02 Nov

Bordeaux : vers un millésime 2022 exceptionnel…

Une petite musique se fait entendre dans les chais du Bordelais, celle annonciatrice d’un millésime 2022 exceptionnel. Après des vendanges rêvées, même si la quantité sera un peu moindre, la qualité promet d’être historique. Après les fermentations, à l’heure où se terminent les soutirages, le millésime est déjà spectaculaire en terme de toucher de bouche, de tannins, de couleur…

Au château de Reignac, en Bordeaux Supérieur à Saint-Loubès, on se frotte les mains, dès la fin septembre les vendanges terminées auguraient d’une récolte exceptionnelle avec un  été chaud et des matinées de septembre assez fraîches…

« C’est vraiment un super millésime, il manque un petit peu de quantité, mais bon la qualité est là c’est le principal », Olivier Prévot maître de chai de Reignac

Dans les chais, après les fermentations alcooliques et malolactiques encore en cours, on termine les soutirages, les jus témoignent d’une couleur intense et d’un goût de fruits prononcé, tout cela confirme un millésime historique… », explique Nicolas Lesaint directeur technique du château de Reignac.

On est sur des degrés normaux, des 14, 14,5°, de belles acidités, de belles fraîcheurs et de très belles maturités…

Bordeaux a souvent tendance à dire c’est le millésime du siècle, mais là c’est vrai que c’est un très très bon millésime. Quand on déguste les lots on a le sentiment de se rapprocher d’un 2009, d’un 2010, de très belles références », Nicolas Lesaint directeur technique château de Reignac.

Pour obtenir ce nectar, l’alchimie s’est jouée d’abord à la vigne : l’absence d’effeuillage était primordial pour passer l’été caniculaire, la fraîcheur matinale et la chaleur des après-midi de septembre ont permis aux raisins de mûrir doucement mais surement et d’attendre le moment opportun pour Axelle et Pierre Courdurié, dont le château Croix de Labrie vient de passer au rang de cru classé de Saint-Emilion…

« Je pense que c’est un travail fait dans la vigne depuis des années, en bio, en biodynamie, avec des couverts végétaux..; Peut-être le gros coup de bol a été de ne pas effeuiller et de se dire il va peut être faire chaud, on attend, du coup on n’a rien fait  et cela a été très gagnant… », commente  Axelle Courdurié du château Croix de Labrie.

Cela va être un millésime spectaculaire, en terme d’équilibre, de toucher de bouche, de tannins, de couleur, oui, un très très grand parmi peut-être les plus grands jamais faits à ce jour » Pierre Courdurié du château Croix de Labrie

Velours, soyeux, ce 2022 avec de la matière et suffisamment de fraîcheur va relancer sans doute le marché de Bordeaux pour les primeurs en avril prochain.

Regardez le reportage de Jean-Pierre Stahl, Jean Poustis et Sarah Colpaert :

07 Oct

Château La Tour Carnet : un sanctuaire pour expérimenter les meilleurs cépages à l’horizon 2050

 C’est un travail minutieux et empirique qui est mené à Saint-Laurent-de-Médoc. Bernard Magrez et le château la Tour Carnet expérimentent sur la durée 84 cépages français, européens et mondiaux en réel sur leur terroir de graves médocaines. Des micro-cuvées suivies au fil du temps pour voir leur évolution à l’horizon 2050.

Le château la Tour Carnet :  un sanctuaire qui expérimente les meilleurs cépages à l’horizon 2050… Le merlot ou le cabernet sauvignon majoritaires ici ont désormais sur deux parcelles des cépages expérimentaux comme voisins…

A chaque bout de rangs, des noms à l’accent méditerranéen comme le tempranillo de la Rioja espagnole, le néro d’avala cépage sicilien, ou encore le cépage Allicante ramassé ici en terre médocaine. « C’est un cépage français issu du croisement entre le petit bouchet et le grenache noir, croisement effectué en 1855, il est principalement cultivé dans le sud de la France, l’Espagne et le Portugal. Et donc du coup avec le réchauffement climatique il est intéressant d’étudier ce cépage du sud à Bordeaux…« commente Martin Clapaud adjoint au chef de culture.

