Daniele Sallenave, présidente de la 34ème édition
Echanges avec mon ami Jérôme Leroy, notamment publié par la prestigieuse Série Noire de Gallimard, et avec la grande historienne Mona Ozouf… Non, cette année, je ne pourrai pas les rencontrer: je ne serai pas à Brive mais à… Paris. Je croiserai donc le fameux « Train du livre » qui conduit les auteurs vers « Cholesterol City », pour reprendre l’expression d’Erik Orsenna – si mes informations sont exactes. Si je fais une entorse sur ce blog consacré à l’histoire limougeaude, c’est parce que cette « foire du livre » (attention! L’éditeur René Rogerie évoquait la Fête des ânes à propos de ce type de manifestation!) est bien entrée dans l’histoire, celle du « riant portail du Midi ».
J’aurais bien aimé m’entretenir avec Mona Ozouf, car elle est lauréate 2015 du Prix de la langue française qui récompense une personnalité du monde littéraire, artistique ou scientifique dont l’oeuvre a contribué de façon importante à illustrer la qualité et la beauté de la langue française. Il est doté de 10.000 € par la Ville de Brive. Le jury est composé d’Académiciens français, d’Académiciens Goncourt, d’écrivains et de journalistes. C’est un prix largement mérité par l’historienne dont la lecture provoque toujours un intense plaisir littéraire et intellectuel. Je vous conseille particulièrement sa Composition française. Une autre dimension donc que certains autres invité(e)s, comme Christine Angot, dont on se souvient qu’en 2008, elle avait livré le récit sans intérêt littéraire de sa rencontre avec Doc Gynéco (un rappeur oublié) justement à la Foire de Brive. Comme quoi, cette Foire du livre de Brive, c’est un peu La Samaritaine: on y trouve de tout! C’est sans doute ce qui fait son succès, chaque début de septembre.
Elle fut créée en 1973 et son existence est intimement lié à « L’Ecole de Brive », dont le romancier Jacques Peuchmaurd fut le parrain: « Moi, plutôt que groupe, plutôt qu’école, je dis bande… Un groupe uni par l’amitié, qui fait leur force, et elle est considérable… A l’origine, il y a donc un pays, la Corrèze, et une ville, Brive. Des paysans et des citadins… mais Creusois ou Corréziens c’est pareil: nous sommes tous des Limousins, de la nation gauloise des Lémovices – des pas commodes, selon César. » En 73, donc, c’est la rencontre entre lui, Michel Peyramaure et Claude Michelet, une équipe à laquelle vient se joindre un peu plus tard Denis Tillinac, puis Christian Signol et Gilbert Bordes. Peuchmaurd précisa la philosophie de sa bande: « … on festoie: on boit, on rit, on déconne (nous sommes très doués). On n’est plus seul! » La suite, on la connaît: c’est un immense succès commercial. » En 1998, le facétieux Pierre Marcelle ironisait dans Libération: « Solidement implantés dans le paysage socioculturel de Jacques Chirac et de Patrick Sébastien, ils sont la FNSEA d’une industrie agriculturelle que les Goncourt viennent désormais honorer chaque premier dimanche de novembre, à la veille de la remise de leur propre trophée. Les sous-préfets des lettres parisiennes applaudissant à la remise du Grand prix littéraire de la Corne d’or limousine, c’est beau comme la scènes des comices dans Madame Bovary… ». S. Coyault-Dublanchet notant par ailleurs: « Quant à Pierre Michon, Pierre Bergounioux ou Richard Millet, en leur province même – le Limousin – ils tiennent à afficher leur distance à l’égard de la très locale « Ecole de Brive ». Il n’empêche, on a déjà croisé l’ami Bergounioux à la Foire du Brive, éprouvant beaucoup de plaisir à écouter magnifiquement disserter ce grand écrivain corrézien – l’un des plus grands écrivains français.
Le temps sera clément, cette année encore, pour aller se presser à la foule dans les allées de la Foire, mais aussi se prélasser sur une terrasse. Ne pas oublier d’aller faire un petit tour à la librairie de livres anciens Livresse de Frédérick Bazin, 14 bis rue Elie Breuil, qui accueillera Vénus Khoury-Ghata, l’une des grands poètes de notre temps, dont l’écriture est illuminée par son Liban natal, souvenirs heureux, teintés de désespoir et de chagrin, la Guerre et la Mort étant passés par là… Connue et reconnue pour son travail romanesque, elle se considère avant tout comme poète. Diane de Bournazel sera également présente. Ce sera samedi 7 novembre 2015, à partir de 17h.