Je vous ai déjà parlé des thermes à Augustoritum. Il y avait un autre monument d’envergure : le grand amphithéâtre, au nord-ouest de la ville, visible de loin par les voyageurs. Il pouvait accueillir environ 25 000 spectateurs assis, ce qui le classerait au 4ème rang en Gaule. Xavier Darcos a parlé de l’amphithéâtre romain comme « lieu typique et décisif de l’Antiquité romaine (…) C’est là que le peuple se sent uni et assiste au simulacre de sa propre puissance. » On ne sait malheureusement rien de précis sur les spectacles et les fêtes qui se déroulaient dans celui d’Augustoritum. Les archéologues ont néanmoins trouvé certains objets où sont représentés un lion, des gladiateurs. De l’autre côté de la ville, au débouché du pont et à l’entrée du cardo maximus, se situait le théâtre antique, d’un diamètre d’au moins 82 mètres.
Le forum, situé là où plus tard fut – par un malicieux hasard – construit l’Hôtel de Ville, était au cœur de la ville, à la croisée des deux artères principales et il exploitait politiquement le relief pour mettre en valeur les aménagements monumentaux. Trois esplanades le composaient, avec de nombreuses boutiques, une place publique centrale, des portiques, sans doute une basilique civile, peut-être un temple du culte impérial (mais ce n’est pas assuré), peut-être aussi un macellum, place close réservée aux foires et marchés. Des statues de notables locaux ornaient le forum.
Une vaste nécropole était située au nord-ouest de l’amphithéâtre. Les découvertes des archéologues ne font mention que d’incinérations, avec deux types de sépultures, en fosse et en coffre. Certaines tombes étaient signalées par des stèles ou des cippes de granit. 33 épitaphes ont été retrouvées, dont celle du professeur de grammaire Blaesianus, originaire de Bourges. Trois célèbres lions de pierre limougeauds avait une destination funéraire : celui qui fut longtemps près d’une porte de la basilique Saint-Martial (aujourd’hui au Musée des Beaux-Arts) et ceux qui encadrent le portail de l’église Saint-Michel-des-Lions. Par ailleurs, le seul cippe monumental complet, monolithe, se trouve au chevet de la cathédrale. Un cimetière de moindre importance se situait Square des Emailleurs et les archéologues ont aussi recensé des tombes isolées. Au Bas-Empire, d’autres firent leur apparition, dont la nécropole Saint-Martial, en partie fouillée à l’occasion d’un chantier de construction en 2012, entre la place de la République et la rue de la Courtine. Les recherches archéologiques entreprises ont montré une utilisation dense de cet espace funéraire, du IVème au IXème siècle, avec des superpositions de tombes.
Les travaux des archéologues montrent un abandon progressif de la ville à partir de la fin du IIIème siècle, lorsque l’Empire romain d’Occident entre dans une phase de crise politique, économique et sociale. C’est ainsi à cette époque que les thermes semblent cesser leur fonctionnement. Le ressenti de l’insécurité pousse certains à enfouir et dissimuler leurs richesses. Des bâtiments publics ou privés sont démantelés dans le but de récupérer des blocs de grand appareil ainsi que du calcaire et du marbre pour confectionner de la chaux. Les familles fortunées s’installent plus durablement dans leurs domaines ruraux. L’essentiel de la population enfin, se déplace de la ville (une partie demeurant cependant toujours près du pont) vers un possible castrum au Puy Saint-Etienne surplombant la Vienne, dès le Bas Empire. C’est la naissance de la Civitas Lemovicum – la médiéviste Bernadette Barrière notant toutefois qu’ « il n’est d’ailleurs nullement certain que la Cité ait été constituée et individualisée dès ce temps. »
Chers lecteurs, rendez-vous fin août, les historiens aussi ont besoin de vacances!