle soit européenne ou nationale n’accordera ces mesures d’urgence pour enrayer le développement de la précarité et de la pauvreté pour la majorité de la population.
À quoi doit servir l’Europe et son parlement selon vous ?
S.T : Comme le parlement français, le parlement européen ne protégera en rien les conditions de vie et de travail des couches populaires. La construction européenne n’a été que le laborieux marchandage entre les différents états européens pour permettre à leurs capitalistes de jouer dans la cour des grands, et faire face à la concurrence des États-Unis. L’Union Européenne a été conçue et créée par et pour les intérêts des groupes capitalistes. En 60 ans de construction, rien n’a avancé sur le terrain des droits démocratiques et sociaux : il n’a jamais été question de créer un espace où les salaires, les droits sociaux, même les droits des femmes, soient alignés vers le haut.
Les institutions européennes ne sont rien d’autre que les instruments de la domination du capital, mais comme le sont les institutions françaises. Il est stupide d’opposer les responsables de Bruxelles ou d’Europe à ceux de la France ! Ce sont les mêmes politiquement, voire ce sont les mêmes tout court ! Après 30 ans de construction, l’Union européenne ne comptait que 12 membres. Au bout de 60 ans, elle en compte 28 mais elle n’englobe toujours pas toute la moitié orientale de l’Europe, la Russie, l’Ukraine, la Biélorussie, sans parler de la Turquie. Et si des voix s’élèvent aujourd’hui, ce n’est pas pour élargir l’Europe, mais pour la rétrécir !
Même de son point de vue, même pour ses intérêts, la bourgeoisie est incapable de faire l’unité de l’Europe.
Pour unifier l’Europe, la délivrer du carcan capitaliste, il faudra détruire les États nationaux, il faudra une révolution. Seuls les travailleurs d’Europe, en prenant le pouvoir pourront exproprier les banquiers et les industriels. Seuls les travailleurs d’Europe pourront détruire la base du pouvoir de la bourgeoisie sur l’économie et sur la société, c’est-à-dire la propriété privée des moyens de production. Seuls les travailleurs d’Europe pourront construire le monde sans frontières intérieures et extérieures des États-Unis socialistes d’Europe.
S’il y avait un dossier prioritaire à traiter par le Parlement quel serait-il et comment le mener à bien ?
S.T :Le chômage et le pouvoir d’achat bien évidemment.
Mais pour imposer l’interdiction des licenciements, la répartition du travail sans perte de salaire, l’augmentation générale des salaires et des pensions, il faudra bien autre chose que des bavardages entre « partenaires sociaux » comme on dit, ou au Parlement européen, comme français d’ailleurs, il faudra que les travailleurs se battent pour arracher ce qui n’est pourtant qu’un minimum. Il faudra des luttes sociales générales, qui embrasent l’ensemble des catégories de travailleurs pour les imposer. Car effectivement il s’agit de s’en prendre à la dictature de la minorité bourgeoisie sur l’immense majorité de la population travailleuse. Et cette majorité de la société, les travailleurs, qui par son travail fait tourner la machine économique, doit également avoir des exigences sur la marche elle-même de l’économie.
On ne peut laisser le pouvoir de décision sur la machine économique à cette minorité d’irresponsables capitalistes qui condamnent la majorité à la crainte du lendemain.
Il faudra envahir les conseils d’administration des grandes sociétés bancaires ou industrielles qui régentent la société. Les envahir mais aussi les contrôler, ne serait-ce que, pour commencer, en supprimant le secret des affaires. Ces gens là et leurs serviteurs politiques ne parlent que de transparence, de démocratie. Mais dès que l’on s’approche un peu du vrai pouvoir, celui qui décide de la vraie vie, celle du travail, des emplois, du salaire, des profits, la démocratie et la transparence laissent la place aux secrets, aux mensonges par omission ou aux mensonges tout court. C’est la dictature revendiquée des vrais décideurs.
Alors il faudra également que les travailleurs imposent leur contrôle sur tout cela. Et on vérifiera par le menu ce que l’on sait déjà dans les grandes lignes : leur parasitisme sur l’ensemble de la société, leur rôle nuisible dans son développement et la nécessité de les exproprier.