La collection compte ici 84 cépages, une cinquantaine de rouge et une trentaine de blancs, étudiés en situation réelle comme cette année avec ces températures caniculaires qui augurent de celles qui seront monnaie courante en 2050. Outre les traditionnels merlot et cabernet, le malbec est ici réintroduit et étudié mais aussi toute cette collection de « cépages issus de tout le pourtour méditerranéen, donc des climats plus chauds plus secs que l’on étudie dans l’hypothèse que ces cépages pourraient apporter une réponse à l’adaptation au changement climatique de nos vignobles », selon Julien Lecourt responsable recherche et développement des vignobles Bernard Magrez.

« Le millésime 2022 d’après les prévisions météorologiques ressemblerait au millésime 2050. Et donc cela nous a permis cette année de caractériser d’un point de vue agronomique, on a regardé les rendements, la résistance au stress hydrique de tous ces cépages, les 84 cépages et maintenant on est en train de les vendanger, on va les vinifier à part et voir leur qualité oenologique se développer et voir si vraiment ils ont un intérêt dans le cadre de l’adaptation au changement climatique… »

A chaque rang correspond un cépage, des pieds de vigne qui bénéficient d’un système de chauffage si besoin (calqué sur ce squi se fait en aéronautique) pour voir leur réaction. Voici d’ailleurs le touriga nacional cépage portugais déjà introduit dans le cahier des charges des AOC de Bordeaux.

« C’est un cépage qui est plus tardif que les cépages qu’on a traditionnellement dans le bordelais et plutôt résistant aux maladies aussi…C’est pour cela qu’il a été sélectionné d’ailleurs et on est en train de l’essayer ici à plutôt grande échelle… », précise Julien Lecourt.

Dans le chai bien gardé d’expérimentation, ce sont 84 cuves thermorégulées de 1 à 4 hectolitres qui attendent chaque récolte identifiée avec un micro pressoir.

« On s’aperçoit avec le réchauffement climatique, que pour avoir une bonne maturité des tannins et de la couleur, on est quand même obligé d’attendre un certain temps, alors que les raisins avec la maturité technique c’est – à -dire le taux de sucre élevé et l’acidité assez basse lui avance énormément et plus vite avec le réchauffement climatique », « ce qui fait qu’on a un écart entre la maturité technique et la maturité phénolique… Cela nous oblige à ne pas vendanger au 15 août, ca serait très simple de vendanger quand le raisin fait 13° d’alcool et s’arrêter là, sauf qu’à ce moment là les tannins, les arômes, ne sont pas encore prêts…Donc c’est pour cela qu’on est obligé de vendanger à des dates qui avancent néanmoins mais qui restent éloignées… », selon Alix Combes, directeur du château La Tour Carnet.

Tous les 6 mois, ils vont déguster ainsi et regarder l’évolution des vins et de leurs qualités. Une chose est sûre, il faudra adapter le vignoble d’ici quelques années et introduire de nouveaux cépages.

 

05 Oct

Et voici le botrytis cinerea ou quand opère la magie de Sauternes

C’est parti pour les premières tries dans le Sauternais. A Barsac et Sauternes depuis cette semaine on s’active pour un premier ou deuxième passage pour ramasser les baies botrytisées… Reportage aux châteaux Cantegril et Rayne Vigneau avec de grands faiseurs de Sauternes, Jean-Jacques Dubourdieu et Vincent Labergère qui nous expliquent la formation de cette pourriture noble, nécessaire aux grands Sauternes.

Du brouillard et de la chaleur… Au château Cantegril, la magie de Sauternes opère enfin, avec l’influence de ces cours d’eau tout proches… Ils apportent l’humidité nécessaire à la formation de la pourriture noble…

« A 9 heures,  c’était juste massé sur la Garonne et le Ciron, et puis là cela commence à se diffuser partout…Donc, c’est cette hygrométrie qui fait que peu à peu le botrytis se développe…Et donc là vous avez un bon exemple de baie qui a été passeriée au démarrage et puis là ça commence à botrytiser… », commente Jean-Jacques Dubourdieu propriétaire de Cantegril et de Doisy Daëne.

Ce sont les premières coupes, les premières tries, comme on dit ici… Elles sont êtres successives, on va ainsi passer 3 à 4 fois, pour récolter les baies où s’installe progressivement le botrytis cinerea, pour donner ces vins liquoreux…

« Les belles après-midi, l’eau contenue dans le raisin commence à s’évaporer…Et c’est là que la baie se déforme et commence à devenir confite… », ajoute Jean-Jacques Dubourdieu.

