Un ancien château viticole du bordelais a été transformé en caserne, au début du XXe siècle, puis en centre Epide, au XXIe, pour l’insertion de jeunes en difficulté. Une histoire insolite qui est une réussite.
L’ancien château viticole est devenu un centre Epide © JPS
Aujourd’hui seul le château subsiste et témoigne de ce passé viticole. Cette propriété se situait sur le domaine Ségur au lieu-dit « Belle-Ile ». Elle a été acquise par l’Etat en 1913 pour 250 000 francs alors qu’une loi venait d’allonger la durée du service militaire à 3 années. Le but était de construire sur ce domaine des casernes pour loger les nouveaux contingents.
Benyamin Hamza, un exemple de volontarisme © JPS
L’Epide (Etablissement Public d’Insertion de la Défense) a depuis 2007 pris possession des lieux, la première année en co-existence avec le 57ème Régiment d’Infanterie dont une trentaine de militaires étaient encore présents. A l’origine, l’Epide venait d’être créé pour répondre aux problèmes des quartiers sensibles, après les émeutes de 2005 dans les banlieues. D’ailleurs, il conserve 50 % de jeunes issus des quartiers. Mais aujourd’hui, l’Epide ne dépend plus du ministère de la défense mais des deux ministères de la ville et du travail. C’est un centre pour l’insertion professionnelle, selon un modèle atypique mais qui semble avoir fait ses preuves.
Le rassemblement chaque matin à 8 h, pour mettre aussi à l’honneur une fois par semaine ceux qui décrochent des jobs © JPS
Pour ces 150 jeunes, chaque journée commence par un réveil à 6h, un entretien des communs et des chambres, un sérieux petit-déjeuner avant le rassemblement. Cela ressemble quelque peu au service militaire, d’autant que les jeunes et les encadrants portent une tenue Epide, que les admissions se font tous les 2 mois, et qu’il y a la levée des couleurs et la Marseillaise chantée une fois par semaine.
Leïla Kouach, se cultive et s’intéresse, entre deux cours et son stage en alternance © JPS
Mais ici tous ces jeunes, âgés de 18 à 25 ans, sont des volontaires. Ils ont fait le choix de suivre durant 8 mois au minimum cette voie pour se remettre à niveau et repenser grâce à l’Epide leur parcours professionnel. Benyamin Hamza, originaire de Mayotte a arrêté une scolarité qui ne lui convenait plus. Aujourd’hui à l’Epide, il est davantage épanoui et a même été élu délégué des volontaires. Avec les encadrants, il a réalisé un cv et commence à démarcher les entreprises. Il a deux projets en vue : intégrer la Marine Nationale ou devenir agent de sécurité. Leïla Kouach, d’Agen, a également un double projet civil et militaire: devenir aide soignante, elle travaille actuellement en alternance avec une association d’aide aux personnes âgées, ou encore s’engager dans l’Armée de Terre.
Tous suivent à l’Epide des cours de remise à niveau en Français, mathématiques, histoire, instruction civique ou parcours citoyen comme ils disent car ils sont aussi motivés pour participer aux cérémonies du 11 novembre ou participer à des actions de Surfrider de nettoyage des plages avec aussi une initiation au surf… Il y a aussi pour ceux qui ont un projet qui le nécessite des cours de code de la route et de conduite, sur simulateur d’abord, et en vrai par la suite. L’Epide finance donc le permis de conduire pour certains de ces jeunes qui vont devenir chauffeurs routiers ou agents de sécurité par exemple.
Un simulateur de conduite est à disposition des volontaires qui auront besoin du permis pour décrocher un job © JPS
Si l’Etat investit 22 000 € pour chaque volontaire, ce n’est pas à fond perdu. Car chacun va incarner un nouvel espoir de décrocher un job ou une formation. Au total, 70% de ces jeunes vont se réinsérer dans la société au terme de leur séjour dans l’Epide : pour 2/3 d’entre eux ce sera un emploi, et pour 1/3 ce sera une autre formation.
Lolita Bouillaud va décrocher un CDI après un contrat d’avenir © JPS
Ces jeunes sont présents à l’Epide, du lundi 10 h au vendredi en début d’après-midi, leur séjour s’alterne entre ces cours, des ateliers, le sport et des stages à l’extérieur comme à la Banque Alimentaire à Bordeaux Nord où 2 jeunes se présentent cette après-midi là pour prendre les consignes car la semaine qui suit ils seront en immersion.
Un stage à la banque alimentaire pour ces jeunes de l’Epide © JPS
Il y a aussi des exemples de grande réussite comme Lolita Bouillaud, 22 ans. Cette jeune fille ne savait pas ce qu’elle allait trouver comme job en rentrant à l’Epide. Bien conseillée et très douée, elle a fait un stage de soudeur chez T2I une entreprise de tolerie et inginiérie (qui fabrique notamment des valisettes de batterie pour aéronefs). Lolita a suivi une formation chez eux et a obtenu un contrat d’avenir. Elle a réussi son parcours à tel point qu’aujourd’hui T2I va lui proposer un CDI et va continuer à la faire progresser en interne.
Pierre Poli, le directeur de l’Epide de Bordeaux © JPS
Moralité de l’histoire, comme dans les vignes, chaque année il y a un nouveau départ… D’un château viticole, le domaine accueille ce centre Epide qui donne une nouvelle vie et une seconde chance à ces jeunes. Au fil du temps, comme le vin, s’ils savent puiser l’énergie qui est en eux, ils vont aussi savoir se bonifier.
Regardez les 4 épisodes de notre Série Bordeaux Métropole :
Épisode #1 : Présentation de l’EPIDE
Épisode #2 : En stage à la Banque Alimentaire
Épisode #3 : Portraits de 2 volontaires de l’EPIDE
Épisode #4 : Après l’EPIDE, on fait quoi ?