Place des Bancs, années 60-70 (collection particulière)
Il y a peu, des rumeurs (démenties par la Municipalité) ont circulé en centre-ville, annonçant la disparition du marché de la place des Bancs après travaux. Bien entendu, cela aurait été une grave erreur, la place ayant une vocation commerciale depuis l’époque médiévale et contribuant agréablement au dynamisme du centre-ville…
Marchande allumant un brasero (photothèque Paul Colmar)
La place des Bancs a été intégrée à l’enceinte du Château (la ville autour de l’abbaye Saint-Martial et de la motte du vicomte) au début du XIIIe siècle. A la même époque, la place du Marché devint la place du Vieux-Marché (place du Poids-Public) et la place des Bancs lui succèda dans sa fonction commerçante. Les bouchers étaient désormais tenus d’y vendre leur marchandise. Ils quittèrent les abords de l’étang de Palvézy et le faubourg Boucherie (rue Raspail et rue du Collège) et s’installèrent rue Torte, aujourd’hui rue de la Boucherie, à côté de la place des Bancs. Cette place servira longtemps de marché à la viande et au pain.
Dans les dernières années du XVIe siècle, une halle est construite au-dessus des bancs charniers (ils sont à l’origine du nom de la place). En 1743, celle-ci est démolie sur ordre de l’intendant Tourny (1730-1743), qui souhaite assainir le centre-ville. Pour embellir la place, qu’il renomme place Royale, il fait édifier une fontaine dont le trop-plein est conduit à la fontaine de l’hôpital en 1768. Lors du pavage de la place des Bancs en 1843, la fontaine est supprimée ; des bornes-fontaines, rue Jauvion et rue de la Loi lui sont substituées.
La place au début du 20ème siècle (collection particulière)
Quand le musicien russe Modeste Moussorgski compose en 1874 ses Tableaux d’une exposition, il s’inspire des toiles de son ami décédé, le peintre Victor Hartmann, qui est passé par Limoges vers 1860 et a peint la place des Bancs. Le Marché de Limoges est la septième des dix pièces de cette suite pour piano, orchestrée par Maurice Ravel en 1922 et l’une des plus célèbres avec La Grande Porte de Kiev.
Les détails sur le site Géoculture
A la Révolution, les Girondins, et leur chef de file Vergniaud, fréquentaient, dans l’ancienne maison Marmignon (XIVe siècle), un café, qui ne s’appelait pas encore Café des Girondins (il portera ce nom à partir de 1847). L’édifice est démoli puis reconstruit entre 1914 et 1918 par l’architecte Claude Lamargue. Certains éléments de l’ancienne façade sont intégrés à la nouvelle : les trois arcs brisés incorporés dans le mur du premier étage et les modillons soutenant le bandeau séparant le rez-de-chaussée de l’étage. Le magnifique café tel qu’il est aujourd’hui date de la reconstruction de l’immeuble et sa décoration n’a pas bougé depuis 1918 (la place mériterait qu’il soit plus actif…). Acheté en 1937 par Mme veuve Lazare, l’établissement, qui a pris le nom de Café 1900, 12 place des Bancs, a été revendu par sa belle-fille en 2005 (elle avait épousé M. Lazare, juriste qui avait exercé à Paris avant la guerre avant de revenir sur Limoges après sa captivité).
L’avocat Pierre Vergniaud, né en 1753, guillotiné en 1793 (suite à une accusation de Robespierre)
Carte postale de la pharmacie Brunot retrouvée par Le Populaire du Centre
L’ancienne pharmacie Brunot, au 22-24, se signale par le caducée d’Hygie qui orne sa façade. La présence d’une pharmacie à cet emplacement est attestée dès le milieu du XIXe siècle.
A la place de l’actuelle pâtisserie se trouvait autrefois le magasin de vin Les Caves du Centre dont le gérant, Marcel Vinoy, aménagea durant la Seconde Guerre une imprimerie de faux-papiers dans les caves, en liaison avec Lecomte-Chaulet.
Marcel, Françoise et Rose Vinoy dans leur magasin
En face, l’ancienne boutique de tissus de Lecomte-Chaulet est agrémentée de belles mosaïques qu’il conviendrait de restaurer/entretenir. A partir de 1942, le mouvement de résistance Franc-Tireur s’organise sous la direction D’Edgar-Eugène Lecomte-Chaulet, avec l’aide de son fils Robert-Jean. Parmi les membres du réseau, Arsène Bonneaud, professeur à l’Ecole de médecine de Limoges révoqué par Vichy (mort en déportation à Buchenwald), secondé par Maurice Rougerie, instituteur – père de René, lui-même résistant et futur célèbre éditeur de poésie. Pierre Lavaurs, entrepreneur, gère la réception du journal Franc-Tireur (2 000 exemplaires distribués en 1943).
Sur cette photo de l’immédiat après-guerre, avec Lecomte-Chaulet (il est en béret): son épouse, Rose Vinoy et la petite Françoise Vinoy.
L’histoire de la place mérite d’être poursuivie, j’y reviendrai dans ce blog car il y a encore beaucoup à raconter et à montrer à son sujet! Et l’on attend avec impatience le retour du marché, qui vaut bien celui de « Brive-la-Gaillarde »!