Fin du mystère. Le 29 juin dernier, le PRG a brutalement suspendu sa participation à La Belle Alliance Populaire. Une Alliance lancée par le PS de Jean-Christophe Cambadélis en avril 2016. Motif invoqué par Jean-Michel Baylet : l’organisation autoritaire et unilatérale d’une primaire pour la présidentielle de 2017. France 3 Midi-Pyrénées s’est procuré un courrier qui éclaire différemment le coup de sang de l’ancien président des radicaux de gauche et actuel ministre de François Hollande. En réalité, le refroidissement entre le PS et le PRG est lié à des tensions internes au… PRG.
La prise de distance de Jean-Michel Baylet répond et correspond à une demande de Jacques Mézard, le patron des sénateurs radicaux : moins de suivisme envers François Hollande.
« Le PS règne sur la Belle Alliance. On a appris l’existence des primaires dans la presse. Le PS ne peut pas vouloir rassembler sans respecter ses alliés ». Les mots de Jean-Michel Baylet sont clairs et sans appel. Le parti socialiste passe les bornes et le PRG n’a pas le choix. Les radicaux doivent prendre de la distance. Les menaces et les pressions sont monnaies courantes entre les deux meilleurs alliés de la gauche, entre le parti socialiste et Jean-Michel Baylet.
Ce qui change, c’est le mobile de la crise domestique. C’est la première fois que l’organisation d’une primaire (d’avant présidentielle) fait brûler le torchon. En 2011, Jean-Michel Baylet a partagé, sans difficulté, le temps de parole et les plateaux télévisés avec François Hollande, Martine Aubry, Manuel Valls, Ségolène Royal et Arnaud Montebourg. L’exercice n’a pas été très rémunérateur d’un point de vue politique : 0,64% des voix. Mais Jean-Michel Baylet n’a pas rechigné face à l’organisation d’une primaire.
Six ans plus tard, la donne a changé. François Hollande est à l’Elysée et il reçoit, tous les mercredis, Jean-Michel Baylet autour de la table du conseil des ministres.
A priori, cette proximité et ces rendez-vous hebdomadaires devraient faciliter les choses. Pas du tout. Jean-Michel Baylet est vent debout.
Sur la forme, Jean-Michel Baylet a raison. L’organisation d’une primaire débarque d’un seul coup, sans concertation ni préparation. Pendant des mois, Jean-Christophe Cambadélis a repoussé l’hypothèse. D’un seul coup, pour des raisons tactiques (une primaire permet de limiter les candidatures à gauche), l’Elysée donne un feu vert. En revanche, sur le fond, les vraies raisons de la (subite) résistance de Jean-Michel Baylet ne se trouvent pas dans l’attitude de Jean-Christophe Cambadélis ou du PS.
En septembre prochain, un Congrès du PRG doit assurer la succession de Jean-Michel Baylet. Sylvia Pinel est l’actuelle présidente par intérim du parti. Cette élection interne n’est pas une simple formalité.
Une « présidentielle » version PRG a longtemps été un scrutin verrouillé. Mais c’est la fin d’une époque. Le leadership de Jean-Michel Baylet est en perte de vitesse. L’homme fort du PRG a perdu son siège de sénateur et la présidence du Tarn-et-Garonne. Mais, surtout, son bâton de maréchal est en bois. Son bail ministériel arrive à terme dans quelques mois. Ses chances de redevenir un jour ministre sont minces. Faiseur de Roi et de Reine au sein du PRG, Jean-Michel Baylet est au crépuscule de sa longue carrière politique. De plus, la candidate officielle de Jean-Michel Baylet, Sylvia Pinel, ne bénéficie pas de l’autorité de son mentor. L’ancienne ministre du Logement et actuelle 1ère vice-présidente au conseil régional d’Occitanie, fait l’objet d’une véritable contestation en interne. Y compris de la part des soutiens historiques et inconditionnels de Jean-Michel Baylet.
Dans ce contexte difficile, une « voix dissonante » a forcément du poids. Surtout quand il s’agit du président du groupe RDSE au Sénat.
Jacques Mézard ne critique pas Jean-Michel Baylet. Au contraire. « J’ai conscience de ce qu’a apporté Jean-Michel Baylet au PRG » écrit le sénateur du Cantal
Mais, passé cet hommage (minimal mais réel), c’est l’expression d’une véritable divergence sur la ligne politique suivie par le PRG. « On doit avoir le droit de considérer, au sein du PRG, que le bilan du quinquennat de François Hollande est négatif. Comment oublier les échecs, les lois mal-ficelées à la va-vite…les réformes souvent contraires ou absentes des engagements du candidat. Comment ne pas sanctionner son absence (NDLR François Hollande) de vision pour la France. Quand on gouverne en fonction des courants dominants d’un parti en crise (NDLR : le PS) ».
La lettre (envoyée à tous les membres du comité directeur) est datée de la mi-juin. Quelques jours après, le 29 juin, Jean-Michel Baylet tire à boulet à rouge sur le PS et le PRG quitte la Belle Alliance. Ce genre de coïncidence porte un nom : un ajustement d’avant Congrès.
Laurent Dubois (@laurentdub)