Avec les pluies tombées la semaine dernière, au château de Rayne Vigneau l’impact de la sécheresse est moins flagrant…

« La sécheresse qu’on a eue sur le mois de septembre a décalé l’implantation du botrytis… Après on est à Sauternes, on sait attendre et on n’est que début octobre… », commente Vincent Labergère directeur du château  Rayne Vigneau.

Dans les chais, le gros de la récolte va rentrer entre le 10 et le 20 octobre… Mais déjà, dans cette barrique, la première trie se déguste…. »C’est pas hyper complexe parce qu’il n’y avait pas trop de botrytis, mais en fait c’est très très bon… »

« Le plus dur à obtenir dans un Sauternes, c’est la fraîcheur… C’est faire d’un vin qui est puissant, qui est long en bouche, d’en faire un vin désaltérant, c’est à dire qui finit tout en délicatesse, tout en fraîcheur… », selon Vincent Labergère.

Un travail d’orfèvre depuis la vigne jusqu’au pressurage de ces raisins botrytisés pour obtenir ces légendaires Sauternes au bout de 18 mois d’élevage…

Regardez le reportage de Jean-Pierre Stahl, Ludovic Cagnato et Xavier Granger :

 

03 Oct

Insolite : 24e vendanges au coeur de l’aéroport de Bordeaux

C’est toujours un événement à Bordeaux : ce sont les fameuses vendanges de l’aéroport ! Cette 24e édition a mis à l’honneur cette année 50 chefs d’entreprises primées tout au long de l’année par les trophées et challenges portés par la CCI de Bordeaux. Des apprentis vignerons investis dans leur tâche…

C’est insolite, c’est un vignoble en plein coeur d’un aéroport ! 2 symboles de Bordeaux réunis en un même lieu : vin et tourisme… Depuis 24 ans, ces vendanges sont orchestrées par la Chambre de Commerce et d’Industrie de Bordeaux qui a souhaité planté une vigne pour accueillir les touristes au sortir de leur avion…

Pour Patrick Seguin, président de la CCI de Bordeaux : « d’abord, c’est le seul aéroport au monde à avoir des vignes plantées sur son territoire c’est quand même unique et c’est la représentation de Bordeaux… »

« L’idée était déjà originale à sa création et 25 ans plus tard, on a un vignoble qui est bien là et qui est en forme », commente Olivier Bernard propriétaire du Domaine de Chevalier et responsable de ces 15 ares de vigne plantés comme un grand cru classé ( à raison de 10 000 pieds à l’hectare)…

Pour ces 24e vendanges, 50 chefs d’entreprise lauréats des trophées et challenge de la CCI de Bordeaux cette année se sont essayés au métier de vigneron… « Celle-ci, je n’arrive pas à l’enlever, c’est très ferme et très dense », commente une responsable d’entreprise… « Epuisé, cela fait 5 minutes qu’on coupe, c’est fatiguant »; plaisante bien sûr Cédric Janvier de l’Hôtel de Sèze.

Une bonne ambiance pour récolter ce millésime 2022 cultivé en bio, sur un terroir de graves…

« Un magnifique millésime 2022, je pense que les vignerons peuvent être ravis, le millésime s’annonce exceptionnel », selon Sylvain Boisvert directeur du Conseil des Grands Crus Classés en 1855. « Notre rôle est de préserver les traditions, c’est ce que l’on fait aujourd’hui« , commente de son côté le directeur de l’aéroport Simon Dreschel.

Photo © Eric Barrière pour la CCI de Bordeaux

1200 bouteilles seront produites en appellation Bordeaux sous la direction du Domaine de Chevalier, dans le but de communiquer sur l’image de Bordeaux.

Regardez le reportage de Jean-Pierre Stahl, Jean-Michel Litvine et Robin Nouvelle : 

23 Sep

Clos de l’Echauguette : il n’y a pas d’âge pour vendanger au coeur de la Citadelle de Blaye

Des images forts sympathiques ce matin de bambins de maternelles qui ont participé aux vendanges du clos de l’Echauguette à Blaye. Une tradition perpétuée par le syndicat viticole de Blaye qui exploite ce vignoble de 15 ares depuis 50 ans au coeur de la Citadelle construite par Vauban.

