Alors que les vendanges sont partout sérieusement entamées et dans de bonnes conditions, le Président du CIVB dresse un bilan mitigé mais qui montre des signes positifs. Ainsi un recul de 7% sur le marché français des grandes et moyennes surfaces, mais aussi une baisse en volume de 7% également sur le marché européen. Toutefois, sur un an les exportations vers la Chine repartent avec +3% et surtout +43% sur le 2e trimestre de 2015.
Bernard Farges président du Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux © JPS
Voici en substance le point fait ce jour par Bernard Farges le Président du CIVB à Bordeaux:
« Le 23 septembre 2015, nous sommes vraiment au coeur des vendanges, l’activité dans les vignes et dans les chais est très intense.
Après un printemps et un début d’été chauds et secs, où les différentes étapes du cycle de la vigne se sont enchainées dans des conditions idéales, (débourrement, floraison) nous attendions de la pluie en août pour des conditions de maturation du raisin optimales. Cette pluie est arrivée au très bon moment et la situation du vignoble au tout début des vendanges était idéale.
Pour les blancs secs maintenant récoltés, nous constatons une récolte plutôt déficitaire mais de belle qualité. Pour les rouges, les volumes seront proches de la normale, nous sommes très confiants sur la qualité à venir, il ne reste plus que quelques jours à attendre.
1) L’ECONOMIE DE NOTRE FILIERE
Commercialisation : situation sur les marchés, chiffres arrêtés à fin juin 2015
La campagne écoulée a été caractérisée par :
La faiblesse des stocks liée à la petite récolte 2013 (3, 84 MHL) ;
Le peu de volumes à commercialiser, le millésime 2014 (5, 27MHl) n’a eu d’effet sur la commercialisation qu’à partir du mois d’avril 2015 ;
Les échanges mondiaux de vin ont marqué le pas en 2013 et 2014. En juin 2015, nous avons retrouvé le niveau atteint 3 ans auparavant soit 95 millions d’hectolitres.
2) Marché français – Grandes et Moyennes Surfaces
Dans ce circuit, recul de 7 % en volumes, 174 millions de bouteilles/ chiffre d’affaires stable : 901 millions d’euros (=).
Les produits gagnants :
le coeur de gamme des vins de Bordeaux (de 4 à 15 €).
+ 4 % pour les bouteilles vendues entre 4 et 6 €et + 9 % pour les bouteilles entre 6 et 15 €
Forte baisse des produits à moins de 3 €(- 32 %).
Ces résultats sont conformes à la stratégie du Plan « Bordeaux demain » 2010 visant à faire évoluer l’offre Bordeaux sur des segments mieux valorisés tout en offrant aux consommateurs un excellent rapport qualité-prix
Export : des signes forts de reprise
Depuis le début de l’année 2015, des signes encourageants de reprise sont constatés, particulièrement sur la Chine.
Si les données arrêtées à fin juin 2015 (évolution par rapport à juin 2014) indiquent :
277 millions de bouteilles de vins de Bordeaux exportées (- 4 %) pour un chiffre d’affaires de 1, 83 milliard d’€(+1 %), le second trimestre 2015 montre une progression des exportations de 2 % en volumes et 10 % en valeur (Evolution par rapport au second trimestre 2014).
Sur le grand export :
Forte reprise de la Chine. La Chine qui a connu un fléchissement de ses importations de vin, de début 2013 à juin 2014, redémarre et Bordeaux suit la tendance
Exportations en hausse de 3 % entre juin 2014 et juin 2015 et surtout vif redressement + 43 % sur le 2nd trimestre 2015.
Hong Kong bien orienté avec + 1 % en volume, entre juin 2014 et juin 2015
Bordeaux se maintient sur les USA (+ 1 % en volume entre juin 2014 et juin 2015)
Les AOC Bordeaux et Cotes représentent 60 % des vins de Bordeaux exportés aux USA. Le coeur de gamme s’est nettement renforcé sur ce pays.
