Une semaine cruciale. Cet après midi, mardi 29 mars, le texte est arrivé en commission des affaires sociales. Dans deux jours, le jeudi 31 mars, syndicats et lycéens vont de nouveau défiler pour demander un retrait. Que ce soit sur le terrain parlementaire ou dans la rue, la « loi El-Khomri » est à la croisée des chemins.
Le début du débat législatif va permettre de savoir s’il existe une majorité pour voter une loi qui déchire la gauche. La mobilisation de jeudi prochain va peut-être (enfin) attendre une masse critique et établir un rapport de force favorable aux adversaires de la réforme El Khomri. En attendant, un autre front s’ouvre.
Une disposition du projet de loi (l’article 6) suscite une véritable levée de boucliers. La polémique tourne autour d’une phrase : « La liberté du salarié de manifester ses convictions, y compris religieuses, ne peut connaître de restrictions que si elles sont justifiées par l’exercice d’autres libertés ou par les nécessités du bon fonctionnement de l’entreprise ». Le Front National et la droite dénoncent une atteinte à la laïcité.
Une partie de la gauche monte également au créneau. L’allié radical de François Hollande, le PRG s’insurge. D’ailleurs, c’est une sénatrice radicale de gauche, Françoise Laborde, qui, la première, a soulevé le problème au travers d’une question au gouvernement. La sénatrice PRG de la Haute-Garonne pointe du doigt l’ambiguïté de Manuel Valls et envisage de déposer des amendements pour rectifier le tir. Interview.
Le Blog Politique – L’article 6 de la loi El Khomri porte atteinte à la laïcité. Il ouvre la porte au communautarisme dans l’entreprise. Vous partagez ces critiques ?
Françoise Laborde. Ce n’est pas aussi simple et caricatural. La liberté religieuse du salarié est déjà inscrite dans le code du travail. ce sui pose problème c’est que la liberté religieuse soit inscrite dans son préambule. Dans ce cas, c’est effectivement une porte ouverte par rapport aux religions. Le fait d’inscrire le principe dans le Préambule peut faire évoluer l’attitude des juges. De plus, cette inscription tombe au mauvais moment. Des chefs d’entreprises sont confrontés à des problématiques religieuses. Des salariés refusent de serrer la main de collègues femmes.
Le Blog Politique. Comment expliquez-vous l’attitude du gouvernement ? C’est une maladresse ? Une légèreté ? Une volonté délibérée ?
Françoise Laborde. Manuel Valls prétend que le projet de loi ne va pas remettre en cause le principe de laïcité dans les entreprises. Mais alors il ne faut pas utiliser le mot religion dans la loi. Mais je tiens à insister sur un point. Le Front National et Jean-François Copé font de la polémique. Copé a fait du grand Copé. Je ne suis absolument pas dans la dedans. La question que j’ai posé au gouvernement était une vraie question. C’était une question ouverte. J’ai relu deux ou trois fois le texte de ma question avant de la poser. Il existe des problèmes. A la RATP des conducteurs refusent de s’assoir dans le même fauteuil et tenir le même volant que leurs collègues féminines. Il faut tenir compte de ces situations et leur apporter des réponses.
Le Blog Politique. Le projet de loi arrive à l’Assemblée. Il va ensuite être transmis au Sénat. Vous allez déposé des amendements si l’article 6 n’est pas réécrit par vos collègues députés ?
Françoise Laborde. Oui je suis prête à déposer des amendements mais, évidemment, je vais observer de prés ce que fait l’Assemblée Nationale.
Propos recueillis par Laurent Dubois (@laurentdub)