« Bienvenue à tous au Clos de l’Echauguette…Aujourd’hui, vous allez vendanger, c’est la première fois pour tout le monde ? Ouiiii…. » Des petits de maternelle dans le rôle de vrais vignerons… Ces 21 enfants de l’école Grospierre de Blaye attendaient de moment depuis longtemps. « On va ramasser des raisins…avec les mains… »

« Qui veut couper là ? » A 4 ou 5 ans, certains ont déjà la technique mais pas question de leur donner pour autant un sécateur… « Ce sont des petits ciseaux, à bouts ronds, donc on essaie de couper les raisins en plusieurs parties… », commente Cédric Grossard de la Maison des Vins de Blaye.

Et direction le tombereau pour déverser la précieuse récolte de merlot… « C’est quand même un grand moment pour eux car cela fait quand même deux ans qu’ils n’ont pas pu participer à ces vendanges donc c’est une euphorie pour tout le monde », commente leur professeur Clément Cheyroux de l’Ecole Grosperrin de Blaye.

Moment d’émotion aussi et d’échanges avec Guy Bénéteau, 93 ans, l’ancien président de l’appellation et du syndicat viticole de Blaye. « Quand le vignoble a été planté, j’ai fait beaucoup de fête et même intronisé plusieurs ministres ici dans la confrérie de Guyenne » « C’est un très beau projet, une très belle initiative de Guy, puisque le Clos est toujours là et on peut voir l’effervescence qu’il y a autour de ces vendanges. Et pour nous c’est une très belle visibilité : une parcelle de vigne dans un bâtiment inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco, cela permet de faire connaître et rayonner notre appellation à travers le monde… », commente Thibaut Layrisse, directeur des Vins de Blaye.

En plus c’est un très grand gage de qualité dans cette parcelle de vigne et dans cette vendange, le Clos de l’Echauguette que l’on vend uniquement à la Maison des Vins de Blaye est ce que l’on fait de mieux en terme de qualité, sur l’appellation, c’est un vignoble qui est en agriculture biologique depuis 2016. » Thibaut Layrisse, directeur des Vins de Blaye.

C’est lui qui est à l’origine de ce projet avec le maire de l’époque en 1968; un vignoble de 15 ares planté en plein coeur de la citadelle Vauban, et qui a vu le jour en 1972.

Et ce sont des souvenirs à jamais gravés pour ces vignerons en herbe, remerciés par une haie d’honneur à leur sortie, par leurs aînés…

01 Sep

A l’ISVV, les oenologues de France ont planché sur les goûts de fumées dans les vins

Après les violents incendies en Gironde, l’Union des Oenologues de France a réuni un collège de scientifiques, d’oenologues, de laboratoires et de propriétés étrangères ou françaises qui ont été confrontés aux goûts de fumées. A date, il n’y a pas de problème sur les vins ici à Bordeaux. Les quantités analysées par les laboratoires sur des vignes proches des feux restes infimes, mais le problème mérite que l’on travaille dessus. Un appel à projet a été lancé. Témoignage également de vignerons proches de Landiras et Barsac.

La fumée proche du vignoble de © Loïc Pasquet

Le 12 juillet à Landiras, le feu s’est déclaré à quelques centaines de mètres du domaine Liber Pater de Loïc Pasquet. Des fumées, qui selon les vents, ont pu venir par moment sur sa propriété.

Sur son domaine Liber Pater, Loïc Pasquet goût ses raisins, aucun goût de fumée © JPS

Ici c’était irrespirable, ca piquait les yeux, le soleil était totalement voilé, on ne pouvait  pas respirer donc il y avait des jours où on était très clairement exposé à la fumée, donc l’impact qu’on va avoir sur le raisin on ne le connait pas, parce qu’on n’a pas cette expérience »  Loic Pasquet de Liber Pater.

Ses raisins ne révèlent aucun goût suspect, que de bons goûts de fruits rouges, toutefois ce feu intense qui a pu dégager des phénols volatils l’inquiète pour les années à venir…

« Ca peut-être préjudiciable, car le risque ultime c’est de perdre la récolte de Liber Pater. L’année dernière on a gelé, cette année on a le feu, donc on ne va pas perdre tous les ans des récoltes… »

Proche du vignoble des Graves, ces fumées ont aussi atteint Barsac-Sauternes. Au château La Clotte-Cazalis, Marie Pierre Lacoste goûte pour vérifier ses premiers jus de sauvignon, sémillon….