Existe-t-il selon vous une identité européenne ? Et un sentiment d’appartenance à l’Europe ?
S.T : Pour les travailleurs il n’y a pas plus d’identité européenne que d’identité française. Ce qui identifie les hommes ce ne sont pas les cartes d’identité ou les frontières géographiques. Ce qui les opposent ce sont les frontières sociales, les frontières de classe qui divisent la société en exploités d’un côté et en exploiteurs de l’autre. Nous rejetons toute forme de nationalisme et de chauvinisme.
De l’extrême droite jusqu’au Front de gauche, tout le monde aborde les questions de l’Europe ou des relations internationales d’un point de vue national. Qu’est-ce qui sera « bon pour la France ? » Qu’est-ce qui sera « bon pour l’économie du pays ? ».
Mais autant se demander ce qui sera « bon pour Bouygues, pour Peugeot, pour Bettencourt » car les intérêts de la France sont toujours les intérêts de la bourgeoisie française, jamais ceux des travailleurs et des pauvres.
Eh bien les travailleurs conscients doivent leur opposer à tout ce monde-là leur point de vue de classe et leur internationalisme et se demander qu’est-ce qui sera « bon pour les travailleurs, pour tous les travailleurs », quelles que soient leur nationalité et leur origine.
L’internationalisme n’est pas qu’une question de solidarité entre exploités et d’efficacité dans le combat. C’est la conviction que les travailleurs ne pourront pas s’émanciper dans un seul pays et c’est la conviction que les luttes des travailleurs dans quelque pays que ce soit font avancer le sort de tous. C’est la conviction que le combat des uns est le combat de tous.
Que faire pour que le parlement soit mieux connu des citoyens ?
S.T : Pour mériter d’être connu, il faudrait encore qu’il ait une quelconque utilité pour changer la vie des travailleurs. Mais comme le parlement français, le parlement européen ne prend ses ordres que des capitalistes et des banquiers qui régentent toute la société. Et cela quelle que soit la majorité de gauche ou de droite qui est à la manœuvre. Le vrai pouvoir est ailleurs : dans les conseils d’administration des banques et des grandes sociétés. Ce sont eux qui tirent toutes les ficelles. Ces institutions sont faites pour cela. D’ailleurs pour mesurer l’efficacité de la démocratie européenne pour ne pas tenir compte de l’opinion majoritaire, rappelons-nous que le traité constitutionnel a été refusé par une majorité à l’occasion du référendum de 2005, ce qui n’a aucunement empêché d’être appliqué. Et puis rappelons aussi qu’une fraction importante de la classe ouvrière ne dispose pas encore du droit de vote du fait de sa nationalité.
Qu’auriez-vous à dire aux citoyens pour les convaincre d’aller voter le 25 mai ?
S.T : Au bout de deux ans de ce gouvernement au service du grand patronat, il n’y a plus à démontrer qu’il pouvait être pire que le précédent. Il n’y a donc rien d’étonnant à ce qu’une bonne partie des nôtres, des travailleurs, ait choisi de s’abstenir aux élections municipales pour désavouer ce gouvernement auquel « on » leur avait fait croire en 2012. Mais ce désaveu venant pour une grande partie de l’électorat de gauche, a été « détourné », « manipulé » : il s’est traduit par un retour en fanfare de la droite qui a pris des centaines de villes à la gauche, bien qu’elle ait stagné électoralement. Et bien des travailleurs qui s’étaient abstenus pour infliger un camouflet au gouvernement ont été dépités de voir que, grâce au système électoral, c’est la droite qui a finalement engrangé le résultat de leur abstention.
Et bien lors des élections européennes du 25 mai, choisir de s’abstenir sera tout aussi récupéré électoralement par la droite, voire par l’extrême droite. Pour ceux qui ne veulent pas voir leur opinion récupérée contre leurs intérêts, il y aura un autre choix dans toutes les circonscriptions de cette élection européenne, en votant pour les listes de Lutte ouvrière. Même minoritaire leur message ne sera pas récupéré contre leurs intérêts, et le drapeau de l’opposition ouvrière sera planté. Ce sera un vote sans ambiguïté. Et ce sera le seul vote utile pour l’avenir.
Patrick Noviello