30 Juil

Ils sont fous, ces Romains! (suite et fin)

Je vous ai déjà parlé des thermes à Augustoritum. Il y avait un autre monument d’envergure : le grand amphithéâtre, au nord-ouest de la ville, visible de loin par les voyageurs. Il pouvait accueillir environ 25 000 spectateurs assis, ce qui le classerait au 4ème rang en Gaule. Xavier Darcos a parlé de l’amphithéâtre romain comme « lieu typique et décisif de l’Antiquité romaine (…) C’est là que le peuple se sent uni et assiste au simulacre de sa propre puissance. » On ne sait malheureusement rien de précis sur les spectacles et les fêtes qui se déroulaient dans celui d’Augustoritum. Les archéologues ont néanmoins trouvé certains objets où sont représentés un lion, des gladiateurs. De l’autre côté de la ville, au débouché du pont et à l’entrée du cardo maximus, se situait le théâtre antique, d’un diamètre d’au moins 82 mètres.
Le forum, situé là où plus tard fut – par un malicieux hasard – construit l’Hôtel de Ville, était au cœur de la ville, à la croisée des deux artères principales et il exploitait politiquement le relief pour mettre en valeur les aménagements monumentaux. Trois esplanades le composaient, avec de nombreuses boutiques, une place publique centrale, des portiques, sans doute une basilique civile, peut-être un temple du culte impérial (mais ce n’est pas assuré), peut-être aussi un macellum, place close réservée aux foires et marchés. Des statues de notables locaux ornaient le forum.
Une vaste nécropole était située au nord-ouest de l’amphithéâtre. Les découvertes des archéologues ne font mention que d’incinérations, avec deux types de sépultures, en fosse et en coffre. Certaines tombes étaient signalées par des stèles ou des cippes de granit. 33 épitaphes ont été retrouvées, dont celle du professeur de grammaire Blaesianus, originaire de Bourges. Trois célèbres lions de pierre limougeauds avait une destination funéraire : celui qui fut longtemps près d’une porte de la basilique Saint-Martial (aujourd’hui au Musée des Beaux-Arts) et ceux qui encadrent le portail de l’église Saint-Michel-des-Lions. Par ailleurs, le seul cippe monumental complet, monolithe, se trouve au chevet de la cathédrale. Un cimetière de moindre importance se situait Square des Emailleurs et les archéologues ont aussi recensé des tombes isolées. Au Bas-Empire, d’autres firent leur apparition, dont la nécropole Saint-Martial, en partie fouillée à l’occasion d’un chantier de construction en 2012, entre la place de la République et la rue de la Courtine. Les recherches archéologiques entreprises ont montré une utilisation dense de cet espace funéraire, du IVème au IXème siècle, avec des superpositions de tombes.
Les travaux des archéologues montrent un abandon progressif de la ville à partir de la fin du IIIème siècle, lorsque l’Empire romain d’Occident entre dans une phase de crise politique, économique et sociale. C’est ainsi à cette époque que les thermes semblent cesser leur fonctionnement. Le ressenti de l’insécurité pousse certains à enfouir et dissimuler leurs richesses. Des bâtiments publics ou privés sont démantelés dans le but de récupérer des blocs de grand appareil ainsi que du calcaire et du marbre pour confectionner de la chaux. Les familles fortunées s’installent plus durablement dans leurs domaines ruraux. L’essentiel de la population enfin, se déplace de la ville (une partie demeurant cependant toujours près du pont) vers un possible castrum au Puy Saint-Etienne surplombant la Vienne, dès le Bas Empire. C’est la naissance de la Civitas Lemovicum – la médiéviste Bernadette Barrière notant toutefois qu’ « il n’est d’ailleurs nullement certain que la Cité ait été constituée et individualisée dès ce temps. »

Chers lecteurs, rendez-vous fin août, les historiens aussi ont besoin de vacances!