Marie-Pierre Lacoste-Duchesne goûtant ses premiers jus © JPS

Ce que je goûte aujourd’hui, on ne trouve pas de goût de fumée, après on ne sait pas pendant les process de fermentation, les transformations aromatiques si le goût de fumée peut apparaitre un peu plus tard, on n’a pas de recul par rapport à cela, donc on va rester vigilant dans les semaines qui viennent et on reste très positif. » Marie Pierre Lacoste château la Clotte-Cazalis

Une conférence s’est tenue sur cette problématique à l’ISVV mardi soir ©  JPS

Mardi soir, à l’Institut des Sciences de la Vigne et du Vin, l’Union des Oenologues de France avait convié de nombreux oenologues, scientifiques, responsables de laboratoires, directeurs de vignobles déjà impactés par des feux, à restituer leurs expériences et études en la matière. Pour Alain Blanchard professeur et directeur de l’ISVV ces problématiques de goûts de fumées dans les vins : « c’est un risque qui existe et est avéré. » « Cette année, c’est une alerte sur des problèmes qui peuvent revenir. »

Didier Fages, président de l’Union des Oenologues souligne que « le Portugal, l’Espagne, l’Italie et la Grèce souffrent plus que nous », également les USA; c’est un problème plus vaste qui peut toucher tous « les fruits qui pourraient absorber ces phénols volatils… » Tout en rassurant, les premières analyses ont montré peu de conséquences ici, et sont même en dessous des seuils de perception de ces molécules odorantes. Mais bien sûr, « il y a le sens du vent qui rentre en jeu… »

Didier Fages, président des oenologues de France © JPS

Les retours d’expériences ont été fructueuses selon Pierre-Louis Teissedre selon « une étude canadienne les incendies émettent dans l’air ambiant une grande partie d’hydrocarbures aromatiques polycycliques. Plus de 500 composés odoriférants volatils sont contenus dans la fumée dérivée du bois ».

Pour Vincent Renouf, directeur général du laboratoire Excell :  » des notes fumées, médicinales, cendrées peuvent être perçues » dans ce qu’on appelle ces goûts de fumées. Fort heureusement, ces incendies sont arrivés très tôt, tous les vignes n’avaient pas encore connu la véraison, à la différence de la Californie en 2020 et de la Provence en 2021 (où présence de gaïacol sur mouts/raisins et vins), là sur les 400 analyses faites à date les données (à Bordeaux) sont très très rassurantes. »

La pluie tombée ces dernières semaines a pu aussi lessiver en partie les baies. Le vignoble bordelais dans son ensemble n’a quasiment pas été impacté. D’autres analyses seront sans doute effectuées sur les parcelles les plus proches des incendies après les fermentations.

Regardez le reportage de Jean-Pierre Stahl, Nicolas Pressigout et Léo Prévost :

 

22 Août

Vendanges : les travailleurs handicapés mis à l’honneur au château La Garde

En Gironde, certains châteaux allient le travail et l’insertion. C’est le cas depuis plus de 5 ans au château la Garde qui fait appel aux travailleurs de l’ESAT Magdeleine de Vimont à Castres-sur-Gironde. 30 vendangeurs sur le pont depuis ce matin, très appréciés de tous.

C’est la reprise pour ces 30 travailleurs en situation de handicap de l’Etablissement et Service d’Aide par le Travail (ESAT) Magdeleine de Vimont à Castres-sur-Gironde, un coup d’envoi des vendanges en blancs au château la Garde à Martillac en Gironde; un travail important et aussi valorisant.

« C’est très facile, on met la main comme cela et puis on coupe comme ça pour ne pas se couper », explique Yannick, qui a commencé les vendanges il y a 25 ans déjà au château Crabitey « en 1997, ça date … » commente-t-il encore.

