13 Juil

Fête du 14 juillet au Conseil départemental à Toulouse : « Macron, touche pas à mon département »

Le conseil départemental de la Haute-Garonne organise une fête républicaine pour le 14 juillet. Discours officiel : fêter la République. Version officieuse : exister et se montrer pour parer à une suppression du département par Emmanuel Macron.

Georges Méric (Photo : Michel Viala / MaxPPP)

Georges Méric (Photo : Michel Viala / MaxPPP)

Orgue de barbarie et accordéon. Discours de Jaurès et activités ludiques pour les enfants. Les habitants de la Haute-Garonne sont gracieusement invités dans la cour de l’hôtel du département ce 14 juillet. Les boissons et le repas sont offerts. Coût de l’opération : environ 50 000 euros.

Cette somme correspond uniquement aux festivités. À noter que le conseil départemental communique ce seul montant.

Mais, selon nos informations, Il faut ajouter 35 000 euros pour la location de structures mobiles. La facture totale approche donc les 90 000 euros. Avec les dépenses de publicité, le budget global s’élève à 200 000 euros.

Enfin, il faut intégrer la comptabilité dite fonctionnelle c’est-à-dire le surcoût des charges pour un personnel contraint de travailler un jour férié.

Mais cet événement inédit n’a pas de prix. Le président de la Haute-Garonne, Georges Méric, justifie l’opération par la défense des valeurs républicaines.

Généralement, ce genre de référence est réservé aux soirées électorales. La défense de la République est habituellement brandie pour faire barrage au Front National. Pas en Haute-Garonne. Le conseil départemental fait de Marianne un étendard du quotidien. La République guide les pas de Georges Méric et constitue la raison d’être de son institution. Pas un discours ou une déclaration sans référence au modèle républicain. C’est devenue une marque de fabrique.

Dans les départements voisins du Tarn ou du Gers, les présidents appartiennent à la même famille politique que Georges Méric. Thierry Carcenac et Philippe Martin sont socialistes et authentiquement républicains. Mais, sans garder leur étendard dans la poche, ils n’ont pas le mot République en permanence à la bouche.

Dans ce contexte, une fête nationale toulousaine aux couleurs de la République, c’est presque une évidence. S’il doit y en avoir qu’une, c’est en Haute-Garonne qu’elle va se dérouler. Seulement voilà la statue de Marianne cache également une opération… domestique.

Selon nos informations, la fête républicaine du 14 juillet version Conseil Départemental a été présentée, en interne, comme un bouclier anti-Macron. Des agents se sont interrogés sur les raisons de la manifestation. La réponse a été donnée par un responsable de l’administration : il faut exister car le département est en danger.

Ce n’est pas « aux armes, citoyens » mais « haut-garonnais à vos assiettes et à vos fourchettes« . Une grande fête populaire doit montrer que le conseil départemental est une institution proche des citoyens.

Dans son programme, le candidat Macron prévoit effectivement la fin des départements. Tous ne sont pas visés. Uniquement dans les territoires ou existent des Métropoles. Depuis son installation à l’Elysée, le nouveau président n’a pas ressorti, ou simplement évoqué, le sujet.

Mais, en Haute-Garonne, le principe de précaution s’applique. Une fusion-acquisition au profit de Toulouse-Métropole plane.

Face au péril, l’idée d’organiser une fête populaire a été vendue par le cabinet de Georges Méric. Selon une source, le président du Département n’était pas enthousiaste. Et pourrait même demander des comptes à son directeur de cabinet si l’opération fait « pschitt ».

Le président du département n’est pas le seul sceptique. Selon nos informations, le préfet apprécie modérément l’initiative du conseil départemental. Le représentant de l’Etat organise également une réception à l’occasion de la fête nationale. Il voit d’un mauvais œil la concurrence de l’hôtel du département.

Paradoxalement, l’autorité organisatrice ne déborde pas non plus d’enthousiasme. Georges Méric s’est laissé convaincre par son cabinet. Mais il traine les pieds. Non sans raison. Une grande fête cela pose toujours la question du coût. Mais, surtout, l’utilité du procédé est discutable. Si le projet de la suppression des départements se concrétise, c’est plutôt le lobbying auprès de Matignon et de l’Elysée qui peut payer.

Les citoyens invités à la fête du 14 juillet vont probablement repartir ravis et repus. Mais ils ne vont pas dresser des barricades pour défendre le conseil départemental face au péril Macron. Les gouvernements reculent parfois face à la rue. Pas évident que les Français sortent les fourches pour défendre les châteaux départementaux. Les habitants de la Haute-Garonne comme ceux de l’Ariège ou des Hautes-Pyrénées connaissent les prestations fournies par les conseils départementaux : RSA, APA…

Mais ce ne sont pas les cotillons du 14 juillets qui vont transformer les invités du conseil départemental en manifestants de rue.

Si Emmanuel Macron décide de faire sa fête au département de la Haute-Garonne, il restera toujours le souvenir d’un banque offert.

Laurent Dubois (@laurentdub)