24 Juil

Les frères Popelier, des gars de ch’Nord

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Dans les années 1950, l’Amicale Nord-Limousin réunissait les habitants de la région originaires du Nord, certains étant par exemple venus s’installer au moment de l’Exode de 1940. Sur cette photo, l’homme en costume à droite, portant des lunettes, est l’artiste Roch Popelier, connu pour ses céramiques, ses tableaux, tapisseries, etc. A sa gauche sur le cliché, Marcel et Rose Vinoy, des Caves du Centre, place des Bancs.

Association Nord 001

Sur cette photographie du même banquet (à la Toque Blanche, rue Haute-Vienne), le 4ème en partant de la droite est son frère Xavier (et son épouse), né le 2 décembre 1929, ancien joueur de basket, devenu ensuite le président emblématique du C.S.P. Limoges à partir de 1961. Sous sa direction, le club a d’abord connu une ascension fulgurante, passant du championnat d’excellence régionale en 1972 à la Nationale 1 en 1978, au terme de plusieurs montées successives. Xavier Popelier tenait le magasin La lainière limousine, rue Haute-Vienne.

Photos (c) Françoise Bourdelas.

21 Juil

Années 1960: au temps de la boucherie traditionnelle à Limoges…

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En ces temps de crise de l’élevage, de l’agriculture et même de certains commerces artisanaux, il faut se souvenir du Limoges d’avant la grande distribution (le premier supermarché installé aux Casseaux étant Euromarché, au milieu des années 1970). Sur cette photographie (J.M. Bourdelas), un couple de bouchers de la rue Raspail, Mme et M. Baurianne, et leur fils Roger. A droite l’étal (non réfrigéré), à gauche la chambre froide, dans la cour, le laboratoire. Les habitants du quartier se souviennent encore de cette habitude de réaliser des vitrines très décorées à l’occasion de Noël à laquelle ils participaient. Il y avait une tradition, chez les petits commerçants de ces années-là, qui consistait à préparer de magnifiques vitrines « animées ». Ainsi de René Juge, coiffeur rue Aristide Briand, dont l’attaque d’un château-fort réjouissait les garçons sortant de l’école de la Monnaie (alors non mixte, nous y reviendrons). Donc, à cette époque, les bouchers s’approvisionnaient directement auprès de l’éleveur dont ils connaissaient les bêtes… Le consommateur savait précisément d’où venait la viande qui, certes, était plus chère qu’à l’hyper, mais bien meilleure (d’ailleurs, on n’en mangeait pas à chaque repas).

Un temps, au débouché de la rue du Grand Treuil sur la rue Aristide Briand, au milieu d’autres petits commerces de proximité, il y avait deux boucheries et charcuteries. Mais ces boutiques disparurent après l’implantation des supermarchés…

Et les bouchers qui furent très puissants au Moyen Âge dans la ville du Château, ont progressivement quitté la rue qui leur devait son nom. On peut toujours y visiter la maison traditionnelle de la boucherie, et surtout la chapelle Saint Aurélien où le petit Jésus mangerait, selon la tradition, un rognon… ou même déguster une bonne pièce de viande aux Petits Ventres, dont le nom est inspiré d’une recette de panse farcie aux pieds de mouton. Et se souvenir que les bouchers habitaient dans leurs maisons médiévales, préparaient la viande et la vendaient au rez-de-chaussée, faisaient sécher les peaux sous les combles et abattaient les animaux place de la Barreyrette, aujourd’hui magnifiquement restaurée mais où s’écoulèrent jadis des litres et des litres de sang. Demeure de ces anciens bouchers le vert et le blanc de leur corporation, devenues les couleurs du C.S.P., le club de basket.

Boucherie (rue de la) 122-3 - n° 48 boucherie Plainemaison - n° 46 triperie Tramont - Photothèque P. Colmar

(c) Photothèque Paul Colmar

n° 48, rue de la Boucherie: boucherie Plainemaison (avec les fameux girauds, boudins de veau et de mouton); n° 46, triperie Tramont (vers 1950-60)

On note que les « normes » étaient moins rigoureuses qu’aujourd’hui…

17 Juil

Au jardin de l’Evêché dans les années 1960

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Sur cette photographie (de Jean-Marie Bourdelas), on voit bien un petit garçon rêveur jouant avec son camion miniature, mais on aperçoit surtout, à l’arrière-plan, le grand arbre abattu par la suite, près du bassin où voguaient les voiliers…

A droite, l’Hôtel-de-Ville.