Sabrina : « nous faisons différentes activités au sein de l’ESAT qui sont assez sympathiques, moi ça fait 17 ans que j’y suis, on récolte donc la vendange, c’est assez simple, on coupe et on vide dans les cagettes, pour après mettre dans les cuves quand ce sera trié…Nous faisons plusieurs châteaux différents également. »

Tous sont majeurs et ont entre 18 et 60 ans, ils ont quelques « déficiences mentales légères ou moyennes, ou peuvent encore être autistes », selon Christophe Jussier chef d’atelier de l’ESAT Magdeleine de Vimont. Ce sont en tout cas des travailleurs professionnels, très motivés. Quelle est l’ambiance ici ? « Bonne, très bonne, le chef de culture est vachement sympa, on rigole bien, après il faut être sérieux au travail comme tout le temps… », commente Julien, habituellement sur les espaces verts, mais venu prêter main forte à la vigne.

C’est déjà une reconnaissance de leur activité, une professionnalisation de leur métier, puisque l’on met en place un ensemble de pratiques et de formations pour qu’ils puissent se professionnaliser dans ce métier qu’est la vigne, on le fait également sur le secteur du chai » Christophe Jussier ESAT Magdeleine de Vimont

Et de compléter :« Cela vient finaliser l’ensemble de toutes les pratiques qu’on met en oeuvre… On le sait 80 à 90% de la qualité d’un vin provient d’une qualité de vendanges donc pour eux c’est aboutir à un travail d’une saison qui se termine (car ils font aussi les travaux hivernaux et travaux en vert à la vigne) et qui va débuter par l’élaboration du vin aussi. On a aussi la possibilité de produire du vin sur l’ESAT… »

Cela fait 5 ans que ces travailleurs participent aux vendanges du château la Garde, qui compte 54 hectares (3,5 en blanc et 50,5 en rouge); ils effectuent ici un travail méticuleux.

Pierre Estorge, directeur d’exploitation du château La Garde, et Frédéric Bonnaffous, directeur des vignobles Dourthe © JPS

C’est vraiment un travail de grande précision qu’ils maîtrisent à merveille; ils ne vont pas très vite, mais nous c’est exactement le rythme que l’on recherche, parce qu’on est dans une dimension de précision qui doit correspondre au micro-parcellaire, et aux variations de terroirs que nous avons sur la propriété », selon Pierre Estorge, responsable d’exploitation du château La Garde.

Pour Frédéric Bonnaffous, directeur des Domaines Dourthe : « on a voulu depuis des années privilégier des gens en local et aussi l’ESAT qui proposait des travailleurs handicapés pour les travaux de la vigne, que ce soit au moment des vendanges mais aussi toute l’année parce que c’est aussi important pour arriver à fidéliser des équipes, il faut leur proposer du travail toute l’année… Et nous le principe de proposer du travail à des établissements d’insertion, c’est quelque chose qui nous tenait à coeur dans la vision qu’on a de l’entreprise aussi de l’insertion de l’entreprise dans son environnement… »

L’ESAT de Castres-sur-Gironde collabore ainsi avec 15 propriétés viticoles et s’est spécialisée depuis quelques années dans les travaux de la vigne et des espaces verts.

Regardez le reportage de Jean-Pierre Stahl, Nicolas Pressigout et Sarah Colpaert :

19 Août

Vendanges : portraits croisés des petites mains de la vigne

On les appelle les petites mains de la vigne, ce sont des étudiants, retraités, travailleurs saisonniers ou étrangers. Tous méritent d’être à l’honneur, car sans eux il n’y aurait pas de vendanges… Rencontre ce matin avec ces salariés engagés pour un dur labeur, qui méritent et montrent l’envie de bien faire, avec un smic ou parfois un peu plus. Néanmoins, cela devient compliquer de recruter ces vendangeurs et travailleurs saisonniers.

A l’embauche ce matin, Lisa est encore hésitante, elle se fait monter la manière de couper le raisin et de ne garder que le bon, en retirant parfois du pourri ou des baies desséchées. Lisa a 22 ans, elle est étudiante en master de l’intervention et du développement social et participe pour la première fois aux vendanges de Smith Haut Lafitte à Martillac en Gironde :

« c’est la première fois cette année, je fais les vendanges en tant que petit boulot d’été et en tant qu’étudiante, parce que j’en ai besoin… Cela permet d’aider mes parents à payer mon loyer, et à payer d’autres choses. »

« Cela représente une source de revenus et pour moi une avancée dans mon orientation pro car je vais faire des études en agronomie », commente Julien cet autre étudiant de 18 ans.

