C’est une première à Bordeaux. Les Vignobles Ducourt sont les premiers à sortir « Métissage », un vin rare et innovant, le premier issu de cépages résistants, au terme de 3 années de préparation. Interview en exclusivité de Jonathan Ducourt, qui a mené avec son frère Jérémy l’expérimentation, il est l’invité de Parole d’Expert dans Côté Châteaux.
Jonathan Ducourt du château Beauregard-Ducourt dans l’Entre-Deux-Mers © Jean-Pierre Stahl
Côté châteaux avait suivi Jérémy Ducourt dans sa vigne en avril 2016; à l’époque il m’expliquait que ces cépages résistants pourraient être une alternative à l’usage de pesticides d’où l’intérêt à l’heure où la société, les syndicats viticoles et l’interprofession réfléchissent sur la diminution des intrants. « ces variétés vont permettre une réduction importante des volumes de produits employés car dans une campagne classique on va traiter 10 à 12 fois par an, sur les variétés résistantes on se limitera à 1 ou 2 traitements à l’année, d’où une réduction de 90% des produits phytosanitaires », expliquait en avril 2016 Jérémy Ducourt.
Jean-Pierre Stahl : « Bonjour Jonathan, ça y est vous avez enfin sorti votre vin issu de cépages résistants ? Vous êtes les seuls à Bordeaux ? »
Jonathan Ducourt : « Oui, à part l’Inra qui a un vignoble de variétés résistantes, nous sommes les premiers producteurs à Bordeaux. »
JPS : « Vous les avez plantés quand ? »
Jonathan Ducourt : « Il y a 3 ans. « Métissage », c’est la 3e année. On a planté 1,3 hectares de blancs et 1,7 hectares de rouge. Pour le blanc, c’est le « cal 604 », un croisement de sauvignon blanc, de riesling, et de vignes sauvages dont les parents sont connus. Ce terme de cal 604, je suppose que le nom va évoluer quand les cépages seront classés en France, c’est le nom qu’a donné l’agronome qui les a croisé. En rouge, c’est le cabernet jura, croisement du cabernet sauvignon et de vignes sauvages (plus robustes).
Jeremy Ducourt devant un pied de Réselle, un cépage résistant en blanc © Jean-Pierre Stahl
JPS : « Vous venez de sortir Métissage en bouteilles en blanc et le rouge, il est encore en barrique ? »
Jonathan Ducourt : « Le rouge, on vient juste de le mettre en bouteille, on n’a pas fait d’élevage en barrique, on est sur le fruit. Mais on verra par la suite. Comme ce sont de nouvelles variétés, il faut qu’on apprenne comment on ramasse, comment on vinifie, comment on élève, on a tout à apprendre, on part d’une page blanche.«
« C’est un vin rare, vous ne pouvez pas échanger avec vos voisins, sur comment on vinifie… L’an dernier, on a eu tellement peu de récolte avec 100 kilos de raisins, là en 2016 on a ramassé plus et on va commencer à commercialiser (en Vin de France). »
JPS : « Etes-vous satisfait du goût ? »
Jonathan Ducourt : « On est content. Sur le blanc, c’est variétal, il y a une bonne acidité et c’est aromatique. C’est un peu dans le style des blancs secs de Bordeaux, des sauvignons blancs de Bordeaux. Ca correspond à ce qu’on attendait comme variété, on est content ».
« Le rouge est atypique. On n’est pas sur un profil classique de cabernet sauvignon mais plutôt sur un vin du sud, un gamay très mûr, c’est assez particulier. »
Métissage, le blanc 2016 en bouteille (étiquette peinte par Tan En artiste peintre chinois), bientôt commercialisé, et l’échantillon de 2015 © JPS
JPS : « Comment envisagez-vous la suite ? »
Jonathan Ducourt : « Il y a un décret qui est passé au Printemps Fin avril 2017, le Ministère de l’Agriculture a validé le classement de douze cépages résistants. On va en replanter. C’est agréé par le gouvernement. L’idée est d’avoir un îlot de variétés résistantes et de faire une production plus élevée, car aujourd’hui c’est assez confidentiel. On va en replanter 4 hectares de plus l’année prochaine ce qui portera à 7 hectares de cépages résistants. »
Le 22 juin prochain, ce sera un grand moment, on va faire découvrir ces variétés et nos vins, à la Maison Eco-Citoyenne, une conférence avec l’INRA.
Côté Châteaux aime souligner les initiatives et les nouvelles tendance du monde du vin. Un coup de chapeau à la famille Ducourt.
Regardez le reportage de Jean-Pierre Stahl et Pascal Lécuyer en avril 2016 :