Les Premiers secrétaires fédéraux du PS sont priés de dénoncer leurs camarades dissidents.
La circulaire interne date du 14 avril 2017. Le texte émane de la commission nationale des conflits (CNC) et son objet est surprenant. Les instances nationales du PS demandent aux responsables départementaux du PS de ficher les militants, cadres et élus du parti. Une adresse électronique est indiquée et doit servir à monter des dossiers :
Je te remercie de bien vouloir adresser dans les plus brefs délais tout élément factuel qui indiquerait la manifestation d’un soutien d’un camarade du Parti quel qu’en soit la forme à un autre candidat que celui du parti.
Les instances nationales du PS dressent une liste des pièces à fournir :
Articles de presse, interviews, mails, tracts, expressions sur les réseaux sociaux. Ces éléments doivent être transmis exclusivement en forme numérique (scans, capture d’écrans). Les coordonnées de camarades concernés devront être expressément mentionnées.
La surveillance et la collecte des infos a un relent de « flicage ». Pour ne pas dire d’espionnage. Mais, surtout, elle montre que la Commission Nationale des Conflits a quelques lacunes en matière juridique. Les tracts, les articles de presses, les publications sur Facebook et Twitter relèvent d’une expression publique. En revanche, les mails sont des correspondances privées. A ce titre, ils bénéficient d’une protection juridique. La Commission Nationale des Conflits (CNC) veille au respect des statuts du parti.
La circulaire rappelle cette fonction et insiste sur la régularité de la procédure. La CNC veut éviter que « les décisions soient entachées d’un vice de forme opposable devant les tribunaux civils ». L’intention est louable. Mais les « gardiens du Temple » socialistes oublient un « détail » : le Code Pénal. La violation d’une correspondance privée (par un 1er fédéral du PS ou un voisin de palier) peut mener devant le tribunal correctionnel.
L’unité du parti mérite (visiblement) un fichage des militants. Pas évident que cela justifie un passage devant un juge d’instruction.
L’ouverture d’un guichet anti-dissidents remonte avant le 1er tour de la présidentielle. Selon nos informations, aucune nouvelle circulaire est intervenue pour abroger le dispositif. Il est donc toujours potentiellement actif.
Mais le contexte politique a complément changé. La défaite de Benoît Hamon et la victoire d’Emmanuel Macron modifie la ligne du PS. Les socialistes soutenant En Marche ! n’ont plus de raison de redouter un fichage.
Jeudi 18 mai, Bernard Cazeneuve est venu, dans l’Aude, soutenir les candidats (socialistes) aux législatives en Occitanie. L’ancien premier ministre est sur la ligne de la présidente (PS) de Région, Carole Delga, et d’autres socialistes : une majorité constructive avec Emmanuel Macron.
Les « macronistes » du PS peuvent se rassurer. Malgré la compétition des législatives, la hache de guerre est enterrée. La Commission Nationale des Conflits n’a plus besoin d’agents de surveillance.
Laurent Dubois (@laurentdub)