Au châteaux Carbonnieux à Léognan, on y trouve une poignée de retraités de 75 et même 80 ans comme Marie-Josée et Daniel. Malgré la pénibilité du travail et la chaleur, ils sont toujours là depuis plus de 20 ans, par envie, par habitude mais surtout pour compléter leur pension avec un salaire au niveau du smic (parfois un peu plus, avec le panier repas).

« C’est un apport au budget, et ce n’est pas plus désagréable qu’autre chose mais c’est surtout un apport au budget » commente Marie-Josée 75 ans; « je pense que je vais continuer un peu, mais pas longtemps (rire), mais enfin je diminue quand même mes journées surtout avec les chaleurs de cette année », commente Daniel 80 ans.

Dans ces vignobles, de nombreux saisonniers aussi des locaux mais aussi pas mal d’étrangers. Autrefois de la main d’oeuvre espagnole ou portugaise, désormais aujourd’hui davantage originaire des pays de l’Est comme ces bulgares sédentaires à Bordeaux Sylvia et Thiomir. « C’est bien, chaque année on vient pour travailler chaque saison ici »

« Il est clair que dans des régions plus éloignées de Bordeaux, c’est beaucoup plus compliqué de trouver du monde mais quelque part on sent un peu plus de tension depuis quelques années pour trouver du monde pour travailler dans les vignes que ce soit en saisons et même en vendanges, même si c’est un peu moins marqué en vendanges car il y a un peu ce côté magique des vendanges qui attire des gens, » selon Fabien Teitgen directeur général du château Smith Haut Lafitte.

Si certains châteaux continuent de recruter sur place, de plus en plus font appel à des entreprises prestataires de service…Et parfois les demandes peuvent être supérieures à l’offre.

Regardez le reportage de Jean-Pierre Stahl et Astrid Ferbos :

17 Août

Bordeaux : on vendange désormais à la mi-août…

C’est historique. Avec le réchauffement climatique, les vendanges se rapprochent de plus en plus de la mi-août. En Pessac-Léognan, les premiers sauvignons blancs ont commencé à être récoltés depuis ce mardi 16 août au château Carbonnieux à Léognan. Les châteaux Picque-Caillou, Luchey-Halde à Mérignac ont aussi démarré. Demain, au tour des vignobles André Lurton, de Latour-Martillac et Smith-Haut-Lafitte.

Pour Eric Perrin, ces vendanges figurent parmi les plus précoces ces 25 dernières années © JPS

On peut en rire, ou en pleurer. Mais finies les vacances tranquilles pour les propriétaires et leurs équipes de vendangeurs, tout s’accélère et il faut désormais planifier des vacances avant !

Imaginez plutôt, des maturités optimales le 12 août sur certaines parcelles… Le château Carbonnieux voulait donner son coup d’envoi vendredi dernier mais a du y renoncer du fait d’un manque de main d’oeuvre.

C’est donc hier que la troupe de 50 coupeurs et porteurs a commencé à s’activer dans les rangs de vigne et à récolter ce millésime 2022; un millésime parmi les plus précoces avec 1997, 2003, 2011 et 2020…

« On a été surtout très inquiet avec les 4 épisodes de canicule cet été, en se disant la vigne va souffrir, on va connaître enfin du stress hydrique et regardez la vigne est restée très verte, aujourd’hui les baies, c’est sûr, sont un peu plus petites que d’habitude, mais d’un point de vue aromatique et qualité, on est plutôt content », témoigne Eric Perrin du château Carbonnieux.

A Mérignac, le château Luchey-Halde a démarré ce matin… Même si la vigne a montré ces derniers jours quelques signe de souffrance, les 130 millimètres tombés en juin ont été salvateurs et ont donné des réserves en eau suffisantes pour affronter les 2 premiers épisodes de canicule. En revanche, les degrés mesurés témoignent d’une année chaude.

« Il y a un fort degré potentiel alcoolique, nous c’est notre premier jour de vendange, je pense qu’on va ramasser des blancs qui vont être entre 13 et 14 degrés, ce qui est très très élevé, pour nous »,, Pierre Darriet directeur d’exploitation de Luchey-Halde

Avec ces vendanges avancées, les équipes vont savoir maîtriser les équilibres sucres et acidité au chai. Toutefois des questions se posent sur certains cépages pour les années à venir.