[A noter que le cours avantageux de l’€par rapport au dollar concerne aussi les autres producteurs de vins européens et Bordeaux maintient ses volumes depuis 3 ans sur ce marché].
Le marché européen continue de ralentir ses importations de vin et les vins de Bordeaux n’échappent pas à ce contexte ; ils sont en repli de 7 % en volume.
Baisse en Belgique (- 8 %) et Royaume Uni (- 21 %).
En revanche, l’Allemagne progresse toujours (+ 10 %) ainsi que les Pays Bas (+ 21 %).
3) COMMUNICATION ET MARKETING
Sur les sujets de communication et de marketing, aucun de vous n’aura manqué notre campagne de communication dévoilée il y un an avec ses nombreuses déclinaisons. Elle ne se limite pas à la façade du CIVB et s’est déployée sur nos 7 pays prioritaires sous de multiples formes.
Cette saga autour de notre emblème, la bouteille bordelaise rappelle la qualité, la diversité, l’accessibilité et l’authenticité de nos vins.
Ces valeurs que nous défendons sont au centre de toutes nos actions de communication : les formations conduites par l’Ecole du Vin du Bordeaux, nos échanges avec les grands comptes du Trade, avec les journalistes, les prescripteurs, et surtout avec nos consommateurs.
Entre le 27 août et le 25 octobre, c’est-à-dire en 60 jours et avec des vendanges pendant cette période, nous aurons réalisé trois fêtes du vin :
– Québec (du 27 au 30 août) où nous avons eu 50 000 visiteurs, 13 000 pass dégustation vendus, 150 000 dégustations, 6500 personnes formées à l’Ecole du vin.
– Bruxelles (du 10 au 13 septembre) : 65 000 dégustations, 1300 personnes formées à l’Ecole du vin,
– Hong Kong à venir fin octobre (du 22 au 25 octobre), nous attendons plus de 150 000 visiteurs après avoir eu 180 000 visiteurs en 2014.
Plus de 60 professionnels bordelais à chaque fois sur chacune de ces fêtes du vin, c’est une vraie machine de guerre !
Nous allons à la rencontre de nos consommateurs, le verre à la main pendant 4 jours, ces professionnels participent bénévolement à cette oeuvre collective. Ces actions sont un des éléments de soutien aux viticulteurs et aux négociants présents sur ces marchés.
Nous défrichons le terrain pour transformer cette relation avec les vins de Bordeaux en acte d’achat.
4 CONCERNANT LES ASPECTS ENVIRONNEMENTAUX
Abordons tout de suite le sujet de l’étude de l’Institut national de veille sanitaire (INVS) à Preignac.
Ce rapport nous a beaucoup intéressés. Rappelons que les viticulteurs et la filière sont concernés au premier chef. Les viticulteurs travaillent dans les vignes, leurs salariés aussi. Leurs enfants vivent souvent au milieu des vignes, parfois même ils vont à l’école ( !) parfois même l’école est près des vignes.
Rappelons ensuite que nous utilisons des produits homologués par l’Etat avec des autorisations de mise en marché semblables aux produits pharmaceutiques que chacun de nous utilise.
Si l’application de ces produits n’est pas conforme comme cela a été le cas à Villeneuve de Blaye en 2014, que ce soit des produits bio ou non, nous condamnons évidemment ces pratiques. La filière, le CIVB, la Chambre d’Agriculture, les syndicats viticoles ont mis en place depuis plus de 20 ans des outils d’aide à la décision, des informations, des conseils auprès de tous les professionnels.
Le mot « omerta » revient souvent mais rarement « omerta » n’aura eu autant d’écho. Par exemple à Preignac, l’enquête a été publiée en 2014, et mise en ligne en août 2015. Les vignes sont dehors, les travaux sont visibles, les viticulteurs ne se cachent pas et la filière communique tous les jours avec ses membres.
S’il y a une omerta, c’est avant tout sur les causes réelles de ces agitations.