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Sur ce cliché des années 1960, on admire la cathédrale St-Etienne, dont les travées (plus claires) entre le clocher et le reste de la nef furent achevées en 1888. On distingue également le jardin botanique souhaité par le maire Louis Longequeue, pour l’édification des étudiants de la Faculté de pharmacie. Ce qui explique la présence de son buste à l’entrée dudit jardin aujourd’hui.

05 Juil

Sur les bords rafraîchissants de la Vienne

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Photo: Jean-Marie Bourdelas

Dans les années 1960, au premier plan, en partie submergé, un célèbre bateau à fond plat, un bateu, que les ponticauds manoeuvraient à l’aide du conte, une perche de châtaignier durcie au feu, prenant appui au fond de la rivière. A l’arrière, un vivier où l’on plaçait les poissons capturés.

Le bateau pouvait aussi servir à passer un promeneur d’une rive à l’autre contre rétribution.

En arrière-plan: le pont et la cathédrale St-Etienne.

03 Juil

Canicule, 1976

1976 camping naturiste

Dans Le Populaire du Centre, Anne-Sophie Pédegert a brossé le portrait de Kiki, Marie-Christine Resnikow, qui tint la boutique Touchatout à Limoges et se souvint bien de la canicule 1976…

Le mot canicule, selon Météo-France, «désigne un épisode de températures élevées, de jour comme de nuit, sur une période prolongée». Les seuils ne sont pas les mêmes d’une région à l’autre et la chaleur doit durer au moins trois jours.

L’année scolaire 1975-76 s’acheva le mercredi 30 juin 1976 – Limoges étant dans la zone B.

De la fin juin à la mi-juillet, tous les records de chaleur sont battus. Il faut remonter jusqu’en 1921 pour trouver de semblables conditions climatiques. En termes d’impact sanitaire, une vingtaine de départements ont vu leur mortalité s’élever de près de 10%, selon Météo-France. En juin, à Limoges-Bellegarde, le thermomètre monte jusqu’à 32° et en juillet à 31°.

Depuis l’hiver, la France souffrait d’un déficit pluviométrique dont les conséquences sur l’agriculture furent désastreuses.  L’indemnisation des victimes de la sécheresse, qui s’éleva à 6 milliards de francs, fut financée en partie par une majoration exceptionnelle de l’impôt sur le revenu: « l’impôt-sécheresse ».

Le bassin d’été de la piscine de Beaublanc fut pris d’assaut, et l’on se baignait dans les rivières et étangs de la Haute-Vienne. Ainsi des Limougeauds fréquentaient-ils la Sablière, au Palais-sur-Vienne, d’autres poussant jusqu’à Saint-Priest-Taurion, transformant le stade de foot en plage et se baignant au confluent de la Vienne et du Taurion. Marie-Christine Resnikow, qui tint la boutique Touchatout à Limoges (celle que son beau-père a surnommé affectueusement « Kiki ») se souvint en 2012, pour Le Populaire : « Nous habitions un petit appartement, avenue Baudin et pour prendre un peu le frais, nous allions nous baigner, le soir, à Saint-Hilaire-les-Places ». Ceux qui eurent la chance de partir en vacances cet été-là (les Limougeauds affectionnant particulièrement Royan sa région) bénéficièrent de baignades très agréables – ce fut mon cas à Port-Louis, dans le Morbihan.

L’année 1976 est par ailleurs celle de la création du lac de Saint-Pardoux, pour créer une activité de loisirs en Haute-Vienne, sur le piémont nord-occidental des Monts d’Ambazac. La zone perdait alors population et activités.