« Nos cépages commencent à connaître pour certains leurs limites, comme le sauvignon, le merlot… On voit bien que la sécheresse, les degrés alcooliques commencent à créer des soucis, on va devoir prendre des mesures certainement au niveau de la conduite de la vigne et au niveau de l’irrigation… » Andrea Perrin oenologue et maître de chai au château Carbonnieux.

Cette année l’appellation Pessac-Léognan a eu une dérogation pour pouvoir arroser la vigne, peu l’ont fait, mis à part sur les jeunes plants.

En tout cas les vendanges des blancs risquent ici de se terminer début septembre et pour les rouges démarrer fin août et s’échelonner jusqu’à fin septembre, début octobre en Pessac-Léognan.

Regardez le reportage de Jean-Pierre Stahl, Guillaume Decaix et Sarah Colpaert :

20 Oct

Sauternes : le millésime 2021, une édition limitée, quasi « collector »

Sauternes devrait enregistrer l’une des plus faibles récoltes depuis le fameux gel de 1991, à l’heure où se poursuivent ses deuxièmes tries.En cause le gel d’avril qui a été très sévère, jusqu’à -8°C par endroits. Il n’empêche, le botrytis qui permet de faire de grands vins liquoreux est bien présent et devrait augurer d’un grand millésime, mais en faible quantité. 

Alexiane Siscard vendangeuse dans les rangs de sémillons botrytisés © JPS

A Sauternes, ce millésime 2021 se présente comme une édition limitée, voire « collector ». Une récolte infime, en plus du travail de tries successives (où les vendangeurs passent 3 à 5 fois), de haute couture, pour ne garder que ces raisins botrytisés…

« Il faut séparer la pourriture noble, de la pourriture aigre, parce que sinon cela donne un mauvais goût au vin, le aigre », explique Alexiane Siscard vendangeuse.

Au château d’Arche, le gel d’avril a amputé sérieusement la récolte. Au lieu de 100 000 bouteilles habituellement produites, on n’en prévoit que 10 000 année…

Didier Galhaud, directeur général délégué du château d’Arche © JPS

« Ici on est sur le haut-plateau du château d’Arche et il a fait -4°C pendant plus de 3 nuits, c’était les températures les plus hautes qu’on ait eu, on est descendu jusqu’à -8°, sur certaines parcelles du château plus bas, donc c’était assez dramatique, et on a perdu jusqu’à 80% début avril, cela me fait mal au coeur…

 

Un joli travail sur les sols avec ces chevaux de labour menés par Rod Trait © JPS

Sauternes et Fargues s’en tirent un peu mieux que les autres villages de l’appellation comme Bommes, Preignac et Barsac.

Jean-Jacques Dubourdieu, président de l’ODG Barsac Sauternes © JPS

« On sait qu’on sera en dessous du quart d’une récolte normale, on n’a pas encore la copie générale de l’appellation, on sait que ce sera assez faible, plus faible que des années qu’on a connues par le passé comme 1991, année de grand gel, ou même 2017 plus récemment. »

A Bommes, au château la Tour Blanche, 7 hectares on entièrement gelé et n’ont rien produit, ici on s’attend à un très faible rendement de 4 hectolitres à l’hectare, la plus petite récolte jamais enregistrée. La dernière grosse année de production remontant à 2016 avec 16 à 17 hectolitres à l’hectare…On réfléchit sérieusement à l’avenir et on se tourne déjà vers 2022…

Miguel Aguirre, directeur d’exploitation du château La Tour Blanche © JPS

« On va investir sur des moyens de lutte, anticiper ce changement climatique qui nous impacte,  .Nous, c’est la 5e année en 10 ans, qu’on a un aléa climatique, donc là il y a une vraie réflexion de fond, sur la partie technique et sur la partie investissement forcément pour lutter contre ces aléas », explique Miguel Aguirre directeur d’exploitation du château la Tour Blanche..

Dans les chais, les vignerons de Sauternes comptent sur leur stocks pour faire face. En 10 ans, les stocks ont toutefois été divisés par 2,preuve d’un nouvel engouement pour les Sauternes, en plus des aléas.. Au château la Tour Blanche, la dernière grosse récolte remonte au millésime 2016, celui-ci était 4 fois plus abondant que le 2021.

Regardez le reportage de Jean-Pierre Stahl, Jean-Michel Litvine et Rémi Grillot :