Une petite histoire de La Jonchère
Aux origines
Situées au nord-ouest de l’arc du Taurion, La Jonchère et les environs sont le lieu d’un peuplement important pendant l’Antiquité. L’oppidum gaulois lémovice du « Chatelard », d’une superficie de 9 hectares (sur l’actuelle commune de Jabreilles-les-Bordes, au Maillorat) – Âge du fer 2, 450-25 av. J.C., apogée de la civilisation celtique –, et l’ensemble cultuel du Puy-de-Jouer (Saint-Goussaud) en sont les témoins. Avec ses 687 m d’altitude, le Puy de Jouer était un poste naturel d’observation et de surveillance grâce à l’importante trouée naturelle entre les monts d’Ambazac et les gorges abruptes du Taurion. Les Romains utilisèrent cette position en y installant, au carrefour des anciennes routes de Limoges à Argenton et de Limoges à Clermont, un centre de culte de hauteur, avec plusieurs temples et un monument identifié comme théâtre[1]. Les lieux étaient aussi sillonnés par un itinéraire de long parcours, axe économique reliant les mines d’étain de Bretagne à la Méditerranée. Un tronçon a été repéré en 1979 aux Grands et Petits Marmiers remontant vers Jabreilles et le Puy du Chatelard. Régionalement, cette voie était le seul accès aux gisements miniers du nord des Monts d’Ambazac et de Saint-Goussaud (Etain, cuivre, or). Selon l’abbé H. Pailler, qui écrivit en 1921 une sérieuse monographie à son sujet, La Jonchère « était une des villes les plus anciennes de la Basse-Marche », même si on ne connaît pas exactement la date de sa fondation[2]. Il fait part, toutefois, de la découverte sous l’ancien presbytère d’une fosse rectangulaire dans laquelle étaient « des ossements d’homme et de cheval, qui furent reconnus à l’examen remonter à l’époque gallo-romaine », et d’une « superbe urne funéraire du IVème ou Vème siècle » trouvée à Entrecolles, à quelques kilomètres de La Jonchère. Il mentionne également des « médailles, silex, pierres taillées dont l’origine gallo-romaine ne saurait faire de doute ». Nombre de caves spacieuses non datées existaient aussi. Sur le bord du sentier conduisant au sanctuaire de Sauvagnac se trouve la fontaine du sang, dont la légende attribue le nom au fait qu’un combat meurtrier aurait eu lieu entre Gaulois et Romains et que pendant plusieurs jours, de la fontaine aurait coulé du sang.
Lors de la christianisation, le pôle de peuplement autour de Jabreilles perdure. Une chapelle (détruite) dédiée à Saint Martin indique une paroisse « primitive » constituée vraisemblablement à l’époque mérovingienne. Cette entité territoriale ecclésiastique englobait les Billanges et La Jonchère – un lieu de culte privé existant peut-être déjà dans le bourg, le culte de Saint Maurice apparaissant dès le IVème siècle. Avec la chapelle Saint Blaise des Petits Marmiers et Sainte-Anne des Grands Marmiers, la possibilité est réelle d’être en présence de sanctuaires liés à d’importants domaines fonciers comme c’est le cas de Feytiat ou de Salagnac[3]. L’administration carolingienne dote les comtes de supplétifs nommés les «vicaires ». Ceux-ci organisent et ordonnent la vie économique et cultuelle d’un espace géographique donné. La Jonchère est alors intégrée dans la Vicaria de Salagnac (commune de Grand-Bourg (Creuse). Au début du XIème siècle, c’est la formation du Comté de la Marche par Boson le Vieux, dont les successeurs – plusieurs fois en conflit avec les vicomtes de Limoges – demeurent les titulaires, du moins jusqu’au mariage d’Almodis, attributaire du comté par son oncle Eudes dans les années 1095-1098, avec Roger de Montgomery[4]. Un siècle plus tard, c’est la famille de Lusignan qui devient la détentrice du comté et oscille entre les monarchies française et anglaise, jusqu’à l’entrée dans les possessions royales de France sous Philippe IV le Bel, soucieux d’accroître son pouvoir en Limousin, puis – suite à un échange opéré par son fils Charles IV le Bel – au sein de la Maison de Bourbon. La Jonchère – qui sera dite « ville » en 1508 – était le chef-lieu d’une châtellenie relevant de l’évêché de Limoges.
[1] DIREN Limousin, Les sites protégés du Limousin, la Creuse, PULIM, 2002.
[2] La Jonchère-Sainte-Maurice ses origines, son histoire, Imprimerie-Papèterie A. Bontemps, 1921. Une partie de nos informations non explicitement sourcées proviennent de cet opuscule de 30 pages.
[3] Site internet de La Jonchère-Saint-Maurice.
[4] Collectif, Creuse, Christine Boneton, 2007, p. 30.