Si les conclusions sur le rapport de l’INVS avaient montré un lien direct de causalité, croyez-vous que la profession l’accepterait sans demander des comptes à l’Etat en charge de l’homologation des produits ?
Nous l’avons vu, la filière travaille depuis longtemps sur ces aspects environnementaux, la communication, la formation, les investissements sur la recherche avec un lien fort et unique ici à Bordeaux entre les professionnels et le monde universitaire. Pour illustrer nos actions en cours citons :
– Les cépages résistants aux maladies pour diminuer à terme les intrants ;
– Les maladies du dépérissement du vignoble.
Il est important de noter que plus de 40 % du vignoble bordelais est aujourd’hui engagé dans des démarches de certification environnementale : SME, bio, HVE, Terravitis, Agri-confiance, et ce mouvement s’amplifie.
SUR DES AXES PLUS POLITIQUES
Rappelons l’enregistrement de l’indication géographique Bordeaux en Chine (le 29 juin) et de 45 autres attendu dans quelques semaines.
Ceci est le fruit d’un travail précis entamé il y a quelques années par le CIVB et intensifié depuis deux ans.
Le marché chinois est d’une très grande importance pour Bordeaux. Il était donc indispensable d’y protéger nos appellations. C’est aussi un point extrêmement important dans la reconnaissance des indications géographiques à travers le monde. Vous savez combien la bagarre est rude avec les pays ne voulant pas reconnaitre ce concept de marque collective que sont les indications géographiques et en premier lieu les Etats-Unis. Que la Chine reconnaisse des indications géographiques, c’est donc doublement important pour nous.
POUR REVENIR EN FRANCE
Rappelons les propos du Président de la République à Vinexpo en réunion avec les professionnels, ensuite lors de son discours, enfin lors du « déjeuner sur l’herbe » dans le blayais. Le président de la république a dit à ces trois moments-là : « nous devons clarifier la loi Evin en maintenant les équilibres de cette loi ».
Quelques jours plus tard, un amendement gouvernemental était intégré dans la loi Macron clarifiant la loi Evin. Hélas, le 6 août, le Conseil Constitutionnel a invalidé cet amendement sur la forme en précisant qu’il s’agissait d’un cavalier législatif et concernait des sujets de santé.
La loi de santé revient à l’Assemblée nationale courant octobre après un vote au Sénat le 15 septembre. L’amendement gouvernemental déposé par des sénateurs de la majorité et de l’opposition a obtenu 287 voix pour et 30 voix contre. Cela est conforme aux engagements du 1er Ministre et du Président de la République. Nous attendons évidemment que ces engagements-là soient maintenus jusqu’au bout c’est-à-dire jusqu’au vote définitif à l’Assemblée nationale.
Vous le voyez, tout ce chantier, tous nos choix, toute notre stratégie reposent sur des piliers solides :
1) L’AOC avec son lien au terroir, aux territoires avec la spécificité de nos vins et la capacité à réguler la production. Nous défendons cette marque collective.
2) Le lien direct avec les consommateurs par nos actions collectives sur l’image de Bordeaux, en appuis des actions commerciales des viticulteurs et des négociants.
3) Enfin le choix stratégique de fléchage des aides communautaires vers les investissements qu’ils soient de promotion, de restructuration du vignoble ou d’investissements de chais.
Si Bordeaux va mieux c’est aussi grâce à ces choix-là. D’autres filières agricoles ont fait d’autres choix, elles sont aujourd’hui en grande difficulté. Pour ce qui nous concerne nous avons refusé le saupoudrage des aides communautaires, nous avons lutté pour garder des outils de gestion de la production, nous avons fait le choix exigeant du terroir et de l’AOC, nous investissons pour rester en lien direct avec nos consommateurs. Ce sont des choix judicieux. Ils sont difficiles, ils sont couteux mais ce sont les bons ».
Bernard Farges, Président du CIVB